Personne, mais absolument personne, chez le Canadien, ne dira un mot contre Joel Edmundson.

Le Manitobain, en trois saisons à Montréal, s’est établi comme l’un des joueurs les plus populaires dans le vestiaire, tant auprès de ses coéquipiers que de ses entraîneurs. Au sein d’une défense jeune et inexpérimentée, il a, comme David Savard, joué le rôle essentiel de grand frère. En soi, cette contribution n’a pas de prix.

Or, en l’échangeant aux Capitals de Washington, le directeur général Kent Hughes s’est évité un sérieux problème. Celui de voir l’un de ses principaux leaders devenir un boulet sur la patinoire. D’autant que ce boulet priverait un jeune défenseur en ascension de précieuses minutes de jeu.

La transaction parle d’elle-même. Pour acquérir Edmundson, les Capitals ont cédé deux modestes choix au repêchage (3e et 7tour en 2024), tandis que le Tricolore versera la moitié de son salaire la saison prochaine. On est bien loin du juteux choix de premier tour dont faisaient état les rumeurs les plus enthousiastes l’an dernier.

Affaibli par des blessures récurrentes au dos qui lui ont coûté l’équivalent de presque une saison complète depuis deux ans, le vétéran de 30 ans a connu beaucoup de difficultés en 2022-2023. Dans toute la ligue, 171 défenseurs ont disputé au moins 800 minutes à cinq contre cinq. Edmundson a été le pire du groupe du côté des buts accordés à l’adversaire lorsqu’il était sur la glace – 4,49 buts par tranche de 60 minutes. C’est, au demeurant, le pire rendement des 10 dernières saisons complètes de la LNH (82 matchs).

Il n’a pas été que malchanceux. Toujours la saison dernière, il s’est retrouvé au 172rang au chapitre des buts attendus de l’adversaire, au 163e en ce qui concerne les chances de marquer de qualité accordées, calcule le site Natural Stat Trick.

Surprenant à sa première campagne avec l’équipe, il s’est révélé une valeur sûre en défense et un élément clé de l’improbable accession de l’équipe à la finale de 2021.

Sa situation, toutefois, a changé. Du tout au tout.

Pas pressé de partir

Edmundson a plusieurs fois répété combien il adorait jouer à Montréal. Il a d’ailleurs livré un témoignage particulièrement chargé d’émotion, après la date limite des transactions, en mars dernier. Se retrouver au cœur des rumeurs lui avait fait subir beaucoup de stress, avait-il avoué. Il n’était pas pressé de faire ses valises.

La direction non plus, à ce moment, n’a pas forcé la note pour l’échanger, a révélé Kent Hughes en point de presse virtuel, samedi. Les offres, semblables à ce que les Capitals ont donné pour l’obtenir, n’étaient pas assez alléchantes dans les circonstances. La santé incertaine du défenseur incitait à la prudence chez les acheteurs. Et on avait, chez le CH, le désir de le voir finir la saison dans l’uniforme bleu-blanc-rouge. Une décision en phase avec la situation du CH, déjà privé de Kaiden Guhle et d’Arber Xhekaj sur le flanc gauche.

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Kent Hughes

Pendant la saison morte, toutefois, la grille d’analyse est différente. Hughes a indiqué qu’il ne chercherait probablement pas à ajouter de joueurs autonomes à sa formation afin de ne pas « bloquer » de jeunes joueurs dans leur développement. S’il avait gardé Edmundson, c’est ce qui serait arrivé. Le DG a aussi confirmé que les minutes de jeu de « Steady Eddy » seraient redistribuées parmi les défenseurs actuels du club. Ceux-ci, croit-il, sont prêts à abattre « plus d’ouvrage ».

Kent Hughes souhaite aussi qu’Edmundson laisse « une partie de lui dans notre vestiaire », afin que les jeunes joueurs de l’organisation « gardent des leçons pendant leur carrière » à Montréal.

Il leur a toutefois fait, d’une certaine manière, un cadeau en l’envoyant sous d’autres cieux. Quand on sait combien le marché montréalais peut être impitoyable, peut-être bien qu’Edmundson sortira lui aussi gagnant de l’opération, finalement.

Le Canadien en bref

Belzile à New York

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Alex Belzile

Joueur autonome sans compensation, Alex Belzile souhaitait obtenir un contrat à un seul volet. Il a en partie atteint son objectif, puisque les Rangers de New York lui ont accordé une entente de deux ans, au salaire minimum de 775 000 $ par saison. Le contrat est à deux volets pour la première campagne, mais pas pour la deuxième. S’il est renvoyé dans la Ligue américaine en 2024-2025, le Québécois gagnera donc son plein salaire. Après avoir rendu de fiers services au Canadien la saison dernière, notamment par son ascendant positif sur les jeunes joueurs et même par sa contribution offensive (14 points en 31 matchs), Belzile se retrouvait très loin dans la hiérarchie du club en attaque. Kent Hughes a dit avoir « tenté de le garder à Montréal », même pour deux ans, mais qu’il y avait « des limites » à ce qu’il était prêt à lui accorder. Aussi bien dire qu’un contrat à un volet, même pour une année, n’était pas envisageable.

