Pour éviter d’être massacrée au hockey, la Chine a recruté une douzaine de joueurs étrangers. Un bon sujet. D’autant qu’un de ces joueurs, Jieke Kailaosi, alias Jack Chelios, est le fils de l’ancien défenseur étoile du Canadien Chris Chelios.

Je me présente donc à l’aréna secondaire, pour l’entraînement des Chinois. Les exercices sont… étonnants.

Dix joueurs se tiennent côte à côte, entre les deux cercles de mise en jeu. À tour de rôle, ils tirent vers le gardien. Une fois. Deux fois. Trois fois… Pendant 25 minutes. Puis ils quittent la patinoire. Je me dépêche à courir à l’étage inférieur pour attraper Chelios dans la zone mixte. J’arrive 30 secondes trop tard. Je demande à l’attaché de presse chinois s’il peut aller lui demander de revenir.

« Oh, no. He needs to focus. Game plan. Focus. Game plan. Very important.

— Euh. OK. Mais vous ne jouez pas avant la semaine prochaine.

— Focus. Game plan. Very important. »

Ça va, ça va, j’ai compris. Sur ces entrefaites, Alexei Kovalev se pointe en zone mixte. L’ancien joueur étoile du Canadien est maintenant entraîneur adjoint pour la Chine. Bon potentiel d’entrevue. De plus, il a le verbe facile. Je relance l’agent chinois.

« Je vais prendre Alexei Kovalev, d’abord.

— Oh, no. Focus. Game plan. Very important.

— Ce n’est même pas un joueur, c’est un coach !!!!

— Not today. Sorry. »

Émerge alors du corridor, dans le sens inverse du flot de la zone mixte, un homme aux traits occidentaux avec un gros manteau de la Chine. Il est russe. J’apprendrai plus tard qu’il est le directeur général du Red Star Kunlun, le club chinois de la KHL.

« Prends des notes.

— Je n’ai que mon téléphone avec moi.

— Donne-le-moi. »

Il prend mon téléphone et m’écrit son courriel.

« Envoie-moi tes questions précises. Je vais les soumettre à leur gouvernement… »

Contre toute attente, le lendemain, j’ai reçu une réponse. Elle tenait en un mot : OK. OK, mais où, quand, comment ? Rendez-vous après l’entraînement d’aujourd’hui, m’écrit-il. C’était dans moins de deux heures. Et j’étais à l’autre bout de la ville, dans l’autre aréna, pour couvrir la partie entre les Canadiennes et les Russes. À contrecœur, j’ai donc dû renoncer à l’entrevue avec Chelios.

Il fallait que je me concentre sur le match en cours.

Focus. Game plan. Very important.