Si Hernán Losada s’attend à recevoir un vote de confiance des têtes dirigeantes du CF Montréal, il va devoir attendre.

Non, la décision n’a pas encore été prise quant à l’avenir de l’entraîneur-chef du Bleu-blanc-noir. Foi du président Gabriel Gervais, rencontré par les journalistes de La Presse mardi matin.

Le technicien argentin a toutefois été rencontré par ses supérieurs depuis le bilan de fin de saison, révèle Gervais. On ne sait pas ce qui s’est dit en privé. Mais en public, autant de la part du président que du directeur sportif Olivier Renard, on a tendance à noter le négatif bien avant le positif.

« Je vais vous dire, je n’ai pas aimé la façon dont le dernier match s’est déroulé », a expliqué Gervais d’emblée, lorsqu’interrogé au sujet de l’avenir d’Hernán Losada.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Hernán Losada, entraîneur-chef du CF Montréal

Nous sommes assis dans son bureau du stade Saputo, dont les grandes fenêtres donnent de belles vues sur le mât du Stade olympique et sur la pelouse de l’enceinte du CFM.

En parlant du dernier match, Gervais fait référence à la défaite de 2-1 contre le Crew, à Columbus. C’était l’ultime duel de la saison pour le CFM, et il était crucial pour une qualification en séries. Séries qui lui ont finalement échappé en raison de la victoire in extremis des Red Bulls de New York à Nashville.

« Oui, bien sûr, d’avoir perdu 2-1 [a été déterminant]. Mais c’est plus comment les joueurs se sont comportés pendant le match. […] Je n’ai pas vu ce sentiment d’urgence sur le terrain. »

Il donne des exemples qui l’ont « frappé ». Sur les corners, « les joueurs ne semblaient pas sprinter vers le drapeau de coin en deuxième demie ». Même chose lors des changements.

C’est quoi, le message qu’on a donné à ces joueurs pour qu’ils soient prêts pour ce match, et le gagner ?

Gabriel Gervais, président du CF Montréal

De façon plus générale, Gervais « peine à comprendre » pourquoi son équipe a paru si « désorganisée » à l’étranger en 2023, alors qu’elle a été « extrêmement compétitive » à domicile.

« J’ai été beaucoup sur la route avec l’équipe, et on dirait que ce n’était pas là. Le soccer qu’on jouait n’était pas celui qu’on veut voir. »

Il dit être « en accord » avec les propos prononcés au bilan de son directeur sportif Olivier Renard, à savoir que « même si on était rentrés [en séries] par la porte de derrière, on n’aurait pas été satisfaits de la façon globale dont on a joué ».

L’heure est à l’examen du travail de Losada et de son personnel technique « dans son ensemble », maintient Gervais.

« La décision appartient à Olivier Renard », dit-il, ajoutant que ce dernier a son appui. « La décision va vraiment venir du côté sportif. »

« Est-ce qu’on a fait le maximum ? »

Parlons-en, donc, du côté sportif.

On lui mentionne que cette saison, Losada n’a pas su tirer le meilleur de certains jeunes joueurs que le club cherche à développer selon son modèle d’affaires, en l’occurrence le Québécois Sean Rea. Gervais va même plus loin en énumérant quelques figures de l’effectif « en périphérie, qui n’ont pas évolué autant ». Il cite notamment Jojea Kwizera et Ousman Jabang.

Mahala Opoku a aussi « montré cette étincelle » sans pour autant être déterminant, selon le président. Il dit également avoir « senti beaucoup d’énergie » de la part de Bryce Duke à son arrivée. « Après ça, ça s’est éteint. »

C’est une des évaluations qu’on doit faire. Est-ce qu’on a fait le maximum avec ces jeunes-là ?

Gabriel Gervais, président du CF Montréal

Mais tout n’est pas noir à ce chapitre non plus.

« Si je prends du recul, tout le monde a eu une chance cette année, y compris les jeunes. »

Il mentionne le très bon développement de Jonathan Sirois, de Nathan Saliba, de Mathieu Choinière. Ce dernier « est maintenant une étoile dans la ligue ». Mais il revient aussi sur les objectifs que le club n’a pas atteints en 2023.

« Si on regarde toute la saison, on n’est pas satisfaits du résultat final. Pas seulement de ne pas être entrés en séries, mais de ne pas avoir remporté de trophée. »

Gervais se rappelle la finale du Championnat canadien perdue à Vancouver contre les Whitecaps. « Si ce match est au stade Saputo, je suis convaincu qu’on le gagne, de la façon dont on jouait à domicile. »

« Chaque fois, j’avais l’impression qu’on arrivait près d’atteindre certains objectifs, et là, on était à court. Même chose dans la Leagues Cup. On était là, et finalement, on manquait nos occasions. »

« Travail exceptionnel »

Si la question de l’avenir d’Hernán Losada reste entière en ce 1er novembre, il n’y en a pas du tout à se poser quant à la direction sportive du club.

Gabriel Gervais parle d’un « travail exceptionnel » effectué par Olivier Renard et son adjoint Vassili Cremanzidis, « avec le budget qu’on leur a donné ».

Quand je regarde ce qu’[Olivier] fait, ce qu’il apporte, cette culture d’avoir des jeunes Québécois locaux sur le terrain. Moi, je n’avais pas vu ça depuis [mes années de joueur]. C’est une grande fierté. […] C’est dans notre ADN.

Gabriel Gervais, président du CF Montréal

Renard a révélé au bilan que le « secteur offensif » du CF Montréal devait être « retouché ». Au vu des déboires du club en attaque en 2023, un budget plus important pourrait-il être débloqué pour aller chercher un joueur à caractère offensif d’envergure ?

Gervais rappelle que huit des neuf équipes avec les plus basses masses salariales en MLS se sont qualifiées pour les séries cette année, la seule exclue étant le CF Montréal. Traduction : payer plus cher pour des joueurs ne garantit aucun résultat sportif.

« On va faire des choix judicieux pour le bien du club à long terme, avance-t-il prudemment. Mais on a prouvé qu’en formant une équipe, on peut avoir du succès. »

Le président du CFM précise cependant que dans l’organisation du club, il préfère que ses leaders, « que ce soit le côté technique, marketing, les ventes, les partenariats », présentent leurs budgets à l’exécutif, et non l’inverse.

« On est en plein dedans, souligne-t-il, avant qu’un sourire vienne s’imposer sur son visage. Au party de Noël, il faut que le budget soit bouclé ! »

Lisez la chronique d’Alexandre Pratt « Gabriel Gervais : “on est là pour rester” »