(Columbus) Les joueurs du Canadien s’enorgueillissent d’aborder chaque match de la même manière, peu importe l’adversaire. Ils ont tenu parole cette semaine : en deux rencontres contre la meilleure et la pire équipe de la division Métropolitaine, ils ont offert autant de contre-performances.

Ils ont certes bagarré ferme, jeudi soir à Columbus, en comblant des déficits de 2-0 puis de 3-2, et encore en réduisant l’écart à 5-4. Mais une première période atroce et un manque criant de cohésion ont coulé le Tricolore, qui est rentré à Montréal après une défaite de 6-4.

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Contre les Devils, la chaîne a brisé après le premier vingt. À Columbus, c’est l’engagement initial que le CH aimerait effacer de sa mémoire. « Notre pire période de la saison », a tranché Brendan Gallagher, visiblement irrité par la performance de son équipe.

C’est trop dur de revenir après s’être mis dans le pétrin comme ça. On peut parfois le faire, mais on ne peut pas espérer que ça arrive tout le temps.

Brendan Gallagher

Le vétéran s’est fait demander par un reporter si la jeunesse et l’inexpérience de plusieurs de ses coéquipiers pouvaient être en cause. La réponse ne s’est pas laissé attendre.

PHOTO JAY LAPRETE, ASSOCIATED PRESS

Brendan Gallagher déjoue le gardien Joonas Korpisalo en troisième période.

« Ce serait être trop gentil avec nous, a-t-il rétorqué. Nous avons certaines attentes à l’égard de notre groupe. Et on y croit. Ce n’est pas normal de ne pas être prêts mentalement en première période. Le blâme revient à tout le monde, sauf à notre gardien. C’est une dure leçon qu’on apprend. J’espère que ça n’arrivera plus. »

À notre connaissance, c’est la première fois, depuis le début de la saison, qu’il est question d’« attentes » dans le vestiaire du Canadien. Ou qu’elles sont nommées de manière aussi franche. L’entraîneur-chef Martin St-Louis s’échine à répéter qu’il ne faut pas juger son équipe selon ses résultats. Et c’est de bonne guerre. Mais les attentes, elles, sont indépendantes du résultat.

Les Blue Jackets étaient, à n’en point douter, une proie accessible pour le Tricolore. Privée de Patrik Laine, de Zack Werenski, d’Elvis Merzlikins, de Jakub Voracek et de Jake Bean, entre autres, leur formation est une pâle copie de ce à quoi elle devait ressembler. Même si les vestons bleus voguaient sur une belle séquence de deux victoires en trois matchs, ils étaient — et sont encore — la pire équipe de l’Association de l’Est.

« On a tenu des choses pour acquises », s’est navré Nick Suzuki. C’est, nous en conviendrons, non optimal.

« Chanceux »

Gagne ou perd, en effet, il est difficile de justifier à quel point le CH a complètement raté l’amorce de cette rencontre.

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Le gardien du Canadien Samuel Montembeault accorde un but en troisième période.

« [Les Jackets] jouaient avec beaucoup de vitesse, on se retrouvait avec la rondelle dans les patins, et ça partait de l’autre côté », a noté Samuel Montembeault.

« On s’est tiré dans le pied, a enchaîné Martin St-Louis. On a été chanceux que ce soit juste 2-0 [à l’entracte]. »

« On y allait all in sur certains jeux, sans se protéger si ça ne marche pas. […] Je suis plus déçu de la première période que d’avoir perdu le match, parce qu’on s’est battus pareil » pour créer l’égalité, a-t-il renchéri.

Cette phrase résume à elle seule la dualité entre les résultats et les attentes. Les résultats peuvent attendre. Le Canadien n’est pas dans une démarche à court terme, ne cherche pas à empiler les victoires, ne vise pas davantage les séries éliminatoires. On parle évidemment ici du point de vue de l’organisation, puisque les joueurs, eux, ne se satisferont jamais de défaites.

Les attentes, elles, sont ancrées dans le présent, sans égard au classement ou au pointage. On aurait pu, très raisonnablement, s’attendre à ce que les hommes en blanc n’accordent pas trois échappées au premier vingt. Par exemple.

Certaines attentes, aussi, doivent être rajustées en raison des circonstances. « Dans un monde idéal, David Savard jouerait-il moins de minutes ? », a-t-on demandé à Martin St-Louis. Ce dernier a alors défendu son défenseur en invoquant uniquement la « malchance » sur le troisième but des Blue Jackets. Savard a en effet été victime d’un mauvais bond sur ce coup, mais il est difficile de ne pas saisir de fatigue dans son jeu global.

Son entraîneur n’a aucune autre option valable sur le flanc droit de son premier duo. Répétons-le : aucune. Ses attentes doivent donc être ajustées. Le Québécois n’en est pas moins un guerrier et un leader. Or, réduire son temps de jeu n’est pas envisagé.

C’est une position d’entreprise qui se défend, mais qui n’est pas sans conséquence. Probablement que les résultats iront à l’avenant.

