Pour la Corée du Nord, les Jeux olympiques constituent une occasion en or de se hisser sur la scène internationale et prétendre aux applaudissements plutôt qu'à l'opprobre.

Au plan diplomatique, ce pays hermétique est un quasi-paria à cause de son programme d'armement nucléaire. Mais ces dernières années, le leader suprême et partisan en chef Kim Jong-un a fait du sport international une priorité stratégique.

À Rio, les Nord-Coréens seront présents entre autres en judo, lutte et tennis de table. Mais c'est l'haltérophilie qui leur offre les meilleures chances de médaille.

Alors que les rivaux sud-coréens ne laissent pas leur part aux chiens dans l'arène sportive internationale, les résultats nord-coréens restent largement en deçà des aspirations de Pyongyang.

La réussite la plus notable remonte à 1966, pendant la coupe du monde de football (soccer), quand la Corée du Nord avait arraché une victoire 1 à 0 contre l'Italie pour se hisser en quart de finale.

Depuis Munich en 1972, Pyongyang a participé à neuf JO d'été, mais a remporté seulement 14 médailles d'or. Son meilleur score fut atteint en 2012 à Londres, avec trois médailles d'or en haltérophilie et une en judo.

Depuis qu'il est arrivé au pouvoir fin 2011 à la mort de son père Kim Jong-il, Kim Jong-un fait la promotion du sport avec une ferveur parfois martiale.

Dans une lettre ouverte, il enjoignait l'année dernière les athlètes nord-coréens à adopter les tactiques de « guérilla » afin de renforcer l'impact sportif de Pyongyang.

Une école pour réussir

Le Nord « est à la traîne du monde », avait-il regretté. Mais, promettait-il, tout sera fait pour que le pays devienne « d'ici quelques années » une puissance sportive avec laquelle compter.

Pour Andray Abrahamian, spécialiste de la Corée du Nord à l'Université Macquarie en Australie, elle est bien placée pour former des athlètes de haut niveau en raison de l'extrême structuration d'une société qui met l'accent sur les activités organisées.

« Le système est très bon pour repérer les talents, qui peuvent ensuite être développés en école ou club spécialisés. La crème de la crème dispose alors d'excellentes ressources ».

Le succès sportif est considéré comme un précieux outil de propagande. Les investissements, très sélectifs, se concentrent sur les sports qui se retrouvent sous les feux de la rampe à l'international, comme le football.

L'École internationale de football de Pyongyang a ouvert ses portes en 2013. Moderne et bien équipée, elle accueille 200 garçons et filles de 8 à 15 ans triés sur le volet à travers le pays tout entier.

Les meilleurs sont envoyés à l'étranger, y compris en Italie et en Espagne. Six joueurs de l'équipe nord-coréenne qui avait remporté en 2014 le championnat d'Asie des moins de 16 ans contre la Corée du Sud avaient été formés en Europe.

Le succès international est synonyme de récompenses individuelles. Les plus performants obtiennent le titre d'« Athlète du peuple » ainsi que des cadeaux, sous la forme de voitures ou d'appartements de luxe à Pyongyang.

Le Nord attend de ses sportifs concourant à l'étranger qu'ils rendent à César son dû : attribuer leur succès aux largesses de l'État.

« Sacrifices »

« Remporter une médaille est un honneur personnel, mais nos athlètes considèrent cela comme une façon de rendre au parti et au cher leader Kim Jong-un leur amour, dit ainsi Son Yong-min, directeur du rutilant Centre sportif Tongil de Pyongyang, ouvert personnellement par Kim Jong-un en 2012. C'est pour ça qu'ils font des sacrifices ».

Le Nord ambitionne également d'accueillir de grands événements internationaux, ce qu'il n'a plus fait depuis les championnats du monde de tennis de table en 1979.

En juin, Pyongyang a obtenu les championnats du monde juniors d'haltérophilie 2018. Elle aimerait aussi les championnats du monde juniors de judo de 2017.

En attendant, à Rio, les organisateurs auront sans doute à coeur de ne pas se mélanger les pinceaux entre les deux Corées.

Aux JO de Londres, une gaffe malheureuse avait provoqué la sortie de terrain de l'équipe féminine de football : les images des joueuses venaient d'être retransmises sur écran géant accompagnées du drapeau sud-coréen.

Les organisateurs s'étaient confondus en excuses. Les Nord-Coréennes étaient revenues seulement après que le visage de chacune fut diffusé au côté de la bannière nord-coréenne.

« Il a fallu également expliquer que ce n'était pas la coutume en Grande-Bretagne de punir ce type d'erreur par des peines de privation de la liberté », se rappelle Sebastian Coe, président du Comité organisateur des JO de Londres.