À une heure de Montréal se trouve le Haras Laurentien, un véritable havre de paix pour les chevaux, mis sur pied par Samuelle Ducrocq-Henry et son mari, Geoffroy Garnier. Ensemble, ils ont créé un centre de 70 hectares consacré aux chevaux et aux arts équestres où, chaque dernier week-end du mois, ils présentent Opérette et Voltaire: les mémoires d'un cheval-tambour, un spectacle dans lequel sont en vedette plusieurs chevaux adoptés ou secourus. Entrevue avec la maîtresse des lieux.

Q : Comment a commencé l'aventure du Haras Laurentien?

R : Il y a 19 ans, je suis partie de France pour aller au Québec avec deux valises. Alors que je participais au Championnat du monde équestre au sein de l'équipe canadienne, j'ai rencontré mon mari. Je montais alors Morgan, mon premier cheval adopté que j'avais récupéré à l'encan à bestiaux. On est tous les deux passionnés de chevaux et on a monté le haras. Sauver des chevaux fait partie de notre philosophie depuis toujours, mais on ne l'avait jamais mis de l'avant. On voulait un site où les gens aimeraient venir pique-niquer au milieu des chevaux pour mieux les découvrir. On a aussi décidé d'offrir aux adultes la réalisation d'un rêve d'enfant: même si vous n'êtes jamais monté à cheval, votre première photo sera prise sur un cheval de spectacle cabré.

Q : Quel genre de chevaux sauvez-vous?

R : Les chevaux, dans la vie, arrivent à vous. Au haras, on a des races prestigieuses et rares comme les pures races espagnoles, mais les adoptés, eux, comme Morgan, on les rencontre à des moments où on ne s'y attend pas. J'allais acheter du produit pour les mouches et je suis tombée sur cette bête fabuleuse. Je suis rentrée dans le box de l'encan, un lieu assez sordide. Je me suis retournée et il m'a portée par le haut de mon blouson. J'ai attendu la fin de la vente aux enchères et j'ai surenchéri contre l'acheteur de l'abattoir, car les chevaux qui sont là le sont surtout pour la viande! Mardi soir, mon mari et moi sommes allés sauver deux chevaux qui partaient vers une mort certaine. Leur propriétaire était venue nous voir lors du spectacle pour nous dire que la semaine suivante ses chevaux partaient à l'abattoir.

Q : À quoi ressemble votre spectacle?

R : Mon mari et moi avons en commun une autre passion: la technologie. Alors on a allié chevaux et audiovisuel dans notre spectacle. On a pensé la salle avec un écran panoramique de 22 m de large où on projette tous les décors, dont certains sont interactifs. Dans Opérette et Voltaire: les mémoires d'un cheval-tambour, on suit 20 ans de la vie de Voltaire, un de nos étalons Gypsy, d'après son point de vue. Je suis partie d'un roman que j'ai écrit au cours des dernières années, une synthèse de tout ce que j'ai appris sur les chevaux. À travers une fresque historique, le spectacle permet de connaître tout ce qu'il y a à savoir sur les chevaux: leur fragilité, le fait qu'ils sont claustrophobes, ou encore hyper anxieux. On partage ainsi la vie d'un cheval en tournée dans les coulisses des cabarets équestres parisiens, mais aussi de New York et Montréal au coeur de la Belle Époque. Le spectacle présente des effets spéciaux inédits mêlant intégrations virtuelles et performances musicales jouées en direct à cheval, voltige cosaque, monte en amazone, monte à cru et liberté, ventriloque, cracheur de feu et musiciens à cheval! Sur les 14 chevaux du spectacle, 4 sont des adoptés, dont une jument blanche de 27 ans qui sert d'écran géant.

Q : Quels sont vos projets à venir?

R : Notre objectif d'ici 2017 est d'ouvrir un musée vivant du cheval. On bâtit ce rêve tous les jours, en compilant des archives, en faisant un appel à la population pour trouver des photographies de chevaux qui circulent dans les familles sur le travail de déneigement, les draveurs ou le transport, mais aussi de retrouver du harnachement, des selles et de l'attelage d'époque. Ça serait intéressant de réunir tout ça pour mieux faire connaître l'histoire du cheval au Québec.



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Opérette et Voltaire: les mémoires d'un cheval-tambour, un spectacle présenté au Haras Laurentien à Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson chaque dernier samedi (20h) et dimanche (15h) du mois. Prix: 39$ pour les enfants, 55$ pour les adultes, 139$ pour des places VIP avec photo, visite et cocktail. www.leharas.ca