(Buffalo) Tanner Pearson termine ses entrevues et se dirige vers le buffet d’ailes de poulet réservé aux joueurs du Canadien. « Toi et Sean Monahan, vous devez avoir de bonnes histoires de Darryl Sutter à vous raconter ? », lui demande-t-on.

Consultez le sommaire du match (Re)lisez notre couverture en direct

Il commence à prendre une bouchée, mais son regard et son sourire amusés en disent long. « On en a plusieurs, oui ! », finit-il par lancer.

Pearson et Brendan Gallagher étaient deux des joueurs assaillis par les caméras après la victoire de 3-1 du Tricolore au KeyBank Center, lundi. Ils ont tous les deux touché la cible dans ce gain, Gallagher avec le but gagnant, Pearson avec le filet d’assurance.

PHOTO TIMOTHY T. LUDWIG, USA TODAY SPORTS, FOURNIE PAR REUTERS

Brendan Gallagher (11) et Tanner Pearson (70)

Les deux s’adonnent aussi à être les ailiers de Monahan jusqu’ici. Les deux ont été ennuyés par des blessures l’an passé, les deux manquent cruellement de vitesse dans une LNH où tous les jeunes sont aussi rapides qu’Otis Nixon. Et disons-le crûment : les deux suscitaient beaucoup plus de cynisme que d’enthousiasme en vue de la saison chez les partisans. Or, Gallagher compte deux buts en cinq matchs ; Pearson, cinq points en cinq rencontres.

Et Darryl Sutter, là-dedans ? C’est Pearson lui-même qui a rappelé qu’il était en quelque sorte le lien entre lui et Monahan.

« Mony était tout un joueur, il nous donnait beaucoup de misère quand il était à Calgary, rappelle Pearson, un ancien des Kings et des Canucks, qui a donc souvent affronté Monahan. J’ai joué pour Darryl, c’est lui qui m’a formé en début de carrière, et Mony l’a aussi eu. Je ne sais pas s’il y a un lien, mais Monahan est un joueur très simple, qui parle beaucoup sur la glace. C’est facile de jouer avec lui. »

« Il est fort sur la rondelle, bon aux mises au jeu… Dans le temps, lui et Johnny Gaudreau étaient pas mal bons ensemble. »

Monahan n’a plus de Gaudreau à ses côtés ni de Sutter derrière lui, mais après avoir lui aussi fait une croix sur une bonne partie de la dernière saison en raison de blessures, le voici de retour en pleine forme. Il partage le 1er rang de l’équipe pour les points (5), il mène le CH pour le différentiel (+ 5) et il est 1er dans la LNH pour l’efficacité aux mises en jeu (65,4 %). En plus de ces statistiques mesurables, le vétéran de 29 ans empêche constamment l’adversaire de reprendre des rondelles libres grâce à des interventions toujours au point de son bâton. C’est ce qu’il a fait deux fois plutôt qu’une sur le premier but du match, celui de Justin Barron.

PHOTO TIMOTHY T. LUDWIG, USA TODAY SPORTS, FOURNIE PAR REUTERS

Justin Barron (52) célèbre son but avec Brendan Gallagher et Sean Monahan.

« C’est incroyablement facile de jouer avec lui, de dire Gallagher. Il est dominant aux mises en jeu la majorité des soirs. Il est intelligent, compétitif et il veut gagner. J’aime vraiment jouer avec lui. »

Les « vieux » n’ont pas dit leur dernier mot

Les Sabres (26 ans) et le Canadien (26,3 ans) constituent deux des plus jeunes équipes de la LNH. C’était d’ailleurs un des thèmes dans les points de presse du matin.

Ironiquement, trois des quatre buts ont été marqués par des trentenaires (Pearson, Gallagher et Jeff Skinner). Le doyen du Canadien, Jake Allen, a lui aussi fait partie des héros de ce triomphe.

Lors de la présentation des joueurs au premier match au Centre Bell, Cole Caufield et Arber Xhekaj avaient reçu les plus chaudes ovations. Nick Suzuki, Juraj Slafkovsky, Kirby Dach et Kaiden Guhle sont constamment sous la loupe en raison du rôle qu’ils seront appelés à jouer dans le Canadien de demain.

Mais le rôle des vétérans, dans tout ça, « c’est d’être des leaders, a rappelé Martin St-Louis. La meilleure manière d’être un leader, c’est montrer l’exemple. On a un bon groupe de vétérans qui aident à tirer les jeunes. C’est important d’avoir ça ».

Ils envoient le message que c’est bien d’être ici, mais qu’il faut commencer à gagner et que pour y arriver, il faut tout faire. Ils montrent aux jeunes ce que ça prend pour gagner des matchs serrés.

Jake Evans

Le vice-doyen du club, David Savard, a quant à lui bloqué deux tirs pendant une même présence en troisième période, présence qu’il a terminée sur une lame, faisant de lui une sensation sur les réseaux sociaux. Et au banc des siens.

