L’Euro 2020 est (enfin) arrivé. Dès ce vendredi, les meilleures sélections européennes croiseront le fer aux quatre coins de l’Europe et tenteront de se procurer leur billet pour la grande finale du 11 juillet au stade de Wembley, à Londres. Aperçu des joueurs et des sélections à suivre, avec en prime quelques prédictions de visages du soccer du Québec.

Des experts et des prédictions

PHOTO ALEXANDER NEMENOV, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Qui mettra la main sur le précieux trophée ?

La Presse a consulté quelques grands noms du soccer au Québec pour avoir leurs impressions et leurs prédictions sur le tournoi qui s’amorce ce vendredi.

Patrick Leduc (Directeur de l’Académie)

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Patrick Leduc

« L’Euro arrive toujours à la fin d’une saison qui est assez éprouvante pour bien des clubs. On part souvent avec la prémisse que ceux qui ont gagné la Ligue des champions ou dominé leur championnat national partent favoris. On compare un peu des pommes et des oranges, selon moi. Un tournoi, c’est plus une dynamique de l’équipe qui va peaker au bon moment.

« Je pense que les champions du monde, la France, sont favoris. Mais les poids lourds européens sont toujours à considérer, comme l’Allemagne et l’Espagne.

« Il y a des équipes qui sont restées sur leur faim à la dernière Coupe du monde. Je pense à la Belgique et à l’Angleterre. C’est comme si la Belgique avait encore la défaite de 1-0 contre la France sur le cœur. Ça risque d’être l’équipe la plus motivée à prouver quelque chose. »

Patrice Bernier (ancien joueur et analyste à TVA Sports)

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Patrice Bernier

« Oui, la France est favorite, mais dans cet Euro, on peut s’attendre à des surprises. C’est un tournoi qui, pour la première fois, sera disputé dans 11 villes. Je crois que plusieurs équipes qu’on n’attend pas pourraient surprendre.

« Je suis proche de l’équipe du Danemark parce que j’y ai joué dans ma carrière. Une équipe comme ça pourrait faire un beau parcours.

« Mais moi, mon équipe favorite, c’est l’Angleterre. Harry Kane a eu une saison magnifique avec Tottenham. Les Anglais auront l’occasion de jouer pratiquement tous leurs matchs à domicile.

« Et malgré tout, je crois qu’il ne faut pas négliger l’Espagne ou l’Allemagne. Ce sont des habitués de ces tournois-là. Ils sont toujours dangereux. »

Valmie Ouellet (analyste soccer à RDS et à Radio-Canada et directrice technique de l’Association de soccer de Pierrefonds)

PHOTO TIRÉE DU SITE WEB DE L’ASSOCIATION DE SOCCER DE PIERREFONDS

Valmie Ouellet

« On s’intéresse surtout au groupe F. Deux équipes de ce groupe pourraient potentiellement se retrouver en finale, soit la France et le Portugal. L’Allemagne ne va pas si bien dernièrement, mais quand même, ce ne sera pas un groupe facile.

« Sinon, il y a l’Angleterre et la Belgique, elle qui est maintenant première au classement mondial de la FIFA, ce qui n’est pas peu dire. Et l’Angleterre a de très bons éléments, surtout chez ses jeunes joueurs. Elle ne va pas hésiter à les utiliser, d’ailleurs, pour cet Euro.

« En ce moment, au classement FIFA, il y a quand même six équipes européennes qui sont dans le top 7. C’est généralement très le fun, l’Euro, mais cette année, ce sera particulièrement relevé. »

Arcadio Marcuzzi (ancien analyste soccer et responsable des relations médias pour le CF Montréal)

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK D’ARCADIO MARCUZZI

Arcadio Marcuzzi

« Ce sera vraiment un tournoi où la jeunesse va faire la différence, un peu comme on l’a vu à la Coupe du monde en 2018. La France a été un excellent exemple de ça avec Mbappé en tête de liste. Sur papier, cette équipe est la grosse cylindrée de ce tournoi.

« L’Angleterre a une très belle génération, offensivement parlant. C’est un groupe affamé, qui pourrait faire une déclaration générationnelle pour le foot anglais. Défensivement, ils ont leurs lacunes, alors ça sera le défi principal [du sélectionneur Gareth] Southgate.

