Marcelo Bielsa, c'est une qualification avec le Chili au Mondial-2010 et un rendez-vous contre le Brésil lundi en 8e de finale; c'est aussi un «Fou», ainsi surnommé, de manière plus ou moins ironique, en raison de méthodes mêlant la science et l'affectif.

«A cause d'exagérations de mon comportement», répond-il quand on l'interroge sur l'origine de ce sobriquet. «Des acceptions du dictionnaire, j'ai choisi la plus douce», ajoute-t-il en riant. Lui qui n'est pourtant pas du genre à plaisanter.Justement: fou, parce qu'il est souvent là où on ne l'attend pas. Artisan de la plus belle campagne du Chili en qualifications à une Coupe du monde (2e derrière le Brésil), l'Argentin de 54 ans note: «Personne n'active les potentialités qu'un être humain n'a pas».

A-t-il changé depuis 2002, lorsqu'il dirigeait l'Argentine au Mondial asiatique ? «Je ne crois pas qu'il y ait de différence, simplement je me sens plus vieux, ma santé et mon caractère empirent, je suis pire».

L'homme déroute. Et a connu la déroute, en 2002 justement: l'Argentine est éliminée dès le premier tour. On le hait. Lui philosophe, et livre sa science dans des séminaires de management.

«Je suis un spécialiste des défaites et je sais parfaitement que l'adhésion disparaît quand le succès s'arrête, médite-t-il. C'est pourquoi il ne faudrait pas transmettre ce qui est du succès circonstanciel, mais des valeurs».

Fou de foot

L'affectivité fait partie de ces valeurs: «Je ne veux pas que tu m'aimes parce que j'ai gagné, j'ai besoin que tu m'aimes pour gagner». Ou encore: «Il faut aimer sincèrement celui qui dirige, et si on ne l'aime pas naturellement, il faut apprendre à l'aimer».

Son travail à la tête du Chili a d'ailleurs suscité un retour de flamme, presque amoureuse. L'ex-présidente du Chili, Michelle Bachelet, se pâme: «Il a cette combinaison fatale pour les femmes, entre beau et mystérieux. Quand je l'ai connu, je me suis rendue compte que c'était quelqu'un de très intelligent, très cultivé et austère».

Retour en grâce en Argentine également, où son frère Rafael fut ministre. La présidente de la République, Cristina Kirchner, a ainsi récemment taquiné les Chiliens: «Nous ne vous le prêtons qu'un certain temps, ne croyez pas qu'on vous l'offre !"

Bielsa travaille comme un fou. Selon la presse sud-américaine, il aurait affirmé avoir regardé dans sa vie 25.000 matches ! Et dégagé 28 plans tactiques, et 34 manières de se faire une passe.

Fou furieux, parfois, comme lorsqu'il lance à son homologue de l'Italie au Festival de Toulon: «Ce n'est pas du football ! Que des ballons vers le N.9: ce n'est pas du football !»

Bielsa, juste un fou de football.