« Le gars a des couilles pour bloquer ces tirs-là, ils étaient puissants, a noté un des jeunes, Xhekaj. On en avait besoin et il l’a fait. Ça nous a donné de l’énergie pour les présences suivantes. »

Le problème, c’est que son sens du sacrifice a laissé des traces. Savard n’est pas retourné sur la glace après cette présence, ratant les huit dernières minutes. Il n’était pas disponible pour parler aux médias après la joute, justement parce qu’il recevait des traitements. Il a semblé touché à un bras par un des tirs qu’il a bloqués.

L’incertitude de Savard est toutefois un rappel du danger qui guette cette équipe. Gallagher, Pearson, Monahan et Allen traînent tous de lourds antécédents médicaux ces dernières années. Gallagher et Monahan ont même aggravé leur situation en tentant justement de montrer l’exemple, jouant en dépit de blessures.

Si le Canadien veut jouer des matchs significatifs en mars, comme l’avait évoqué du bout des lèvres Jeff Gorton le mois dernier, ou si l’équipe veut ajouter à sa banque d’espoirs avec des transactions en fin de saison, la santé des vétérans sera un élément crucial.

Dans le détail

Encore un spécial Gallagher

PHOTO ADRIAN KRAUS, ASSOCIATED PRESS

Brendan Gallagher

Un autre match, un autre but « comme dans le temps », pour emprunter la formulation de Kaïn. Après avoir accompagné la rondelle dans le but samedi, Brendan Gallagher a de nouveau touché la cible avec ses méthodes circa 2018, cette fois en poussant une rondelle que le gardien adverse, Eric Comrie, croyait immobilisée. « Il est bon à 20 pieds du but. Il l’a encore. Ce n’était pas beau, c’était un but comme l’autre soir », a estimé Jake Allen. On retiendra son but, car il s’est avéré victorieux, mais on ne saurait passer sous silence son rôle sur le filet de Justin Barron en début de match. C’est Gallagher qui provoque la perte de rondelle de J. J. Peterka en zone neutre, qui fonce au filet sur la première occasion de Tanner Pearson, puis qui tasse le défenseur Mattias Samuelsson de l’enclave, avant de cacher la vue à Comrie, qui a mis du temps à repérer la rondelle sur la palette de Barron.

Quand les baies vitrées sont sollicitées…

Après la victoire de samedi, Martin St-Louis avait évoqué, au détour d’une réponse, les nombreux tirs de son équipe qui ont raté la cible, particulièrement en avantage numérique. Statistiquement, la situation n’a rien de catastrophique. Avant le match, le Canadien venait au 31rang de la LNH pour les tirs ratés avec 47, bien loin des 97 des meneurs, les Hurricanes de la Caroline, qui ont toutefois disputé six matchs. Avec les 12 du jour, le Tricolore « grimpe » maintenant au 23rang. Mais c’est surtout dans la qualité des occasions ratées que ces tirs dans la baie vitrée plombent l’attaque montréalaise. À quelques minutes d’intervalle, en milieu de match, Jake Evans et Cole Caufield ont bousillé de belles occasions avec des tirs imprécis. Faudra-t-il ressortir les cibles que les étoiles font éclater au concours d’habiletés ?

Skinner, encore

PHOTO ADRIAN KRAUS, ASSOCIATED PRESS

Jeff Skinner

Jeff Skinner et le Canadien, une histoire d’amour. Le petit ailier a toujours connu du succès contre le Tricolore et ça s’est poursuivi lundi. « Succès » est relatif dans ce cas-ci, car il n’a pas non plus dominé la rencontre. Mais il a fait ce que des tireurs d’élite comme lui font le mieux : il a marqué un but. En 39 matchs contre le CH, Skinner compte maintenant 24 buts et 41 points, soit plus que contre tout autre adversaire, et ce, même s’il a disputé les huit premières saisons de sa carrière dans une autre division, et qu’il n’a pas vu Montréal pendant la saison écourtée de 2021. Heureusement pour les Sabres qu’il était là, cependant, parce que les pauvres Alex Tuch et Tage Thompson sont encore coincés à un point chacun en six matchs cette saison. Ce n’est toutefois pas à défaut d’essayer… Ils ont chacun obtenu au moins une occasion de qualité, et Thompson a dirigé 12 rondelles vers le filet adverse, dont 5 cadrées. Sa fiche de 1 but sur 29 tirs laisse croire qu’une « correction boursière » est imminente.

En hausse 

David Savard

PHOTO ADRIAN KRAUS, ASSOCIATED PRESS

David Savard (58)

Il a participé au but gagnant en appuyant l’attaque, avant de signer une présence d’anthologie pour bloquer deux tirs de Tage Thompson. Son sacrifice se paiera-t-il en matchs passés à l’infirmerie ?

En baisse 

Nick Suzuki

Éclatant samedi, lui et son trio ont été nettement plus effacés à cinq contre cinq, même s’ils affrontaient surtout le quatrième trio des Sabres. Ce n’était guère mieux en avantage numérique.

Le chiffre du match

30

Signe de l’allure du match, 30 mises en jeu ont eu lieu dans le territoire du Canadien, contre seulement 12 en zone des Sabres.