« Et sinon, il y a la Pologne que j’aime beaucoup, qui a plusieurs joueurs très talentueux moins connus, moins glamour. Elle pourrait brouiller les cartes dans un groupe qui est très prenable avec l’Espagne, la Slovaquie et la Suède. »

Sofiane Benzaza (analyste soccer à la balado KAN Football Club)

PHOTO FOURNIE PAR SOFIANE BENZAZA

Sofiane Benzaza, en compagnie de Georges Laraque

« J’ai un peu des goûts bizarres, mais ce que je trouve fascinant, c’est que c’est le premier Euro avec cinq changements. Je suis curieux de voir comment les sélectionneurs vont s’adapter durant un match. Avec cinq changements, tu peux les faire plus rapidement, gérer les blessures d’une meilleure façon.

« Sinon, l’équipe qui est un peu disparue, c’est les Pays-Bas. C’est une ancienne grosse sélection qui a tout le temps des bons joueurs, même si le sélectionneur Frank de Boer est très controversé.

« Les gens du KAN FC et moi, on aime beaucoup le Danemark. Ce sera une équipe cool à suivre. De bons joueurs qui jouent dans de très bons clubs. Leur groupe n’est pas mauvais. Ce n’est pas une mauvaise sélection à regarder. »

Claudine Douville (journaliste sportive, RDS)

« Ce qui est frappant de cet Euro-là, c’est que tu as des retours d’équipes qui ont beaucoup de choses à se faire pardonner. L’Italie n’a pas été qualifiée à la Coupe du monde de 2018. Les Pays-Bas reviennent après une absence prolongée.

« Je n’ai jamais vraiment cru en cette équipe-là, mais c’est l’année de la dernière chance pour la Belgique. Je vois une demi-finale Belgique-France, et je crois que le vainqueur de cet affrontement sera le champion éventuel de l’Euro.

« Je fonde aussi un espoir sur l’Angleterre, qui est dans un groupe D à sa portée. Elle aussi a beaucoup à prouver. Harry Kane sera un des top du tournoi, et des jeunes comme Rashford, Sterling et Foden seront intéressants.

« Mon carré d’as, c’est Belgique, France, Pays-Bas et Angleterre. »

Phase de groupes de l’UEFA EURO 2020

Groupe A : Turquie, Italie, pays de Galles, Suisse

Groupe B : Danemark, Finlande, Belgique, Russie

Groupe C : Pays-Bas, Ukraine, Autriche, Macédoine du Nord

Groupe D : Angleterre, Croatie, Écosse, République tchèque

Groupe E : Espagne, Suède, Pologne, Slovaquie

Groupe F : Hongrie, Portugal, France, Allemagne

Des vedettes, une étoile montante et un revenant

PHOTO KENZO TRIBOUILLARD, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Romelu Lukaku,
attaquant vedette
 de la Belgique

Romelu Lukaku (Belgique)

Romelu Lukaku vient de connaître la meilleure saison de sa carrière en club et est certainement l’attaquant le plus en forme à l’aube de cet Euro.

Ses 24 buts et 11 passes décisives en Serie A ont permis à l’Inter Milan de remporter son premier titre du championnat italien en 11 ans.

Les succès de l’avant-centre de 28 ans dépendront de sa synchronisation avec le maestro de Manchester City, Kevin De Bruyne, mais on sait d’ores et déjà que Lukaku peut changer l’allure d’un match de son seul pied gauche.

Robert Lewandowski (Pologne)

PHOTO CHRISTOF STACHE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Robert Lewandowski

Devrait-on poser Robert Lewandowski aux côtés de Cristiano Ronaldo et de Lionel Messi sur le podium des meilleurs joueurs du monde ? Le Polonais vient entre autres de battre le record de buts en Bundesliga de Gerd Müller, un plateau vieux de 49 ans. L’attaquant du Bayern Munich en a marqué 42… en 29 matchs.

Mais avec le Bayern, Lewandowski a le luxe d’être servi par la crème de la crème des rôdeurs de gazon. En tout respect, on ne peut pas en dire autant de la Pologne. Lewandowski a eu une campagne décevante à la Coupe du monde de 2018, ne trouvant jamais les cordages pendant que la Pologne devait se contenter du dernier rang de son groupe. Mais au sortir d’une saison magistrale en club, on est en droit de croire que la mèche de l’artilleur polonais continuera de brûler cet été.

