Ne vient pas à la Coupe du monde qui veut. Au-delà de la simple étiquette de « favoris » et de « négligés », La Presse a tenté d’analyser ce qui peut couler les grandes équipes, ou propulser les laissés-pour-compte.

Un bémol aux cinq favoris

Brésil

Le Brésil est le très grand favori pour ce tournoi. Fière de son « jogo bonito », la Seleção a en ses rangs la formation la plus complète et profonde de la compétition.

Mais avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités, disait l’Oncle Ben. Les Brésiliens sont peut-être les supporters de ce sport les plus passionnés sur la planète, mais ils peuvent aussi en être les plus embrasés. Les joueurs portent sur leurs épaules la pression de tout ce peuple. Ça peut galvaniser. Ça peut aussi tout faire dérailler. La déroute totale de 7-1 face à l’Allemagne, au Brésil, en demi-finale du tournoi de 2014, en est en partie le résultat.

Il ne devrait pas y avoir de problème en phase de groupe. Mais plus le tournoi va avancer, plus les joueurs vont sentir le souffle chaud de leurs supporters sur leurs cous. Le traumatisme de 2014 est encore bien vivant dans le cœur des partisans – et des joueurs.

Angleterre

PHOTO KIRSTY WIGGLESWORTH, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Harry Kane

Les partisans anglais n’ont probablement pas besoin d’entendre des propos négatifs sur une équipe qui les a déçus depuis 56 ans. Commençons donc par le beau.

L’Angleterre est mûre pour un grand titre. Après les échecs de la génération dorée des années 2000, ces nouveaux Trois Lions ont plus que jamais le talent et les moyens de briser la guigne qui dure depuis plus d’un demi-siècle. Les buts de Harry Kane. Les métronomes Jordan Henderson et Declan Rice au milieu. Une finale de l’Euro 2020 tout juste perdue face à l’Italie.

Mais il y a du moins joli. Les neuf derniers mois ont été un calvaire pour l’Angleterre, qui n’a pas gagné en six matchs entre mars et novembre. Elle s’est d’ailleurs inclinée deux fois contre la Hongrie, dont une dure défaite de 4-0 en juin. Certains piliers de l’équipe sont décevants cette saison ; le défenseur émergent Reece James est blessé. Tandis que son homologue Harry Maguire, le latéral Trent Alexander-Arnold et l’attaquant Raheem Sterling connaissent des ratés en club.

On efface tout ça, et on repart sur de belles bases pour le Mondial. C’est ce que ça va prendre pour que le football revienne enfin à la maison.

France

PHOTO FRANCK FIFE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Karim Benzema et Kylian Mbappé

Trouver un défaut à la France est un exercice qui s’apparente à la tatillonnerie. Mais disons qu’avec les absences de N’Golo Kanté et de Paul Pogba dues à des blessures, le milieu français est pas mal moins nanti. Le jeune attaquant Christopher Nkunku a aussi dû renoncer à son Mondial, mais il y a quand même d’excellents candidats au poste d’artilleur devant lui.

Sinon, les champions en titre sont toujours en vogue. Kylian Mbappé n’a fait que s’améliorer depuis qu’il a défoncé les portes de la scène mondiale en 2018. Karim Benzema est le plus récent détenteur du Ballon d’or. Les Français sont champions de la Ligue des nations. Leur sortie hâtive contre les Suisses en huitièmes de finale de l’Euro 2020 constitue le point négatif d’un parcours généralement sans accroc dans les dernières années.

Le Danemark pourrait toutefois causer des problèmes à la France. La troupe de Christian Eriksen a battu non pas une, mais deux fois celle d’Antoine Griezmann dans les derniers mois. L’affrontement du 26 novembre promet.

Belgique

PHOTO STUART FRANKLIN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Eden Hazard et Kevin De Bruyne (7) seront les fers de lance de la Belgique lors de cette Coupe du monde.

Cette Coupe du monde devrait être le chant du cygne de la génération dorée des Belges. Pourra-t-on finalement leur enlever l’étiquette de la meilleure équipe n’ayant jamais remporté le prestigieux tournoi ?

Il reste que le talisman Kevin De Bruyne est toujours dans la fleur de l’âge à 31 ans, et fait toujours la pluie et le beau temps dans le ciel de Manchester City. Si Romelu Lukaku se remet à temps de sa blessure à une cuisse, il sera assurément la plus grande menace offensive des Diables rouges. Et Eden Hazard a certainement encore un flair créatif, même s’il n’est manifestement plus aussi dominant que pendant ses belles années à Chelsea.

Mais chez les Belges, c’est la lenteur derrière qui suscite l’inquiétude. Le défenseur Toby Aldeweireld a 33 ans. Le capitaine Jan Vertonghen en a 35. Thomas Meunier, 31. Devant les vifs attaquants canadiens, notamment, ça risque d’être compliqué.

La pression de la dernière chance va-t-elle être trop grande pour la Belgique ?

Espagne

PHOTO JOAN MONFORT, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Pedri (à gauche) et Gavi, de la sélection espagnole

L’Espagne est de retour, chers lecteurs. La Roja n’est peut-être pas encore au niveau des autres membres de ce top 5. Mais avec son élan indéniable, elle pourrait rapidement le devenir.

