(Londres) Un temps accueillis à bras ouverts pour venir investir leur fortune dans la Premier League anglaise, les oligarques russes n’y sont plus les bienvenus depuis la guerre en Ukraine, avec la mise en vente de Chelsea par Roman Abramovitch et Alisher Usmanov mis à l’écart par Everton.

« J’ai toujours pris mes décisions avec les intérêts du club au cœur (et) dans la situation actuelle, j’ai pris la décision de vendre le club », a annoncé Abramovitch dans un communiqué publié par les Blues, peu après 19 h (13 h HNE).

Une annonce qui a confirmé les informations dans la presse depuis quelques jours, alors que la pression s’était considérablement accrue sur le milliardaire de 55 ans. Même s’il ne fait pas encore l’objet de sanctions financières de la part de l’Union européenne ou des autorités britanniques, il paye aujourd’hui sa proximité avec Vladimir Poutine.

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Le propriétaire russe de Chelsea, Roman Abramovich, après la victoire de Chelsea en finale de la Premier League entre Chelsea et Sunderland au Stamford Bridge à Londres, le 21 mai 2017. Il avait acheté l’équipe en 2003.

En achetant le club londonien en 2003 pour 140 millions de livres (237 millions de dollars canadiens), Abramovitch avait fait figure de pionnier parmi les richissimes mécènes étrangers de la Premier League.

Il avait été suivi par son compatriote Alisher Usmanov, entré au capital d’Arsenal en 2007 pour monter jusqu’à 30 %, avant de tout revendre en 2018 avec une énorme plus-value.

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Le président russe Vladimir Poutine et l’homme d’affaires russe Alisher Usmanov, lors d’une visite près de Belgorod, en Russie, le 14 juillet 2017. Usmanov, ex-propriétaire du club de soccer anglais Arsenal, ne figure pas sur la liste des sanctions mises en place en réponse à l’invasion de l’Ukraine en 2022. Ce magnat des métaux a été l’un des premiers investisseurs dans Facebook. Sa fortune est estimée à plus de 14 milliards de dollars américains. Même s’il n’a aucune participation dans un club, Alisher Usmanov a été mis mercredi au ban du soccer anglais, au lendemain de sa mise en retrait de la Fédération internationale d’escrime, qu’il présidait.

Les investisseurs américains, comme la famille Glazer à Manchester United, dès 2005, et Fenway Sport Group à Liverpool (2010), leur ont emboîté le pas, suivis encore un peu plus tard par les Émiratis à Manchester City ou plus récemment les Saoudiens à Newcastle.

Souvent critiquée pour son peu de zèle dans sa procédure de contrôle des nouveaux investisseurs, la Premier League a bâti sa domination européenne sur les centaines de millions de livres arrivées principalement de l’étranger ces 15 dernières années.

Mais la guerre en Ukraine et les sanctions financières prises contre des acteurs majeurs de l’oligarchie russe ont considérablement accru la pression sur le soccer anglais.

Abramovitch avait essayé de sauver ce qui pouvait l’être en confiant samedi la gestion au quotidien du club aux six administrateurs de sa fondation caritative, avant de se résoudre à vendre.

Un fonds caritatif pour l’Ukraine

« Je vous prie de croire que cela a été une décision incroyablement difficile à prendre et cela me peine de quitter le club de cette façon », a-t-il encore expliqué, assurant qu’il ne demanderait pas le remboursement des 1,5 milliard de livres (2,5 milliards de dollars canadiens) de prêts qu’il a consenti au club au fil des ans, mais qu’il ne braderait pas non plus le club.

Il a aussi promis que le « produit net » de la vente serait versé à une fondation caritative au profit de « toutes les victimes de la guerre en Ukraine ».

Mercredi matin, Hansjorg Wyss, l’un des hommes les plus riches de Suisse, avait déclaré au journal Blick qu’on lui avait proposé d’acheter Chelsea.

« Je me laisse encore quatre ou cinq jours de réflexion », avait ajouté Wyss, précisant que trois autres personnes avaient été sondées et que s’il devait se lancer, ce serait « avec un consortium de six à sept investisseurs ».

Déjà des prétendants pour Chelsea

Parmi les autres acquéreurs potentiels figure, selon le quotidien The Times, l’homme le plus riche de Grande-Bretagne, Jim Ratcliffe, patron d’Ineos, qui avait déjà envisagé une offre en 2019 avant de se tourner vers l’OGC Nice, en France, et Todd Boehli, un milliardaire américain, co-propriétaire de l’équipe de baseball des Los Angeles Dodgers, selon le New York Times.

Autre milliardaire russe impliqué en Premier League, même s’il n’a aucune participation dans un club, Alisher Usmanov a été mis mercredi au ban du soccer anglais, au lendemain de sa mise en retrait de la Fédération internationale d’escrime, qu’il présidait.

Everton a annoncé mercredi « suspendre » ses contrats de commandite avec USM, Megafon et Yota, trois des sociétés dans lesquelles le magnat russo-ouzbek a d’importantes participations.

Après avoir vendu ses parts dans Arsenal, il était devenu l’un des principaux bailleurs de fonds d’Everton, racheté en 2016 par l’Iranien Farhad Moshiri, avec qui il était associé au capital des Gunners.

La très grande incertitude sur le conflit en Ukraine rend impossible toute prédiction crédible sur ses retombées à long terme, mais le soccer anglais en subit déjà les ondes de choc.