Juin 2013, je suis à ma troisième journée de l'E3. Mon collègue me conseille d'aller faire un tour vers le stand de Red Barrels, tout jeune studio de Montréal derrière un survival/horror indépendant plutôt atypique nommé Outlast. Ce que je fais aussitôt. Pour tester mes nerfs. Doit-on y jouer?

Oui : pour la rencontre à l'E3

L'E3, c'est des dizaines de journalistes qui circulent autour de nous, des lumières éblouissantes et une cacophonie à rendre sourd. Pourtant, en essayant la démo d'Outlast, écouteurs sur les oreilles et manette en mains, on se sent immédiatement seul, très seul. Dix à quinze minutes dans l'antre d'un asile dont la réouverture, faite dans le secret le plus total, attire l'attention d'un journaliste que nous interprétons.

Qui est assez fou pour mener une enquête dans les couloirs d'un asile où il n'est pas rare d'enjamber des corps décapités, avec comme seul gadget une caméra pour faire un zoom et voir dans le noir? Nous, le joueur. J'avance tranquillement, je frissonne comme si, à chaque coin de couloir, une créature allait me sauter dessus. Au moment où je vais ouvrir une porte, un homme défiguré fonce vers moi. Je ne sais quoi faire. Je reste figé comme un chevreuil devant les phares d'une voiture. C'est la fin. En sortant, on me dit qu'il fallait courir et me cacher. Je le saurai pour la prochaine fois.

Oui : pour la première vraie soirée d'horreur

On a beau savoir dans quoi nous nous lançons lorsqu'on recommence Outlast, il est difficile de maîtriser nos émotions. Ce jeu représente cinq ou six heures d'horreur. Dans ce jeu très simple, armés de notre caméra, nous parcourons des couloirs lugubres et sombres, la plupart du temps dans le silence total. Le seul bruit de fond est une musique inquiétante et notre respiration qui augmente sous la peur. On ne sait jamais quand nous rencontrerons un patient de l'asile au comportement violent. L'immersion est totale et l'aiguille de la tension est à fond. Après une heure de jeu, et deux pauses santé pour les nerfs, je n'en pouvais plus.

Oui : parce que la tension perdure

Plus le temps passe, plus nous décodons ce qu'est Outlast. Nous apprenons à faire du bruit pour attirer les désaxés et les contourner. Nous amassons les piles pour notre caméra. Nous apprenons à nous enfuir en courant et à nous cacher rapidement dans un casier ou sous un lit. Nous apprécions les mouvements fluides et réalistes de notre personnage. Parfois, l'intelligence artificielle nous semble risible. Pourtant, c'est quand nous pensons être le plus maîtres de la situation qu'Outlast sort une carte de son jeu pour renouveler la tension jusqu'à la fin.

Doit-on y jouer?

OUI

La jouabilité d'Outlast, aussi simple soit-elle, regorge de variété et alterne intelligemment entre la furtivité, le jeu de plateau et l'horreur pure. La modélisation des personnages jure devant les nombreux petits détails graphiques réalistes du jeu. Mais rien pour gâcher notre plaisir. Nous sommes entre les mains de développeurs manipulant adroitement le joueur au coeur d'un scénario qui nous plonge dans une paranoïa constante. Si jamais nous nous ennuyons dans ce jeu, ce sera seulement de notre mère. Pour seulement 20 $, ça vaut le coup.

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Concepteur : Red Barrels

Éditeur : Red Barrels

Console : PC (PS4 à venir)

Cote : M (18+)