(Zurich, Suisse) Les Lions ont congé en ce mercredi, mais Marc Crawford accepte gracieusement de prendre une heure de sa journée pour rencontrer La Presse dans un café du centre de la métropole économique de la Suisse. Morceaux choisis.

La Presse : Comment avez-vous abouti en Suisse, à la base ?

Marc Crawford : C’était après que j’ai fini deuxième pour le poste à Montréal en 2012. J’ai fait quatre entrevues avec le Canadien, c’était entre Mike [Therrien] et moi. Puis j’ai tenté ma chance avec Washington, mais George McPhee m’a dit : on est trop avancés avec l’autre candidat. C’était Adam Oates. Donc, je venais de perdre des jobs deux semaines de suite. Et je sentais vraiment que j’avais perdu des jobs. Donc, Zurich appelle, m’invite à venir. J’ai proposé un plan. Et le timing était bon, notre fille venait de rentrer à l’université à Vancouver et notre fils venait de trouver un emploi au NHL Network. Donc, les enfants étaient partis. Et ç’a bien été.

LP : J’imagine que le fait de gagner le championnat à votre deuxième saison ici a mis un baume.

MC : Absolument. Mais je continuais à faire des entrevues dans la LNH. Je suis passé très proche avec la Floride en 2014. On s’est rendus à parler de contrat, signe que c’était sérieux. Mais là non plus, ça n’a pas fonctionné, ils ont pris Gerard [Gallant]. Je pensais à rentrer, puis au Championnat du monde des moins de 18 ans, Pat Brisson est venu me voir. « Prends donc Auston [Matthews] dans ton club, ça va t’aider à revenir. » Donc je l’ai écouté, je suis resté une année de plus, en 2015-2016, puis Guy [Boucher] est venu me chercher avec les Sénateurs.

LP : Vous avez ensuite assuré l’intérim après le congédiement de Guy Boucher et étiez candidat pour le remplacer à l’été 2019. Étiez-vous découragé de ne pas avoir été retenu ?

MC : J’ai coaché les 20 derniers matchs de la saison après son congédiement, et je crois avoir fait du bon travail. C’était décevant de ne pas l’avoir, mais j’ai assez de vécu pour savoir que parfois, c’est indépendant de notre volonté. Je sais que plusieurs choses négatives ont été associées à moi, qui m’ont probablement coûté des postes. De nos jours, exigeant comme je le suis, je suis probablement vu comme étant trop de la vieille école. Certains entraîneurs ont des styles semblables au mien et ont du succès. Et d’autres n’ont pas eu leur chance. Mais je suis vraiment content d’où j’en suis. Je sais que je ne suis plus jeune, mais j’aime vraiment ce que je fais.

LP : Est-ce votre dernier mandat ?

MC : Je ne le sais pas, je vais continuer tant que je le peux. J’ai besoin de ce travail parce que je veux faire ça, je suis compétitif, ça m’aide à être qui je suis. Mais je suis juste vraiment à mon aise dans ma vie, assis ici dans un café de Zurich !

PHOTO BEREND STETTLER / ZSC LIONS

Marc Crawford

LP : Justement, on est assis ici depuis une heure et personne ne nous a interrompus. Êtes-vous une vedette en ville ?

MC : Je ne suis pas aussi anonyme qu’avant. L’équipe est quand même suivie de près. Mais ici, je suis le coach des Lions. Je ne suis pas un ancien de la LNH. Et dans ce quartier-ci, c’est plein d’étudiants et de touristes, donc je suis moins connu !

LP : Comment évaluez-vous le calibre de la ligue suisse ?

MC : La ligue est très bonne en ce moment, car on a plusieurs bons Suisses. Et il y a deux ans, on est passés d’une limite de quatre étrangers à six. Donc, ça ajoute 30 bons joueurs. Et ça a coïncidé avec la KHL qui devient moins attrayante, ce qui attire de bons Suédois et Finlandais.

LP : Votre carrière aurait pu prendre une tout autre tournure si vous aviez obtenu le poste avec le Canadien. Auriez-vous été heureux dans ce marché ?

MC : Mon Dieu, oui ! Mais je ne sais pas s’ils m’auraient gardé longtemps, ça, c’est une autre question ! Petit, je n’aimais pas le Canadien, j’aimais les Maple Leafs. Mais mon père a joué à Chicoutimi, il a rencontré ma mère là. Et mon frère [Eric] travaille là comme dépisteur depuis 10 ans. Il a survécu au changement de régime. Il est un excellent évaluateur de talent.

LP : Et comment se porte votre français ?

MC : C’est correct [l’entrevue est en anglais, mais il nous accueille en français]. Avec les Nordiques, j’avais une tutrice, Lucie, qui assurait un suivi serré de mon français. Le lock-out de 1994 a vraiment été providentiel pour moi. Avant, je suivais un cours par semaine. Pendant le lock-out, c’était tous les jours. J’étais vraiment nerveux à ma première conférence de presse, mais à la deuxième, ça s’est mis à super bien aller ! Et le français m’a permis de parler avec mes grands-parents, mes oncles et mes tantes du côté maternel.