Ça a passé sous silence, et c’est tout naturel, puisque les projecteurs n’étaient pas braqués sur lui. Mais samedi soir, Kaiden Guhle a connu l’un de ses matchs les moins occupés de la saison.

Après trois périodes, il avait disputé 16 min 35 s, quelques secondes de plus que son total le plus bas jusque-là, et surtout très en deçà de sa moyenne personnelle, supérieure à 20 minutes.

Guhle a-t-il connu un mauvais match contre les Flyers de Philadelphie ? Absolument pas.

L’enquête n’a pas besoin d’être exhaustive pour expliquer cette chute radicale : Michael Matheson, à son premier match de la saison, s’était vu confier plus de 21 minutes de jeu avant que ne s’amorce la prolongation – plus de 24 minutes au total.

Le vétéran, notamment, a été omniprésent dans les derniers instants du match, au moment où le Tricolore tentait d’égaler la marque.

On a beaucoup mis l’accent, à l’approche des retours au jeu de Joel Edmundson puis de Matheson, sur l’identité des défenseurs qui écoperaient. Par exemple, Chris Wideman n’a disputé qu’un des huit matchs de son équipe depuis qu’Edmundson est en uniforme. Pour faire de la place à Matheson, Jordan Harris a été le premier à sauter son tour. Une rotation s’installera avec Johnathan Kovacevic et Arber Xhekaj, a déjà prévenu l’entraîneur-chef Martin St-Louis.

Or, l’impact de l’entrée en scène de Matheson ne se mesure pas que par l’identité des joueurs laissés de côté. Elle accélère un phénomène déjà amorcé par le retour d’Edmundson : l’allégement des responsabilités des recrues. À l’évidence, on leur donne de l’air.

Hormis Wideman, Harris a été le plus affecté par l’arrivée d’Edmundson, cédant presque trois minutes par match. Kovacevic a lui aussi perdu des plumes, principalement en raison d’un changement d’affectation. Xhekaj, à l’inverse, a pris du galon, puisqu’on l’a jumelé au numéro 44 et qu’on a commencé à l’employer en avantage numérique. Guhle, lui, était resté stable.

Les débuts de Matheson, toutefois, ont changé la donne pour tous les jeunes. Partenaires sur le troisième duo contre les Flyers, Xhekaj et Kovacevic ont tous deux présenté des temps d’utilisation parmi leurs plus faibles de la saison.

Cette transformation se manifeste aussi plus profondément. Prenons encore l’exemple de Guhle. Jeudi soir, à Columbus, il avait passé quelque 11 minutes sur la glace, à cinq contre cinq, contre Johnny Gaudreau et Boone Jenner, principaux joueurs d’impact des Blue Jackets. Le surlendemain, c’est pendant moins de six minutes que David Savard et lui ont dû contenir Owen Tippett et le premier trio des Flyers. L’effort a été partagé, principalement avec le duo d’Edmundson et Matheson.

Xhekaj et Kovacevic, pour leur part, ont surtout affronté les attaquants de soutien des Flyers.

Soulignons par ailleurs que David Savard, indéniable leader en défense, semble imperméable au retour des blessés. Son temps de glace n’a pas bronché au retour d’Edmundson et il a même légèrement augmenté samedi avec Matheson dans la formation.

Apprentissage

Après la rencontre, samedi, St-Louis a reconnu que ses jeunes arrières allaient « peut-être disputer moins de minutes ». Or, « ils vont jouer le même genre de hockey, on a encore besoin d’eux », a-t-il précisé.

« Ils doivent continuer à grandir comme joueurs, a-t-il repris. Les débuts qu’ils ont eus, toute l’expérience qu’ils ont gagnée, tu ne peux pas acheter ça. On est très contents d’où ils en sont et on va continuer à les gérer. »

« Ils ont joué presque 20 matchs et ils apprennent constamment, a abondé Christian Dvorak. Des fois, tu apprends beaucoup aussi en regardant des vétérans. »

« Composer avec différentes responsabilités et différents rôles fait partie de l’apprentissage, a quant à lui estimé Brendan Gallagher. Tu dois t’adapter. Avec les vétérans qui reviennent, les jeunes auront moins de temps de glace, donc il y aura plus de compétition entre eux. Je ne suis pas inquiet. »

Dans la même veine, Joel Edmundson a noté qu’il n’y avait rien de gênant à affronter une opposition moins relevée, ne serait-ce que momentanément.

« Tout le monde dans cette ligue est capable de jouer ; certains soirs, c’est le quatrième trio qui mène la charge, a-t-il souligné. Kovacevic et Xhekaj ont muselé le quatrième trio [des Flyers]. Peu importe qui est là, on a confiance en notre défense. »

Prochain match : Sabres de Buffalo c. Canadien, mardi à 19 h au Centre Bell

L’amour cru de Tortorella

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

John Tortorella, entraîneur-chef des Flyers de Philadelphie

Deux heures avant le match de samedi, l’entraîneur-chef des Flyers de Philadelphie, John Tortorella, a rencontré les membres des médias. Il a notamment été invité à parler du défenseur David Savard, qu’il a dirigé chez les Blue Jackets de Columbus. Le coloré personnage a alors livré un message d’amour aussi cru que sincère. « Savvy est un joueur de hockey, et c’est un des plus beaux compliments que tu puisses faire à un gars, a lancé Tortorella. Il adore venir à l’aréna, peu importe comment il se porte. »

L’entraîneur a aussi vanté à quel point « une équipe en train de se bâtir », comme le Tricolore, gagnait à avoir Savard dans ses rangs. « Une personne incroyable, un bon père de famille, qui vient chaque jour travailler », a-t-il énuméré. Tortorella, toutefois, est célèbre pour sa franchise légendaire. Il ne s’est donc pas gêné pour rappeler que Savard « ne savait pas patiner à l’époque, alors imaginez maintenant qu’il a vieilli ». « C’est horrible, parfois dur à regarder », a-t-il encore dit, concluant néanmoins : « Mais il accomplit le travail. C’est tout un exemple pour les jeunes. »