Hier matin, le géant américain des logiciels a offert d'acheter Yahoo!, le numéro deux mondial de la publicité en ligne, pour la somme de 44,6 milliards de dollars US. Ce faisant, Microsoft espère réinventer son modèle d'affaires et passer d'une entreprise dominante dans les logiciels de base (Office et Windows) à un acteur majeur de la pub sur internet.

Hier matin, le géant américain des logiciels a offert d'acheter Yahoo!, le numéro deux mondial de la publicité en ligne, pour la somme de 44,6 milliards de dollars US. Ce faisant, Microsoft espère réinventer son modèle d'affaires et passer d'une entreprise dominante dans les logiciels de base (Office et Windows) à un acteur majeur de la pub sur internet.

Google et son formidable moteur de recherche accaparent aujourd'hui le tiers de la publicité mondiale sur internet, contre seulement 15% pour Yahoo! et encore moins pour Microsoft. L'entreprise fondée par Bill Gates justifie son offre par le fait que ce marché de la pub internet «croît à un rythme très rapide et passera de 40 milliards de dollars US en 2007 à 80 milliards en 2010».

L'entreprise de Redmond, dans l'État de Washington, propose d'offrir 31$US pour chacune des actions de Yahoo!, soit 62% de plus que le cours boursier de Yahoo! jeudi soir. Les 31$US seraient versés moitié en argent comptant et moitié en actions de Microsoft. Devant cette offre au prix fort, la direction de Yahoo! est restée prudente, se bornant à répondre qu'elle «l'examinerait très attentivement».

Logiciels gratuits

Les analystes estiment que Microsoft, qui tire plus de 80% de ses recettes de la vente de ses logiciels Windows et Office, doit se diversifier, car il est menacé par l'émergence des logiciels gratuits sur l'internet, comme ceux lancés justement par Google ces derniers mois.

Dans une conférence téléphonique, les dirigeants de Microsoft ont reconnu que leur groupe pourrait ainsi miser sur le nouveau modèle des logiciels en ligne financés par la publicité.

«Cette annonce est une étape majeure dans la transformation de Microsoft. Cela permettra une synergie entre logiciels et revenus publicitaires. Les utilisateurs de Windows veulent un service en ligne, il y aura un Office en ligne, et un Windows en ligne», a commenté le PDG, Steve Ballmer.

Selon Microsoft, le mariage avec Yahoo permettra d'économiser un milliard de dollars de dépenses. L'entreprise compte près de 80 000 employés contre environ 14 000 pour Yahoo!

L'offre de Microsoft a été accueillie froidement par les investisseurs. Hier, le titre de l'entreprise a reculé de 2,15$ (6,6%) à la Bourse de New York, à 30,45$US.

«Microsoft paie le plein prix pour une entreprise stagnante, qui ne réalise pas de croissance organique. Je ne vois pas du tout comment ça peut fonctionner», a déclaré à l'agence Bloomberg Jon Fisher, gestionnaire de portefeuille pour le compte de Fifth Third Asset Management, de Minneapolis.

Son de cloche semblable de Thomas Radinger, gestionnaire de fonds pour le compte de Pionneer Investments, à Munich. «Microsoft est sous pression pour accroître ses affaires internet et repousser la concurrence de Google. Cette transaction démontre à quel point ils sont désespérés», a-t-il dit à l'agence Bloomberg.

Selon M. Radinger, cette transaction est un gros pari pour Microsoft, compte tenu du prix élevé. «Il faudra des années pour intégrer avec succès une transaction d'une telle importance», a-t-il dit.

Mais pour le consultant montréalais en technologie Iain Grant, du groupe Seaboard, Microsoft n'a pas le choix. «L'entreprise a besoin d'un plan d'avenir; elle doit se réinventer autour de l'internet et Yahoo! est la meilleure occasion pour ce faire», a-t-il dit.

François Rochon, gestionnaire de portefeuille chez Giverny Capital, de Montréal, ne voit pas nécessairement la transaction d'un mauvais oeil. «C'est une acquisition stratégique, mais ils en ont les moyens», dit-il, faisant référence à l'encaisse de 21,1 milliards de dollars US de Microsoft.

Créé en 1994, l'entreprise Yahoo!, de Californie, a longtemps été le portail internet le plus populaire au monde. Mais l'arrivée de Google, en 1998, a rapidement changé la donne. Selon le cabinet américain Comscore, Google accapare aujourd'hui 62,4% des recherches internet mondiales (66 milliards de requêtes effectuées sur ses pages), loin devant Yahoo! (12,8%) et Microsoft (2,9%).

Google est nettement dominante, donc, ce qui n'a pas empêché ses actionnaires de frémir devant l'offre de Microsoft sur Yahoo!. Hier, le titre de Google a reculé de 8,6% (48,40$), à 515,90$. Pendant ce temps, l'action de Yahoo! s'envolait de 48% (9,20$), à 28,38$.

Au Canada, la transaction pourrait éventuellement bousculer certaines alliances. Pour son site internet, par exemple, Rogers Communication est alliée à Yahoo!, tandis que le concurrent Bell Sympatico est avec Microsoft. Il est donc probable qu'une fusion entre Microsoft et Yahoo! oblige Rogers à se trouver un autre partenaire.