Si les jeux vidéo gratuits des tablettes et téléphones cellulaire ne coûtent rien à 95% des joueurs, les 5% restants sont prêts à dépenser jusqu'à 100$ pour améliorer leur aventure virtuelle, un marché en expansion qui suscite la convoitise des éditeurs.

Les créateurs de jeux vidéo en ligne (désignés par l'acronyme F2P, signifiant «Free to Play», ce qui veut dire jeu d'accès gratuit) se financent en vendant des accessoires à l'intérieur du jeu lui-même: des armes pour combattre l'ennemi, des vêtements ou des raccourcis pour changer de niveau plus vite.

Autant de gadgets qui peuvent coûter entre 1$ et 100$.

L'essentiel des ventes se situe autour de 5$ et seuls 4 à 5% des joueurs sont prêt à sortir leur carte de crédit, selon John Young, vice-président de développement de produits chez Perfect World Entertainment, filiale américaine du groupe chinois Perfect World.

«Ce qui est vraiment apparu ces dernières années et qui se développe de façon exponentielle, ce sont les F2P», a-t-il déclaré lors du salon E3, la grand-messe du jeu vidéo, qui se tenait à Los Angeles.

Perfect World Entertainment, qui édite les jeux à succès Donjons et Dragons et Star Trek Online, a doublé son chiffre d'affaires chaque année depuis 2008. Et sa maison mère a engrangé 429 millions de dollars en 2011, essentiellement grâce aux F2P.

Pour être rentable avec un si petit nombre de gens prêts à payer pour un accessoire virtuel, le modèle économique exige une participation massive des joueurs --plusieurs millions--, rendue possible grâce aux progrès des tablettes et téléphones portables et la propagation d'internet.

«La clé, c'est le volume», a déclaré Yves Guillemot, président du géant français Ubisoft.

«Il faut parvenir à ce qu'énormément de gens téléchargent le jeu, sinon il n'y aura pas suffisamment de personnes disposées à payer pour les accessoires», dit-il.

Le jeu Free Realms, de Sony Online Entertainment (SOE), compte 23 millions d'utilisateurs dans le monde, tandis que Star Trek Online, édité par Perfect World, lancé le 17 janvier dernier, a vu le nombre de ses joueurs augmenter de 700% en deux mois.

«Dans le vieux modèle (économique), on faisait une seule vente et après cela, le créateur ou l'éditeur ne recevait plus d'argent de l'acheteur», explique M. Young.

«Du coup, ils ne s'intéressaient pas à la façon dont les gens utilisaient les jeux. Dans notre modèle, on ne gagne de l'argent que si les joueurs continuent à apprécier leur jeu après l'avoir essayé».

Une opinion partagée par John Smedley, président de Sony Online Entertainment (SOE), la branche de Sony consacrée aux jeux sur internet, parmi lesquels Planet Side 2 -- dans la veine de Call of Duty -- et Everquest.

«Ce modèle est plus pur, car on parle de la qualité du jeu. Sur le marché des jeux traditionnels, les gens peuvent acheter des produits bons ou mauvais», dit-il.

«Mais jouer sur un F2P, c'est comme aller au cinéma et décider, après avoir vu le film, si on veut payer 5$ ou 10$».