À la défense de Reinbacher

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David Reinbacher

Le pauvre David Reinbacher ne devait pas avoir anticipé la vague de mécontentement qui a suivi sa sélection par le Canadien au cinquième rang du repêchage, mercredi dernier. Des partisans déçus que le défenseur autrichien ait été préféré à l’attaquant russe Matvei Michkov ont pris Reinbacher pour cible sur les réseaux sociaux, au point que le jeune homme, dans une publication soulignant « un rêve devenu réalité » sur Instagram, a désactivé les commentaires. « On comprendrait que des partisans dirigent leur colère vers la direction et les recruteurs, mais [Reinbacher] n’a rien à voir avec notre décision. Il vit son rêve », a souligné Kent Hughes. Connaissant la « passion » des Montréalais pour le CH, il n’a pas été « surpris » par cette réaction, mais a invité les mécontents à laisser une chance au coureur afin de le laisser « montrer sur la glace ce qu’on a vu de lui ». « On croit que c’est un très bon joueur sur lequel on comptera longtemps », a-t-il conclu à ce sujet.

D’autres joueurs pourraient partir

Au risque d’insister, il y a beaucoup de monde chez le Canadien en vue de la prochaine saison, surtout en attaque. Il n’était donc pas surprenant d’entendre Kent Hughes évoquer clairement la « possibilité » que l’équipe tente de se départir de quelques éléments supplémentaires avant le camp d’entraînement. Il n’a évidemment pointé personne, mais différents médias ont rapporté, au cours des derniers jours, que Mike Hoffman, Joel Armia et Christian Dvorak seraient sur le marché. « On a eu des conversations avec différentes équipes avant le repêchage et l’ouverture du marché des joueurs autonomes, et on va continuer d’en avoir, a dit Hughes. [Ces équipes] sont conscientes qu’avec le nombre d’attaquants qu’on a, on est ouverts à bouger. On va voir où ça va nous mener. »

Harvey-Pinard, Newhook, Montembeault…

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Rafaël Harvey-Pinard

Lorsque la frénésie des joueurs autonomes sans restriction se sera calmée et que les agents recommenceront à répondre au téléphone pour discuter de leurs autres clients, le Canadien devra s’entendre avec ses joueurs autonomes avec restriction, à commencer par Rafaël Harvey-Pinard et Alex Newhook. Hughes a eu de bons mots pour Harvey-Pinard, vantant notamment sa « polyvalence », et a dit avoir bon espoir d’en arriver à une entente avec lui. Les négociations avec Newhook ne sont pas encore amorcées, mais là non plus, le DG ne semble pas dans l’urgence. L’enjeu à dénouer avec lui sera le nombre d’années du contrat, a-t-il dit. Il n’a pas eu davantage de discussions avec Samuel Montembeault, dont l’entente viendra à échéance après la prochaine saison. Son dossier passera après ceux des joueurs susmentionnés, comprend-on.

Peut-être un gardien de plus

Le Canadien a actuellement quatre gardiens sous contrat, et il n’est pas exclu qu’un vétéran s’ajoute au groupe. « Si on peut ajouter de la profondeur, on va l’évaluer », a dit Kent Hughes au sujet de la situation de ses hommes masqués. « Toutes les options sont sur la table en ce moment », a-t-il précisé. Si le duo de Jake Allen et de Samuel Montembeault semble établi pour la prochaine saison, céder Cayden Primeau au Rocket de Laval n’est pas sans risque, puisqu’il devra désormais être soumis préalablement au ballottage. La seule option restante, à Laval, serait alors Jakub Dobes, qui, fraîchement issu des rangs universitaires, n’a encore jamais joué dans la Ligue américaine.

Du renfort pour le Rocket

Le Tricolore a annoncé la mise sous contrat de l’attaquant québécois Philippe Maillet et du défenseur Brady Keeper. Les deux ont conclu des ententes d’un an à deux volets. Ils joueront vraisemblablement avec le Rocket de Laval. Maillet, 30 ans, a disputé deux matchs dans la LNH, en 2020-2021, avec les Capitals de Washington. Autrement, sa carrière professionnelle a été partagée entre la Ligue américaine et la KHL, où il a disputé ses deux dernières saisons. Keeper, 27 ans, a lui aussi deux matchs à son actif dans la LNH, mais avec les Panthers de la Floride. Il a passé la dernière campagne avec les Canucks d’Abbotsford, dans la Ligue américaine.