L’absence de Mike Matheson a fait beaucoup jaser en début de saison, et c’est normal. Une défense déjà jeune était privée d’un de ses rares vétérans. On pourrait ajouter qu’une défense pas particulièrement douée offensivement était privée d’un type qui a enfilé 11 buts avec les Penguins de Pittsburgh la saison dernière.

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Lundi, après l’entraînement matinal de son ancien club, justement, il a été complimenté par Mike Sullivan. L’entraîneur-chef a parlé de lui comme d’un gars capable d’organiser des sorties de zone à lui seul (« a one-man breakout »).

Même privé de cet élément, le Tricolore s’en est plutôt bien tiré, aidé notamment par 24 solides minutes offertes par Kaiden Guhle. Kirby Dach a mis la touche finale à une remontée de deux buts et le CH l’a emporté 3-2 en prolongation sur les Penguins, lundi.

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Kaiden Guhle

On connaissait tout le potentiel de Guhle, mais on nous a toujours prévenu qu’il ne serait pas nécessairement un grand défenseur offensif, pas un type de gars à réussir des saisons de 60 points.

Les probabilités sont fortes qu’il ne le devienne pas, parce que ces défenseurs sont rares. Mais ça ne veut pas dire qu’il est inapte avec la rondelle. Loin de là. Il en a fait la démonstration toute la soirée lundi, s’impliquant à fond comme quatrième homme dans les relances de l’attaque.

« Au début du camp, je savais qu’il serait dur à affronter défensivement. Mais offensivement, il fait de bonnes lectures, de bons jeux », a noté le centre Jake Evans.

Guhle a été confronté au trio de Sidney Crosby toute la soirée. Vous savez, le même Crosby qui débarquait à Montréal avec six points en deux matchs ? Or, ce trio a été d’une très grande discrétion, pendant que Guhle multipliait les « touches », ces jeux où il transportait, passait ou tirait la rondelle. Il a terminé le match avec deux passes, dont une sur une sortie de zone qu’il a lui-même orchestrée depuis l’arrière de son filet. Malgré la présence de Jake Guenztel à ses trousses, il a conservé la rondelle et l’a passée du revers à Nick Suzuki en zone neutre.

Un peu comme ce que Sullivan décrivait à propos de Matheson…

« J’ai juste vu que Suzuki avait un pas d’avance et le jeu allait trop vite pour que je me mette sur mon côté fort, a décrit l’auteur de la passe. Suzuki avait pris son élan, je voulais juste envoyer la rondelle sur son bâton et il a fait un beau jeu pour marquer. Ça se joue vite, il faut parfois faire des jeux du revers et ça a fonctionné. »

C’est déjà la deuxième fois en quatre matchs que Guhle est le joueur le plus utilisé de son camp. Lundi, le coach a ajouté l’avantage numérique à ses responsabilités. « Son jeu à cinq contre cinq nous inspire confiance et on sait qu’il a un côté offensif en lui. Ça fait trois matchs qu’il regarde l’avantage numérique. Tu peux apprendre beaucoup en regardant, et ça l’a aidé à être à son aise », a résumé St-Louis.

L’entraîneur-chef a le compliment facile avec ses recrues, et c’est normal. De sa position, il n’a pas à ajouter de la pression sur ses jeunes en soulignant à gros traits leurs erreurs et leurs faiblesses. Interrogé sur Juraj Slafkovsky, St-Louis a souligné à quel point il avait aimé le jeu du premier choix de l’équipe « à cinq contre cinq ».

Mais pour un entraîneur, les décisions en disent souvent plus long que les paroles. Quand on voit Guhle passer presque la moitié du match sur la patinoire, pendant que Slafkovsky n’a droit qu’à six présences dans les deux dernières périodes, on comprend à quel point la confiance envers Guhle, après seulement quatre matchs, est élevée.

St-Louis dit souvent qu’il a hâte de voir ses jeunes une fois que la « normalité » s’installera cette saison. Une façon de prévenir qu’une baisse du niveau de jeu de certains est à prévoir quand l’adrénaline des premiers matchs se sera estompée. Guhle n’est manifestement pas rendu là encore.

