(Doha) La porte, déjà ? Tombée de très haut avec une invraisemblable défaite inaugurale contre l’Arabie saoudite (2-1), l’Argentine est contrainte de réagir samedi à Doha face au Mexique, car une défaite marquerait la fin de sa Coupe du monde et du rêve de Lionel Messi.

Comment l’Albiceleste a-t-elle fait pour passer soudainement de très sérieuse prétendante au titre à une équipe battue 2-1 par un 8e de finaliste de la dernière Coupe d’Asie ?

Messi et les siens avaient pourtant débarqué au Qatar portés par une vague d’invincibilité de 36 matchs et gonflés de confiance après avoir enfin remporté un titre international, la Copa America 2021, premier trophée de la sélection depuis 1993.

Le flop a été considérable. Plutôt bien entrés dans le match avec un rapide penalty de Messi, les Argentins ont été renversés dès le retour des vestiaires par les Saoudiens, déchaînés sous le regard incrédule et ravi de leurs supporters.

« Where is Messi ? Have you seen Messi ? » (« Où est Messi ? Vous avez vu Messi ? ») Dans une vidéo qui tourne en boucle sur les réseaux sociaux, des fans des « Faucons Verts » ont ainsi interrompu le direct d’un journaliste de télévision pour moquer la chute du septuple Ballon d’Or.

Messi est bien là et c’est toujours sur lui que compte l’Argentine pour réparer les dégâts après cette violente sortie de route et maintenir en vie le rêve d’un troisième sacre mondial après ceux de 1978 et 1986.

Mais la défaite de mardi et les performances décevantes de plusieurs cadres comme Angel Di Maria, Cristian Romero ou Leandro Paredes font redouter que le génie soit peut-être moins bien entouré que prévu.

« Que la magie continue ! »

C’est en tout cas l’inquiétude qui saisissait mercredi les journalistes suiveurs de la sélection venus assister l’air tracassé et sous un soleil brûlant à l’entraînement des remplaçants.

Les plus pessimistes des supporters argentins se souviennent de 2002, quand l’équipe de Marcelo Bielsa, qui faisait elle aussi partie des grandes favorites de l’épreuve, avait quitté le Mondial asiatique dès la fin des poules.

Les autres invoquent eux un souvenir plus lointain, celui de 1990, quand l’Argentine avait débuté la Coupe du monde dont elle était tenante du titre par une défaite face au Cameroun, quasiment aussi inattendue que celle de mardi contre les Saoudiens, avant d’atteindre la finale.

Il y avait alors Maradona, il y a aujourd’hui Messi. « Que la magie continue, capitaine ! », avait imploré la fédération argentine après le 91e but de la « Pulga », lors d’un amical face aux Émirats arabes unis juste avant le tournoi.

Il y en a eu un 92e contre l’Arabie saoudite, mais il en faudra certainement d’autres pour que l’Argentine voie plus loin que la phase de groupes.  

Dès samedi, le N.10 est donc attendu face au Mexique de Gerardo « Tata » Martino, qui a été son entraîneur en sélection et au Barça, pour trois saisons sans le moindre trophée.

Cette finale avant l’heure pour l’Albiceleste se tiendra au stade de Lusail, où l’ambiance devrait être formidable, l’Argentine et le Mexique formant deux des plus importants contingents de supporters du Mondial. Mais Messi et les siens avaient surtout prévu de revenir dans cette enceinte le 18 décembre pour la vraie finale, pas d’en faire le cimetière de leurs ambitions.

L’absence de Maradona dans l’entourage de l’Argentine est « étrange », dit Messi

Peu importe les résultats sur le terrain, cette Coupe du monde de soccer sera unique pour l’Argentine.

Ce sera de toute évidence la dernière édition du prestigieux tournoi pour Lionel Messi, et la première depuis le décès de Diego Maradona. Le légendaire joueur argentin est mort il y a deux ans, vendredi.

PHOTO GABRIEL BOUYS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Lionel Messi et Diego Maradona, en 2010

Maradona, que les Argentins considèrent comme étant leur « Dieu » du soccer, fut dans l’entourage de l’équipe argentine pour chaque édition de la Coupe du monde depuis 1982, d’abord en tant que joueur, puis comme entraîneur et ambassadeur.

Maradona est décédé à l’âge de 60 ans le 25 novembre 2020, une date gravée dans la mémoire des Argentins. Il s’est éteint alors qu’il séjournait chez lui à la suite d’une intervention chirurgicale au cerveau, et les autorités argentines continuent d’enquêter sur des allégations de négligence médicale.

Plusieurs hommages ont été rendus à Maradona à l’aube de la Coupe du monde de 2022, tant en Argentine qu’au Qatar.

« Diego est immortel, il est encore parmi nous, a déclaré le président de la FIFA Gianni Infantino vendredi devant une statue grandeur nature de Maradona dévoilée dans le cadre d’un évènement organisé au Qatar par la confédération sud-américaine de soccer (CONMEBOL).

« Ce que cet homme a fait pour que les gens tombent en amour avec ce sport, c’est quelque chose d’unique », a évoqué Infantino.

Ce dernier a ajouté que désormais, une journée rendant hommage à Maradona sera réservée lors de chacune des Coupes du monde.

« Tout le monde connaît la sincérité et le charisme de Diego, a rappelé Infantino. Il fut un grand meneur pour l’Argentine, l’Amérique du Sud et le monde entier. On doit continuer de l’honorer. »

Messi, qui dispute sa cinquième Coupe du monde, avait dit à la FIFA à l’aube du tournoi au Qatar que c’était « étrange, différent » de ne pas pouvoir observer Maradona dans une loge, « ni de voir les gens devenir fous lorsqu’ils l’apercevaient ». Il a ajouté qu’il croit sincèrement que Maradona « sera toujours présent quelque part ».

Maradona a pris part à quatre Coupes du monde entre 1982 et 1994, et fut l’entraîneur-chef de l’Argentine en 2010.

Il a surtout marqué les gens avec son parcours en Coupe du monde. Maradona est notamment reconnu pour avoir été l’instigateur de la « Main de Dieu » contre l’Angleterre en 1986, et pour son expulsion du tournoi en 1994 après avoir échoué à un test antidopage.

Tales Azzoni, Associated Press