En hausse : Johnathan Kovacevic

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Jack Roslovic et Johnathan Kovacevic

Quelques bourdes en défense, surtout en début de rencontre, mais compensées par de jolis flashs offensifs.

En baisse : David Savard

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David Savard et Johnny Gaudreau

On ne veut certainement pas s’acharner sur son cas, mais ça semble de plus en plus pénible pour lui. Et il reste encore beaucoup de hockey à disputer cette saison.

Le chiffre du match : 1

Les officiels mineurs ont connu, à l’instar du Tricolore, une soirée difficile. Ils n’ont attribué au CH qu’un unique revirement sur la feuille de match — Kirby Dach aurait été le seul fautif. Quiconque a regardé la rencontre peut témoigner du fait que cette sous-évaluation est grotesque.

Ils ont dit

On se tire dans le pied. Est-ce à cause de la jeunesse ? Un peu. Mais la jeunesse nous donne aussi du positif. On a contrôlé la rondelle, on a fait des entrées de zone, des sorties de zone. Il y avait beaucoup de positif.

Martin St-Louis

On ne va jamais lâcher. C’est juste décevant, parce qu’on sait que la manière dont on a commencé le match nous a coûté cher.

Brendan Gallagher

On a certainement commis plus qu’un [revirement] ! On a trop étiré nos présences en zone défensive en première période. On a été victimes de revirements en zone neutre, moi compris. On doit corriger ça et être prêts pour samedi.

Nick Suzuki

On n’abandonne jamais, peu importe le pointage. On a une équipe jeune, on doit trouver la manière de bien jouer dans cette ligue. On aurait dû trouver la manière de gagner en troisième période.

Nick Suzuki

Je pense que ç’a bien été [pour moi] en premier et en deuxième période, mais ça s’est compliqué en troisième. Le quatrième but, c’était mon erreur. On venait d’égaler la marque à 3-3, ç’aurait été un arrêt important.

Samuel Montembeault

Dans le détail

Pas la soirée de Montembeault

Son équipe a tellement joué de manière désorganisée qu’il ne peut porter seul la responsabilité de la défaite, mais Samuel Montembeault a certainement connu son match le moins convaincant jusqu’ici cette saison. Le deuxième but des Blue Jackets et encore davantage le quatrième ne l’ont pas bien fait paraître du tout. Sur le premier but de Sean Kuraly en troisième période – détaillé dans le paragraphe suivant –, il a opté pour un coup de harpon, sans toutefois sortir de son filet. Il est ainsi devenu une proie facile. « J’ai hésité, et c’est pour ça que je me suis fait battre, a-t-il analysé. Si j’y vais, je dois y aller à 100 %. J’ai hésité à la dernière seconde, et ç’a fait en sorte que je suis arrivé en retard, et il m’a battu sur le côté. » Avant la rencontre, le Québécois affichait un taux d’efficacité de ,938 à cinq contre cinq, parmi les meilleurs de la ligue. Le voilà maintenant à ,916, après avoir justement accordé cinq buts à forces égales, jeudi. On efface et on recommence.

Les plombiers en vedette

Si la production offensive d’un quatrième trio est généralement perçue comme un cadeau pour une équipe, les Blue Jackets sont gâtés ces jours-ci. Après avoir marqué deux buts mardi dernier, le joueur de centre Sean Kuraly a ajouté deux buts et une mention d’aide contre le CH. Sur son premier filet, il a débordé Evgenii Dadonov et a bien anticipé la réaction de Samuel Montembeault. Quelques instants plus tard, il gagnait nettement une mise au jeu en zone adverse avant de remettre à Mathieu Olivier, qui a marqué d’un tir franc. Plus tôt, l’entraîneur-chef des Jackets, Brad Larsen, avait complimenté cette unité complétée par Eric Robinson, mentionnant qu’elle lui donnait de la « flexibilité » dans la gestion de son banc. Ses plombiers n’ont pas raté l’occasion de le récompenser.

Olivier-Xhekaj, premier round

Après l’entraînement matinal des Blue Jackets, jeudi, l’attaquant Mathieu Olivier, l’un des rares « vrais » bagarreurs de la LNH, avait dit connaître la réputation d’Arber Xhekaj, mais qu’il ne le « chercherait » pas le soir venu. Après avoir vu le Tricolore combler un déficit de deux buts en fin de deuxième période, le Québécois a révisé sa position. Il a invité le défenseur du CH à jeter les gants, ce qu’a accepté Xhekaj, dont le gabarit est nettement plus imposant que le sien. Le colosse du Canadien a porté quelques bons coups d’emblée, mais l’embrassade a été de courte durée. Il s’agissait du deuxième combat de Xhekaj, cette saison, après celui l’ayant opposé à Zack Kassian, des Coyotes de l’Arizona. Il s’était aussi battu deux fois pendant le calendrier préparatoire. Avec un but et une bagarre, Olivier a reçu la deuxième étoile du match.