Les petits Québécois clavardent de plus en plus? Profitons-en! vient de conclure le comité chargé d'enquêter sur les moyens de rehausser les connaissances en français des élèves de la province. L'ordinateur serait à classer dans les rangs des alliés de la langue.

Les petits Québécois clavardent de plus en plus? Profitons-en! vient de conclure le comité chargé d'enquêter sur les moyens de rehausser les connaissances en français des élèves de la province. L'ordinateur serait à classer dans les rangs des alliés de la langue.

Le constat du comité d'experts sur l'apprentissage de l'écriture, dévoilé mercredi, est sans équivoque. Le ministère de l'Éducation devra étudier les moyens de mieux intégrer l'ordinateur dans les classes. Pour le bien du français. «L'utilisation des outils informatiques est appelée à croître et à se généraliser au cours des prochaines années. Il faut tout mettre en oeuvre pour tirer le plus de profit possible de cette ressource et bénéficier du fait que l'ordinateur fait partie intégrante du monde de l'enfant.»

«Il faut que les programmes de français s'adaptent à la présence de l'informatique de la même façon que l'enseignement des mathématiques et des sciences a su apprivoiser la calculatrice de poche au début des années 70», écrit le comité.

Plusieurs études menées à l'étranger prêtent déjà aux technologies de l'information des bénéfices tangibles aux apprentissages- en général - des enfants. La semaine prochaine, un projet de recherche sera lancé dans une école de Montréal pour vérifier à moyen terme le développement des compétences en français des élèves du secondaire qui rédigent leurs travaux sur ordinateur, par rapport à la «bonne vieille méthode» du papier et du crayon. Le responsable de l'étude, Pascal Grégoire, étudiant au doctorat à l'Université de Montréal, est prudent, mais il estime que le premier groupe réussira mieux.

Postés derrière un écran, les élèves auraient tendance à réviser plus souvent leurs textes, ils seraient plus attentifs aux consignes et resteraient concentrés plus longtemps. «Mais c'est surtout sur le plan de la motivation que les impacts semblent les plus positifs, note Pascal Grégoire. Les élèves ont le sentiment d'être plus en contrôle de ce qu'ils font, ce qui a un bon effet sur leur motivation.» Un facteur primordial de la réussite scolaire, particulièrement chez les garçons.

Une aide de tous les instants

Autre révolution: le comité recommande que l'on enseigne aux élèves à utiliser des correcteurs informatiques. Une position que plusieurs professeurs voient d'un très bon oeil. «L'arrivée de l'ordinateur n'a pas eu l'effet catastrophique appréhendé sur le français des élèves, mais il n'a pas eu l'effet positif qu'il aurait dû avoir», constate Chantal Édith Masson, professeure au département de linguistique de l'Université de Sherbrooke.

Aujourd'hui, l'aide à la disposition des scribes est plus diversifiée, complète et accessible que jamais. Les sites de correction orthographique en ligne - gratuits - se sont multipliés. Les logiciels se sont perfectionnés. Du coup, on aurait dû voir un redressement de la qualité français. Ou la disparition, à tout le moins, des fautes d'orthographe d'usage. «Mais même nos étudiants à l'université, de cette génération que l'on dit pourtant branchée, ne savent pas utiliser ces outils qui peuvent bonifier considérablement la langue», dit Mme Masson.

«Les enfants nous le disent et on le voit dans les classes: ils n'utilisent pas les dictionnaires papier. Les volumes restent sur le coin du bureau. C'est à peine s'ils les ouvrent à la fin d'une composition pour chercher un ou deux mots au sujet desquels ils ont des doutes. Par contre, si un mot est souligné en rouge, alors là, l'élève est obligé d'y porter attention et de se poser des questions», remarque Thierry Karsenti, titulaire de la chaire de recherche du Canada sur les TIC en éducation.

Se relire, tout simplement

Ces logiciels ne sont pas des béquilles, dit M. Karsenti. En consacrant moins de temps en classe à des questions d'orthographe, les enseignants pourront se concentrer sur les notions de grammaire, de syntaxe et de structure, là où les lacunes sont à la fois grandes et difficiles à corriger. Pour reprendre l'analogie de la calculatrice, la techno permet d'éclipser rapidement les opérations simples pour passer aux notions plus complexes.

Considérant les limites des correcteurs, plusieurs en retiennent plutôt les bénéfices sur les méthodes de travail. «Mes étudiants éviteraient la plupart de leurs fautes s'ils se relisaient, tout bêtement», dit le linguiste Éric Kavanagh, professeur à l'Université Laval. Cette habitude s'adopte plus rapidement quand il suffit d'un clic pour lancer la révision.

Ces correcteurs, nuance toutefois Pascal Grégoire, sont plus efficaces chez les utilisateurs possédant déjà une bonne connaissance de la langue. Et puis, les recommandations du comité frappent un mur. Celui de la réalité. En décembre dernier, Statistique Canada révélait que seulement 15% des élèves au Québec disent utiliser «souvent» (plusieurs fois par semaine) l'ordinateur à des fins scolaires, contre 29% au Canada et environ autant dans les pays de l'OCDE. Pire: près d'un adolescent sur cinq (17%) n'utilise «jamais» l'ordinateur à l'école.