L’Espagne est rapide, créative et dangereuse. Elle est portée au milieu par un duo de (très) jeunes vétérans en Gavi (18 ans) et Pedri, qui aura 20 ans pendant le tournoi. Ce dernier, on le surnomme d’ailleurs Pedri Potter au FC Barcelone, pour vous donner une idée de son talent de magicien balle au pied. Il a mené l’Espagne à la demi-finale de l’Euro 2020 ainsi qu’à la médaille d’argent au tournoi olympique de Tokyo, quelques semaines plus tard.

Là où ça se complique pour les Espagnols, c’est à l’attaque. Alvaro Morata est l’artilleur de service, mais sans grand succès dans les qualifications : il n’a que deux filets à sa fiche. Et les solutions de rechange à ce poste se font rares. La meilleure option pourrait venir des pieds de l’ailier Ferran Torres, qui a enfilé quatre buts en six matchs de qualifications.

L’Espagne est, avec la Suisse, l’équipe la moins productive offensivement ayant terminé première de son groupe. Il va falloir que ça débloque dans ce groupe de la mort qui inclut l’Allemagne, le Costa Rica et le Japon.

Une qualité aux cinq négligés

Qatar

PHOTO DARKO BANDIC, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Almoez Ali

L’attaquant Almoez Ali, né au Soudan, constitue l’astre le plus lumineux de cette équipe. Il avait permis au Qatar de remporter la Coupe d’Asie des nations en 2019 avec ses neuf buts, dont un en finale contre le Japon. Le joueur de 26 ans en a aussi marqué quatre à la Gold Cup de 2021, alors que les Qataris avaient été invités au tournoi de la CONCACAF. Si les hôtes espèrent obtenir un quelconque résultat dans ce groupe A, ça va passer par Ali.

Arabie saoudite

Oui, l’Arabie saoudite est au troisième rang des nations les moins bien classées du tournoi. Oui, son groupe C est particulièrement relevé (Argentine, Mexique et Pologne). Non, elle ne devrait pas causer la surprise dans ce tournoi.

Mais elle pourrait brouiller les cartes en poules. Le sélectionneur français Hervé Renard a fait de cette formation la meilleure de son groupe de qualifications en Asie, devant le Japon. Ses joueurs se connaissent bien ; ils évoluent tous dans le circuit professionnel saoudien, en majorité pour les clubs de Riyad Al-Hilal et Al-Nassr. Avec l’expérimenté Renard, qui a aussi mené le Maroc à l’édition 2018, et une équipe qui se connaît bien, l’Arabie saoudite n’est tout de même pas à prendre à la légère.

Australie

C’est sans doute alarmant que la seule véritable qualité que nous avons trouvée à cette équipe australienne soit venue… des prouesses dansantes du gardien substitut.

PHOTO BERNADETT SZABO, REUTERS

Andrew Redmayne

Les qualifications ont été laborieuses pour les Socceroos. Derrière l’Arabie saoudite et le Japon dans leur groupe, ils ont été contraints de prendre la voie des barrages pour finalement se diriger vers le Qatar. Et c’est l’arrêt loufoque du gardien Andrew Redmayne, lors de la séance ultime de penaltys face au Pérou, qui a permis à l’Australie de participer à une cinquième Coupe du monde consécutive.

Cette formation est constituée majoritairement de trentenaires qui n’évoluent pas dans les plus grands championnats. Sa principale qualité : son gardien Matthew Ryan. Le portier du FC Copenhague pourra peut-être contenir Karim Benzema (France) ou Christian Eriksen (Danemark) à une ou deux reprises. Mais sans véritable menace offensive, on ne donne pas cher de la peau des Australiens.

Ghana

PHOTO SUNDAY ALAMBA, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Thomas Partey (à gauche) lors d’un match de qualification, en mars dernier, contre le Nigeria

Au vu du talent de ce Ghana, il est surprenant de constater qu’il s’agit là de l’équipe la moins bien classée de tout le tournoi. La grande majorité de son alignement évolue dans les premières divisions européennes, dont plusieurs en Premier League.

Thomas Partey, notamment, est à suivre. Le milieu de terrain connaît une bonne saison avec Arsenal en Premier League. Sa position n’est pas la mieux garnie, toutefois. Et si le potentiel de cette équipe remplie de jeunes loups est grand, il risque d’être étouffé par le talent des adversaires redoutables (Portugal, Uruguay, Corée du Sud) de ce groupe H.

Cameroun

PHOTO MOHAMED ABD EL GHANY, ARCHIVES REUTERS

Vincent Aboubakar

À une certaine époque, le Cameroun était synonyme de Roger Milla. L’attaquant avait propulsé les Lions indomptables en quarts de finale contre l’Angleterre, à la Coupe du monde de 1990, en Italie. Aujourd’hui, le porte-étendard est Vincent Aboubakar. Le costaud artilleur évolue aujourd’hui en Arabie saoudite, après six ans au Portugal et en Turquie.

L’historique du Cameroun au Mondial est riche : la nation a participé huit fois à ce grand tournoi, ne se qualifiant pour les éliminatoires qu’une seule fois. L’équipe d’aujourd’hui est rapide et talentueuse. Le Brésil est le grand favori de ce groupe, mais il y a peut-être des résultats à aller chercher contre la Suisse et la Serbie.