Karim Benzema (France)

PHOTO FRANCK FIFE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Karim Benzema

Le parcours de Karim Benzema à cet Euro sera des plus intrigants. Au ban de l’équipe de France depuis 2015 en raison d’une controverse avec son compatriote Mathieu Valbuena, son retour ajoute à une profondeur déjà quasi inégalée pour sa sélection.

C’est que l’entraîneur Didier Deschamps n’avait plus de raison valable de continuer à l’écarter de son alignement. Longtemps dans l’ombre de Cristiano Ronaldo chez le Real Madrid, l’avant-centre a marqué plus de 20 buts chaque saison depuis le départ du Portugais pour la Juventus.

Il reste à savoir quel impact aura son retour dans une équipe de France championne du monde sans lui. Est-ce que la chimie des Bleus en sera décontenancée, ou bien ne sera-t-il simplement qu’une arme de plus pour faire trembler les défenseurs adverses ?

Une blessure subie contre la Bulgarie mardi est toutefois venue jeter un doute sur sa forme physique, à sept jours du choc France-Allemagne.

Phil Foden (Angleterre)

PHOTO NEIL HALL, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Phil Foden

Ce qu’il en a fait baver à ses adversaires cette saison, le jeune Anglais Phil Foden. Sa vitesse, sa créativité et sa fougue ont laissé dans son sillage plus d’un défenseur le visage dans le gazon, le corps étendu sur le sol.

Ce n’est pas pour rien que Pep Guardiola, son entraîneur à Manchester City, l’avait qualifié de « joueur le plus talentueux » qu’il ait jamais vu il y a deux ans, alors que Foden n’avait que 19 ans.

Et voilà qu’il s’est imposé cette année comme une bougie d’allumage au milieu de terrain pour City, champion d’Angleterre et finaliste de la Ligue des champions.

Sa coordination avec Harry Kane à cet Euro sera particulièrement à observer, car elle pourrait devenir une des associations les plus destructrices de ce tournoi.

Lassi Lappalainen (Finlande)

PHOTO JOSEPH MAIORANA, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Lassi Lappalainen

La Finlande ne sera probablement pas l’équipe la plus suivie de l’Euro, mais on a de bonnes raisons d’y porter attention au Québec. L’attaquant Lassi Lappalainen, du CF Montréal, a été appelé par sa sélection, qui disputera son premier grand tournoi international.

Si son flair offensif n’a pas encore porté ses fruits en cette jeune saison de MLS, sa créativité et sa vision seront de bons atouts pour une équipe finlandaise qui en aura bien besoin.

Il sera épaulé par le vétéran de Norwich, Teemu Pukki (26 buts en 2e division anglaise), et pourra compter en défense sur son ancien coéquipier et capitaine avec le CF Montréal, Jukka Raitala.

La Belgique devrait dominer un groupe B aussi composé du Danemark et de la Russie, mais il y a peut-être de la place pour une petite surprise en deuxième ou troisième position.

Cinq sélections à suivre

PHOTO FRANCK FIFE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

David Brooks, milieu de terrain du pays de Galles, tire dans le mur français, lors d’un match amical, à Nice, le 2 juin.

France

Kylian Mbappé. Antoine Griezmann. Olivier Giroud. Paul Pogba. N’Golo Kanté. Et maintenant Karim Benzema. La France est sans contredit la grande favorite de ce tournoi européen. Même l’équipe réserve des Bleus est à rendre jaloux ses adversaires.

Mbappé, la grande vedette de la sélection française victorieuse de la Coupe du monde en 2018, avait 19 ans à l’époque. Le voici maintenant à l’âge beaucoup plus mûr de 22 ans, toujours aussi rapide, aussi habile au drible, aussi assassin devant les filets adverses. À preuve, ses 41 buts toutes compétitions confondues en 2020-2021.

Dans un groupe de la mort avec l’Allemagne, le Portugal et la Hongrie, les talentueux Bleus seront testés rapidement.

Portugal

PHOTO DARKO VOJINOVIC, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Cristiano Ronaldo est poursuivi par Sergej Milinković-Savić, lors d’un match de qualification opposant le Portugal à la Serbie, à Belgrade, le 27 mars.

