Les nouvelles consoles de jeux vidéo et les téléphones intelligents se ressemblent de plus en plus, un détail qui n'échappe pas aux éditeurs d'applications mobiles. Avec cette nouvelle frontière qui s'effrite, c'est le lucratif marché mondial du jeu vidéo qui s'ouvre enfin à eux.

«Le jeu vidéo a longtemps stimulé l'évolution des ordinateurs personnels. Les gens achetaient un nouveau PC pour pouvoir jouer au jeu de l'heure. C'est la même chose aujourd'hui, mais du côté du mobile: les jeux mènent les gens à acheter des téléphones intelligents plus performants», observe Élie Charest, directeur de la création pour Miralupa, une PME montréalaise spécialisée dans les applications mobiles.

L'automne dernier, Miralupa a mis en marché, sur l'App Store d'Apple Chromian Wars, jeu recourant à la caméra vidéo de l'iPhone ou de l'iPad et qui utilise l'environnement immédiat du joueur comme univers de jeu. C'est ce qu'on appelle la réalité augmentée: à partir d'une image réelle, l'application ajoute des éléments graphiques qui mêlent réalité et numérique.

Jusqu'à tout récemment, la réalité augmentée était un phénomène marginal, limité aux téléphones intelligents de pointe. Or, au cours des derniers mois, Nintendo et Sony ont mis en marché des consoles de jeu portatives dont la fiche technique s'inspire de ces téléphones: surfaces tactiles, caméra vidéo, connexion Wi-Fi, et boutique virtuelle d'applications.

Pour des éditeurs d'applications mobiles, ça ouvre les portes d'un tout nouveau marché: celui des jeux de console. Un marché plus mature, à la croissance plus modeste que le mobile, mais 6 fois plus imposant, à 66 milliards de dollars en 2012, contre un peu plus de 10 milliards pour le mobile, selon la firme Jupiter Research.

En prime, les jeux peuvent s'y vendre 3, 4, voire 10 fois plus cher. Pas pour rien si l'éditeur finlandais Rovio décline à toutes les sauces son jeu Angry Birds, qui a d'abord connu du succès sur les téléphones.

«Tout le monde peut avoir sa part du gâteau. Les grands éditeurs sont là, mais les petits indépendants peuvent aussi dominer le marché», résume M.Charest, qui compte bien y faire sa place. La semaine prochaine, son entreprise profitera du Game Developers Conference (GDC), à San Francisco, afin de rencontrer des dirigeants de Sony. Miralupa présentera une version spéciale de Chromian Wars adaptée aux téléphones Android de Sony, ainsi que pour sa nouvelle console, la PS Vita.

Les fabricants de téléphones jouent le jeu

S'il y a une tendance forte dans le jeu vidéo, c'est que la «plateforme» importe de moins en moins. Présent au Mobile World Congress, événement annuel d'envergure mondiale qui a lieu ces jours-ci à Barcelone, un analyste de la firme Digital World Research a fait remarquer que le jeu vidéo devient, en 2012, une partie vitale de tout type d'appareils électroniques.

«Avant, c'était bien d'avoir des jeux sur ses téléphones ou ses tablettes, Maintenant, c'est essentiel. Les jours des appareils ne servant qu'une seule fonction sont officiellement comptés», a noté PJ McNeally sur le site de son employeur.

Avec leurs processeurs ultraperformants, les nouveaux téléphones dévoilés à Barcelone par LG, HTC et Samsung, notamment, ont un objectif en tête: détrôner les consoles de jeu portables de leur piédestal. Elles pourraient bien y arriver, indique Daniel Gleeson, analyste pour IHS Global Insight.

«Ces téléphones sont attrayants pour les consommateurs et risquent d'empiéter sur des marchés adjacents, comme le jeu vidéo sur console», indique-t-il, prédisant une croissance de 218% des ventes de jeux vidéo sur mobile sur la plateforme Android.

De quoi faire peur aux fabricants de consoles. Plus important encore, de quoi faire sourire les créateurs d'applications mobiles.