Les amateurs d'humour involontaire en sont presque réduits à espérer que les Anglais se plantent aujourd'hui. Les Français partis, qu'est-ce qu'il nous reste comme source de rigolade dans cette Coupe du monde?

Le chaotique parcours de l'équipe de France en Coupe du monde a pris fin avec la défaite de 2-1 devant l'Afrique du Sud, hier. Contre des Bleus forcés de se défendre à 10 pendant plus d'une heure, les Bafana Bafana ont semblé transportés par l'énergie de la foule extrêmement bruyante et enthousiaste du Free State Stadium de Bloemfontein.

Avec un peu de chance et une meilleure finition, les hôtes, qui ont tiré 21 fois vers le filet du gardien français Hugo Lloris, auraient pu s'approcher d'une qualification miraculeuse pour la ronde des 16, aux dépens du Mexique, défait 1-0 par l'Uruguay à Rustenburg. Mais au final, il leur aurait fallu trois buts de plus, une commande trop ambitieuse, même contre une équipe aussi hypothéquée moralement que celle du sélectionneur Raymond Domenech.

Expulsion de Nicolas Anelka, altercation entre le capitaine Patrice Evra et le préparateur physique de l'équipe, démission du chef de la délégation, grève des joueurs, intervention d'urgence de la ministre des Sports - on pensait avoir tout vu de la part du camp français, dont l'implosion sous le regard des caméras a peu d'égal dans l'histoire récente du sport.

C'était compter sans l'ineffable Raymond Domenech. Sur le terrain après le match, l'inspecteur Clouseau du coaching a refusé de serrer la main de l'entraîneur des Bafana, Carlos Alberto Parreira, qui s'était avancé vers lui pour le saluer. Un geste, ou plutôt une absence de geste, pour le moins insultante, même dans le contexte d'une défaite douloureuse qui scellait la fin du règne de près de six ans du controversé entraîneur français.

Appelé à s'expliquer en conférence de presse, Domenech a ignoré la question par trois fois. Quelques minutes plus tard, Parreira a été un peu plus loquace. «Un assistant (de Domenech) m'a dit que j'avais dit du mal de l'équipe de France quand elle s'était qualifiée pour la Coupe du monde (à la suite d'un but contre l'Irlande qui aurait dû être refusé, Thierry Henry ayant touché le ballon avec la main). Je n'ai aucun souvenir de ça», a dit le Brésilien, visiblement médusé.

Cette violation de l'étiquette serait sans doute passée inaperçue, même si elle en dit long sur le côté rancunier de Domenech. Mais après tous les impairs commis par les Français depuis leur arrivée en terre sud-africaine, c'était la cerise sur le gâteau, une marque de petitesse d'esprit qui allait forcément être relevée. Surtout que Domenech a poussé le ridicule et l'outrecuidance jusqu'à nous rebattre les oreilles de l'importance «d'assumer» et d'être «digne dans la victoire et dans le défaite aussi».

Pour la dignité, on repassera, mon Raymond.

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La France peut se consoler: elle a marqué un but de plus qu'à la Coupe du monde de 2002, où elle avait été carrément blanchie. Mais à trop brûler d'énergie dans les guerres intestines qui l'ont exposée au ridicule planétaire, l'équipe de France s'est retrouvée à plat face à des Bafanas chauffés à blanc et désireux de laisser à leurs partisans une image positive avant de tirer leur révérence.

Vrai, l'arbitre colombien Oscar Ruiz a sans doute été trop sévère en donnant un carton rouge à Yoann Gourcuff après qu'il eut frappé MacBeth Sibaya au visage avec le coude, en tentant de reprendre un ballon de la tête. Mais il ne faudrait quand même pas oublier que les Sud-Africains avaient déjà l'avantage, grâce au but de la tête de Bongani Khumalo, quand le ciel est tombé sur la tête des Bleus, à la 25e minute.

Des Bleus méconnaissables, en passant: seulement cinq des partants contre le Mexique avaient gardé leur place: le gardien Lloris, les arrières Bakari Sagna et William Gallas et les milieux Abou Diaby et Franck Ribéry - probablement le seul dont on puisse dire qu'il a vraiment tout donné. Alou Diarra a hérité du brassard du capitaine, le titulaire habituel, Patrice Evra, au coeur de la fronde du week-end, ayant été tenu à l'écart.

Après le match, Evra a promis qu'il s'expliquerait au cours des prochains jours. «Je viens demander pardon. Je voulais demander pardon hier (lors de la conférence de presse de Domenech, où son absence a été critiquée), mais on m'a interdit de le faire, a-t-il dit. Les Français ont besoin de savoir la vérité, parce que l'équipe de France appartient aux Français et à personne d'autre.»

Pour les Bleus et leurs partisans, l'agonie de l'Équipe de France a été pénible. L'autopsie promet de n'être pas moins douloureuse.