À première vue, on croirait qu'il s'agit d'une photo nocturne de Montréal prise à partir d'un satellite. En observant de plus près, on constate que les lumières de la ville ne se trouvent pas où elles devraient être. Les alentours du mont Royal et du Stade olympique sont particulièrement éclairés.

En fait, ces lumières éclairent les lieux d'où ont été envoyés des photos sur le service d'hébergement Flickr et des gazouillis sur Twitter.

Les cartes d'Eric Fischer sont des expressions artistiques d'une réalité numérique. Pour ce projet appelé See Something or Say Something, le programmeur californien a utilisé les données de deux services web, le site de photos Flickr et le service de microblogues Twitter. Des dizaines de milliers de coordonnées géographiques ont été transformées en cartes.

Dans le cas de Montréal, on voit rapidement que les photos publiées sur Flickr sont concentrées aux endroits les plus fréquentés ou les plus photogéniques, par exemple le Vieux-Montréal, l'île Sainte-Hélène et le centre-ville. Les gazouillis sont davantage dispersés.

«Je collectionne les cartes depuis longtemps et j'ai toujours été fasciné par elles. Mais ce n'est que très récemment que j'ai commencé à faire les miennes», dit Eric Fischer, joint au téléphone en Californie.

Sa série Locals and Tourists a particulièrement attiré l'attention l'an dernier. En analysant les photos publiées sur Flickr, il a entrepris de séparer les photos prises par les résidants d'une ville de celles faites par les touristes.

D'un coup d'oeil, on voit ce que les touristes photographient à Londres, San Francisco ou Montréal.

Ces données sont accessibles sur le web à quiconque, mais peu ont la patience et la passion de les analyser comme le programmeur le fait, un travail qui lui a pris plusieurs mois.

L'effort aura valu le coup. Cet automne, Eric Fischer a fait son entrée au Museum of Modern Art de New York (MoMA) dans le cadre d'une exposition consacrée à la culture numérique.

«Je n'ai jamais pensé que ces cartes seraient un jour considérées comme de l'art. Ce serait très présomptueux de me considérer comme un artiste, ce n'est pas mon milieu. Mais si c'est au MoMA, je suppose que c'est de l'art», dit le programmeur, encore troublé par sa présence dans l'institution muséale. Pourtant, quand il réunit les cartes et la technologie, Eric Fischer fait de la magie!