Dominé par Apple, le marché des applications (jeux, gadgets, vidéos, etc.) sur téléphones mobiles suscite de vives convoitises, tant du côté des fabricants concurrents que des opérateurs, qui ont décidé de s'unir pour contrer le groupe américain.

Vingt-quatre opérateurs, parmi lesquels China Mobile, Orange, l'espagnol Telefonica, le britannique Vodafone ou encore le japonais NTT Docomo, ont annoncé lundi la création d'une alliance pour développer une plateforme ouverte d'applications, lors de leur congrès mondial à Barcelone.Celle-ci proposera «des applications pour tous les utilisateurs de téléphones mobiles», quelle que soit la marque de leurs appareils, ont-ils affirmé, alors que les boutiques d'Apple, Blackerry et Nokia, par exemple, sont réservées à leurs clients.

Les 24 opérateurs -- dont le projet est soutenu par l'association mondiale des opérateurs GSMA et trois constructeurs de téléphones (LG, Samsung et Sony Ericsson) -- représentent «plus de 3 milliards de clients à travers le monde», ont-ils souligné.

L'initiative témoigne de l'intérêt que suscite le monde des applications, popularisées par Apple. Si les applications existaient avant lui, l'américain les a mises en vedette avec son App'Store.

«Apple a pris de court le marché et a réussi à établir une relation directe avec les consommateurs», court-circuitant les opérateurs, rappelle Thomas Husson, analyste au cabinet Forrester.

La boutique Apple compte désormais quelque 140.000 applications et plus de 3 milliards ont déjà été téléchargées depuis son lancement en juillet 2008.

«Une nouvelle application est ajoutée toutes les cinq minutes» sur l'App'store, souligne Mohssen Toumi, analyste au cabinet Booz&co.

En pleine croissance, la boutique de Google, avec son système d'exploitation «ouvert» Android, en propose déjà quelque 25 000, après seulement quelques mois, mais reste encore loin d'Apple.

Les autres concurrents sont à la peine: RIM (Blackberry) en compte par exemple 5000 (sans compter celles spécifiques au monde de l'entreprise) et Microsoft 4000. Nokia qui dispose d'une «force de frappe dans les pays émergents», selon Forrester, ne diffuse pas ses chiffres mais en proposerait 8000, d'après Booz&Co.

L'enjeu est crucial: le marché des applications devrait passer de 4,2 milliards d'euros en 2009 à 20,17 milliards en 2013, selon l'institut Gartner.

«Même si sur le papier l'initiative des opérateurs a l'air très alléchante», «pour l'instant, il n'y a pas encore de choses concrètes, de date de lancement précise», souligne Thomas Husson, de Forrester.

«Cela va être compliqué à mettre en musique: il y a à la fois des problématiques techniques (pour développer des applications sur tous les systèmes) et de coordination entre les opérateurs. Au sein de l'alliance, les opérateurs sont très différents et sont parfois directement concurrents», ajoute-t-il.

De plus si l'objectif des opérateurs est de «stopper la fragmentation du marché des applications et des systèmes d'exploitation», «les autres annonces faites à Barcelone suggèrent que dans un futur proche la situation risque en fait de s'aggraver», affirme Mark Newman, directeur de recherche à Informa Telecoms & Media.

Samsung a ainsi présenté dimanche ses premiers mobiles sous son propre système, Bada, avec sa propre boutique, tandis que l'équipementier Ericsson a lancé lundi son eStore, un magasin en ligne comptant déjà 30 000 applications pour là aussi tous types de téléphones.