Dans une longue lettre adressée à ses anciens partisans, le 13 février, Harry Shipp a avoué avoir pleuré à l'annonce de la transaction entre le Fire de Chicago et l'Impact. Le milieu de terrain quittait en quelque sorte le nid dans lequel il a grandi et vécu ses premières expériences humaines et professionnelles.

«Il était particulièrement ému quand c'est arrivé et ce le sera encore quand il entrera sur le terrain avec un chandail de l'Impact sur le dos, a prédit Mauro Biello plus tôt dans la semaine. Il jouera face à l'équipe qu'il a encouragée dans sa jeunesse et au sein de laquelle il a joué. Il a bien fait à Montréal, il a connu une bonne intégration et il a montré sa qualité. Pas de doute que ce sera un match important pour lui, mais on sera là pour l'aider.»

Une surprise

Malgré un changement de garde à Chicago, personne n'imaginait que Shipp, troisième joueur de l'Académie du Fire à rejoindre les rangs professionnels, change d'adresse. La surprise a été totale autant pour le principal intéressé que pour les partisans, qui ont vite propagé leur mécontentement sur les réseaux sociaux. Après tout, ce n'est pas comme si le Fire était un modèle de gestion depuis plusieurs années...

«Avec un nouveau directeur général et un nouveau personnel d'entraîneurs, ça fait seulement partie du métier. Aucun emploi n'est à l'abri. Ils ont fait leur évaluation et ont voulu prendre une autre direction. Honnêtement, ç'a été difficile pour moi au début, mais je respecte la décision et cette partie du métier», a lancé Shipp.

Un match spécial

Malgré le contexte particulier et les retrouvailles avec le Fire, Shipp n'a guère envie que ce match tourne autour de sa personne. Il verra bien quelques visages et retrouvera quelques lieux très familiers, mais il ne veut pas faire de l'ombre au collectif.

«Ce sera plaisant d'avoir des amis et de la famille dans les tribunes, mais je ne veux pas que toute l'attention soit dirigée sur moi. Nous avons connu un départ honorable et ce sera un autre match important sur la route. Je serais surtout heureux si on sortait de là avec les trois points.»

Il ne faudra pas s'étonner de voir une touche de bleu au Toyota Park puisque plusieurs de ses amis se sont déjà procuré des produits dérivés de l'Impact.

Une longue histoire

Shipp est devenu professionnel avant la saison 2014, soit cinq saisons après son entrée dans l'Académie du Fire. Mais ses souvenirs, ceux de partisan, remontent à bien plus loin.

«J'allais aux matchs qui se déroulaient au Soldier Field [de 1998 à 2001, puis de 2003 à 2005], s'est-il rappelé. J'avais un bon stock de photos prises avec les joueurs avant ou après les matchs. Je devais avoir 8 ou 9 ans à l'époque.»

Ses joueurs préférés du Fire? Hristo Stoitchkov, C.J. Brown et Peter Nowak. Mais c'est un autre ex-pensionnaire du Fire bien connu des Montréalais qui a eu une certaine influence.

«Quand Frank [Klopas] a pris sa retraite du Fire, il a été l'un de mes premiers entraîneurs dans mon club [le Wind]. Je le connais depuis longtemps et, au moment de mon échange, il m'a appelé et n'avait que de bonnes choses à dire à propos de l'Impact.»

Une équipe différente

Le Fire n'est plus exactement la même équipe que celle de l'an dernier. Seulement 5 des 11 joueurs du Fire qui jouaient lors du terne match nul de 0-0 contre New York City FC dimanche étaient avec le club la saison dernière. Le Serbe Veljko Paunović est également devenu le neuvième entraîneur de l'histoire de l'organisation au cours de l'hiver.

«C'est certain qu'il y a eu beaucoup de changements, a convenu Shipp. Je n'ai eu que quelques semaines pour m'entraîner avec les joueurs que nous allons affronter, mais j'ai vu que c'était une équipe qui travaillait fort. Peu importe le style ou le système de jeu, c'est un groupe, surtout en milieu de terrain, qui travaille beaucoup et qui rend les choses difficiles. Ils ont quand même obtenu trois blanchissages d'affilée.»



Attaché à Chicago

Shipp a disputé 66 matchs à Chicago, inscrivant 10 buts et réussissant 14 passes décisives au passage. Il n'a connu que le Fire comme club et il ne s'est guère éloigné de la grande ville - qu'il adore - en choisissant d'étudier à l'Université Notre-Dame, dans le nord de l'Indiana. Mais ce saut dans l'inconnu, à Montréal, ne l'a pas perturbé. 

«L'Impact a fait en sorte que le changement se fasse autant en douceur que possible. D'un point de vue personnel, il y a toujours des choses plus difficiles, comme le fait de s'habituer à une nouvelle ville, etc. Mes affaires sont finalement arrivées [mardi], donc, je ne suis plus à même le sol dans mon appartement. Des choses comme ça et le temps estival plus clément me permettront de m'ajuster plus facilement», explique le résidant du quartier de Lincoln Park, à Chicago.

Discret, mais impliqué

Dans le vestiaire, Shipp est plutôt à ranger dans le clan des joueurs discrets que l'on imagine bien mal hausser le ton. «C'est quelqu'un qui reste un peu en retrait et qui ne parle pas beaucoup, a révélé Laurent Ciman. Mais il est là quand on a besoin de lui et il nous aide beaucoup dans le registre qui est le sien. J'espère qu'il montrera que [Chicago] a eu tort de l'échanger.»

Sur le terrain justement, les premières semaines avec Nacho Piatti ont été bonnes, même s'il a marqué le pas dans les deux derniers matchs. «Je m'entends très bien avec lui parce qu'il me donne le ballon dans les pieds», a expliqué l'Argentin.

«Je fais tout ce que je peux pour aider l'équipe même si ça signifie d'enchaîner les montées et les replis, d'être plus défensif ou de créer des occasions, a ajouté Shipp. La situation change d'un match à l'autre en fonction de notre adversaire et je suis prêt à jouer n'importe quel rôle.» Même si cela inclut de hanter ses anciens partisans, demain...

photo Dennis Wierzbicki, archives USA TODAY Sports

Harry Shipp a disputé 66 matchs à Chicago, inscrivant 10 buts et réussissant 14 passes décisives.