S’ils n’étaient pas parmi les favoris pour remporter les grands honneurs en 2016, les champions en titre le sont certainement aujourd’hui.

La beauté de cette nouvelle édition de la Seleçao, c’est que Cristiano Ronaldo, toujours en forme à 36 ans, ne devrait plus être son homme à tout faire.

En attaque, João Felix est pressenti comme le successeur de CR7. Diogo Jota a connu une excellente saison avec Liverpool, en Premier League. Pedro Gonçalves a forcé la main du sélectionneur Fernando Santos en marquant 23 buts pour le Sporting de Lisbonne, champion du Portugal pour la première fois en 19 ans.

João Cancelo et Rúben Dias ont formé un bloc défensif à toute épreuve pour Manchester City, champion d’Angleterre. Devant eux, Bruno Fernandes (Manchester United) devrait être le meneur créatif de cette équipe.

Un affrontement à encercler au calendrier : le 23 juin contre la France.

Belgique

PHOTO JOHANNA GERON, ARCHIVES REUTERS

Choc entre le défenseur central belge Dedryck Boyata (en rouge) et l’attaquant grec Vangelis Pavlidis, lors d’un match amical, à Bruxelles, le 3 juin

La « génération en or » des Diables rouges pourra-t-elle confirmer son statut de numéro un au monde, selon le classement de la FIFA ? Après une élimination en quarts devant le pays de Galles en 2016, puis une défaite de 1-0 difficile à avaler face à la France en demi-finale du Mondial russe en 2018, la bande de Kevin De Bruyne, Romelu Lukaku et Eden Hazard a des choses à prouver.

Hazard a connu des saisons très difficiles depuis son transfert de Chelsea au Real Madrid. La Belgique devra compter sur une certaine renaissance de son capitaine pour espérer un parcours intéressant.

Si le talent offensif belge est indéniable, c’est derrière que ça se complique. Jan Vertonghen (34 ans), Thomas Vermaelen (35 ans) et Toby Alderweireld (32) ne sont plus de petites jeunesses et auront de la difficulté à contenir celles de leurs adversaires. Ce qui ne devrait pas empêcher la Belgique de remporter un groupe composé de la Finlande, du Danemark et de la Russie.

Turquie

PHOTO GOKHAN KILINCER, REUTERS

La sélection turque ne sera pas à sous-estimer.

La Turquie a causé la surprise générale en battant nulle autre que la France en qualifications pour cet Euro. Grâce entre autres au brio de son pilier défensif Çağlar Söyüncü, cette équipe a fait de ses performances défensives étanches (huit jeux blancs, seulement trois buts accordés) sa marque de commerce.

Le sélectionneur Şenol Güneş a bâti ici la meilleure sélection turque depuis celle qu’il avait menée à la troisième place de la Coupe du monde de 2002. Il pourra entre autres compter sur le fin marqueur Burak Yılmaz, une des pièces maîtresses de Lille, champion surprise de la Ligue 1.

Il serait surprenant que la Turquie se sauve avec le trophée, mais elle pourrait faire tomber un ou deux géants au passage. Et elle en aura la chance dès le premier match de l’Euro, un intéressant Turquie-Italie, ce vendredi à 15 h.

Angleterre

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Match amical entre l’Angleterre (en bleu) et la Roumanie, à Middlesbrough, le 6 juin

Autre compétition internationale, autre déception pour l’Angleterre ? Pas si vite.

Les attentes sont toujours au plus haut pour les Anglais, et cette année ne fait pas exception.

Mais avec un Harry Kane au meilleur de sa forme en pointe, accompagné par Raheem Sterling et Marcus Rashford sur les ailes, les Three Lions comptent sur des joueurs bien établis pour trouver le fond du filet.

Au milieu, le sélectionneur Gareth Southgate a l’embarras du choix. Phil Foden devrait être la grande révélation de ce tournoi. Les jeunes Mason Mount, Jadon Sancho et Bukayo Saka pourraient aussi capter l’attention. Épaulées par le vétéran Jordan Henderson, les pépites anglaises devraient faire tourner les têtes.

Et peut-être soulever un trophée à Wembley.