« C’est un modèle, ici. »

Lorsqu’on parle du joueur de soccer québécois Mohamed Farsi au Grand Maître Raymond Mourad, de l’Académie de taekwondo portant son nom à Notre-Dame-de-Grâce, ce dernier n’a que des éloges à formuler à son sujet.

Farsi est aujourd’hui un régulier dans l’alignement du Crew de Wilfried Nancy, à Columbus. Mais avant qu’il ne devienne un des rouages importants du Black & Gold en 2023, avant qu’il ne signe un premier contrat en MLS en 2022… en fait, avant même qu’il ne devienne un joueur de soccer à temps plein à l’adolescence, Mo Farsi démontrait déjà une éthique de travail irréprochable.

« Je parle souvent de lui », raconte Raymond Mourad, au téléphone avec La Presse. Farsi est pour lui un « exemple » à montrer à ses athlètes.

[Mohamed Farsi] allait à l’école à temps plein. Il jouait au soccer à temps plein. Et il faisait du taekwondo à temps plein. Ça prend un athlète organisé, sérieux. Ce n’est pas tout le monde qui est capable de faire ça.

Raymond Mourad

Mourad l’a eu sous son aile de 2009 à 2013. En 2012, Farsi a remporté le championnat canadien, à Vancouver. Il avait 13 ans.

« Il s’en allait loin au soccer, mais il avait un objectif au taekwondo avant de dévier vers le soccer à 100 %, se rappelle-t-il. Il voulait gagner le championnat national. Et il l’a eu. »

Mourad ne garde que de bons souvenirs de celui qui évolue aujourd’hui en tant que latéral droit en MLS.

« Il était un de mes athlètes qui venaient tout le temps. Il ne manquait pas d’entraînement. Il n’avait pas d’excuse. Blessé ou pas, il venait ici pour encourager ses coéquipiers. C’était un athlète complet. »

« Sa photo est ici, sur le mur. Je ne l’ai jamais enlevée. »

PHOTO FOURNIE PAR RAYMOND MOURAD

Mohamed Farsi, sur la première marche du podium du Championnat canadien, à Vancouver, en 2012. La photo est encore à ce jour accrochée au mur de l’Académie de taekwondo Raymond Mourad.

Comme Zlatan

Les deux disciplines ont en commun de mettre à profit le bas du corps, les jambes et les pieds particulièrement.

Les aptitudes gagnées en pratiquant le taekwondo se transposent bien au soccer. Ce but, marqué par un autre ancien taekwondoïste en la personne de Zlatan Ibrahimovic en 2018, en est un bon exemple.

« Le taekwondo m’a aidé sur le plan du mouvement de mes hanches, défensivement », a expliqué Mo Farsi à La Presse, lors de notre visite à Columbus, il y a deux semaines.

Raymond Mourad précise que son art martial permet de gagner en agilité et en coordination, qualités bénéfiques pour un joueur de soccer.

Mais en jouant au foot, en « travaillant fort » sur les jambes, elles « deviennent un peu plus tendues », souligne le Grand Maître. On perd ainsi de cette flexibilité essentielle au taekwondo.

« C’est un titulaire pour moi »

Le choix de Farsi de se concentrer à 100 % sur le soccer a porté ses fruits. Farsi a signé son contrat en MLS en juillet 2022, et n’a disputé que sept rencontres cette année-là à Columbus. Mais sous Wilfried Nancy, le Québécois a obtenu 23 départs en 31 matchs en 2023.

On a parlé de son éthique de travail. Mais on a aussi l’impression que l’arrivée de l’ancien pilote du CF Montréal en Ohio nous a permis d’assister à l’éclosion du joueur.

« C’est un mix des deux », dit le principal intéressé, aujourd’hui âgé de 23 ans. « Sans effort, je ne suis pas là. Et s’il ne me donne pas ma chance, je ne suis pas là non plus. J’ai travaillé fort pour être où je suis, le coach l’a vu, mais c’était à moi de performer. »

Pour Nancy, Mo Farsi est un joueur « coachable ». Il s’explique.

Il y en a qui font semblant d’être coachés. Mais lui, il essaie d’appliquer [mes leçons] véritablement. Il est ouvert d’esprit. Je le mets en danger de temps en temps, et il essaie de le mettre en pratique.

Wilfried Nancy

En fin de saison, Nancy lui a préféré Julian Gressel dans le couloir droit. Farsi est donc passé de titulaire habituel à remplaçant. Le latéral n’a « pas de problème du tout avec ça », dit-il.

« C’est la réussite de l’équipe qui fait foi de tout, assure-t-il. Que j’aie 5, 10, 15 ou 90 minutes, je suis là pour aider l’équipe à gagner. »

Le vétéran Rudy Camacho, qui mentionne avoir « entendu parler de lui à Montréal », prône la patience dans son cas, « même s’il joue un peu moins » ces temps-ci.

« C’est quand même une belle saison pour lui, il a fait un gros pas en avant depuis l’année dernière. […] Il a de belles années à venir. »

Nancy ajoute que Farsi doit « améliorer un peu ses points faibles », mais il dit être « très content pour lui ».

« Mo a très peu joué l’année dernière, rappelle le technicien. Cette année, il a été titulaire. C’est un titulaire pour moi. Je suis fier de ça, parce qu’avec le staff, on a réussi à trouver les options, ce qu’on peut lui permettre d’améliorer sur le terrain. Ça fait partie des petites victoires que j’aime. »

« On est tous homogènes »

Le parcours en éliminatoires du Crew s’amorce ce mercredi soir : il dispute une série deux de trois face à Atlanta United, au premier tour.

Sous les ordres de Wilfried Nancy, Columbus s’est classé troisième en MLS et dans l’Est, en offrant l’un des styles de jeu les plus excitants du circuit.

Même s’il ne s’agit que de la première saison du Français à la barre de l’équipe, Mohamed Farsi estime que son équipe a « le groupe pour aller le plus loin possible ».

« Du gardien à l’attaquant, on se complète, on est tous homogènes. »

« Toutes les équipes sont là pour gagner, donc ça va être compliqué, concède-t-il. Mais on a le talent et la mentalité pour aller très, très loin dans les séries. »

Le Canada ou l’Algérie ?

Mohamed Farsi n’a toujours pas fait son choix quant à sa carrière internationale. Il peut décider de porter les couleurs du Canada ou encore celles de l’Algérie. « Je prends le temps de réfléchir, dit-il. Le jour où j’arrive dans une équipe nationale, je veux être prêt à vraiment être une pièce importante pour le groupe, et non pas juste y aller pour être un figurant. » Mais le fait que le Canada soit assuré de sa place à la Coupe du monde de 2026 doit peser dans la décision, non ? « Pour être honnête avec toi, non, ça ne joue pas trop dans la balance. Pour la seule et unique raison que la Coupe du monde va accueillir beaucoup plus d’équipes [48 au lieu de 32]. Donc les qualifications seront beaucoup plus accessibles pour les pays. »