En hausse

Nick Suzuki

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Jeff Petry et Nick Suzuki

Dans l’ombre de Kaiden Guhle, Suzuki a disputé tout un match. En gagnant les deux tiers de ses mises en jeu, il a conclu sa soirée avec deux points et huit tirs au but.

En baisse

Johnathan Kovacevic

Pas parce qu’il a été le pire joueur de son camp, mais parce qu’après avoir connu trois très bons premiers matchs avec le CH, il a davantage joué comme un septième défenseur.

Le chiffre du match

2 min 26 s

C’est le temps qui restait au cadran en troisième période quand Martin St-Louis a rappelé Samuel Montembeault au banc à la faveur d’un sixième patineur. Son audace a payé.

Dans le détail

Le talon d’Achille de Dach

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Kirby Dach

Kirby Dach a disputé les trois premiers matchs de la saison avec Sean Monahan au sein de son trio. Les mises en jeu font partie des faiblesses de Dach et en jouant avec le gaucher Monahan, il s’évitait au moins les mises en jeu du côté gauche et ne prenait que celles de son côté naturel. Or, Martin St-Louis a refait ses trios pour ce duel et Dach se retrouvait avec Jonathan Drouin et Josh Anderson, qui ne sont pas des habitués des mises en jeu. Résultat : Dach a connu une soirée difficile aux mises en jeu (0 en 5) et n’a donc pas eu la soirée espérée au chapitre de la possession de la rondelle. Son trio a d’ailleurs connu sa meilleure séquence de la soirée sur une présence amorcée en pleine action, en milieu de match, à la suite d’un changement effectué pendant le jeu. Cela dit, une fois en prolongation, Dach s’est largement repris en marquant le but gagnant.

Les subtilités

Les meilleurs centres sont capables de gagner régulièrement des mises en jeu de façon claire et nette, mais dans plusieurs cas, c’est l’ailier qui la gagne, par exemple dans les cas où la rondelle reste coincée près des deux centres. C’est ce que Brendan Gallagher a fait dans les secondes qui ont mené au but égalisateur de Caufield. Certes, le Canadien attaquait avec un homme en plus, mais justement, Gallagher a profité de son statut d’homme « en trop » pour se ruer vers le point de mise en jeu et aider Nick Suzuki à gagner son engagement contre Jeff Carter. Six secondes plus tard, Caufield créait l’égalité. « On avait un joueur de plus, donc on avait l’avantage, a rappelé Caufield. Mais Gallagher fait ça depuis toujours. Il trouve une façon de passer sous les gars plus gros. C’était bien exécuté. »

Des erreurs à éviter

Arber Xhekaj a terminé la dernière saison au premier rang de la Ligue junior de l’Ontario pour les minutes de pénalité, avec 138. Il le faisait toutefois en tant que pilier de la défense de ses équipes, à titre de joueur de 20 ans. Le voici un an plus tard, cette fois au bas de la hiérarchie parce qu’il est maintenant dans une équipe de la LNH. Il joue donc des minutes plus limitées. Mais il demeure néanmoins un client fidèle du banc des pénalités. Ses deux infractions de lundi étaient ses troisième et quatrième de la saison, et auraient toutes les deux pu être évitées. Il a été coupable d’un bâton élevé et d’une pénalité pour obstruction sur un jeu où il n’y avait aucune menace contre le CH. Xhekaj a les défauts de ses qualités et se fera probablement souvent punir en raison de son style agressif et parce que des joueurs plus faibles tomberont plus facilement sous ses coups. Il doit donc éviter les pénalités comme celles dont il a écopé lundi.

Ils ont dit

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Cole Caufield (à gauche)

C’est pas mal spécial. J’ai eu quelques occasions de marquer avant ça, mais il n’y a rien qui bat de le faire à la maison, en prolongation en plus.

Kirby Dach

C’est la mentalité des jeunes aujourd’hui. Quand j’ai joué mes premiers matchs, j’étais nerveux au début, mais je n’avais pas peur ensuite de tenter des jeux. Nos jeunes, [Kaiden] Guhle, Arber [Xhekaj], Slaf [Juraj Slafkovsky], ils aident vraiment, ils sont gros, patinent bien et ont la confiance d’essayer des jeux.

Kirby Dach, au sujet de la confiance de Guhle avec la rondelle

D’où j’étais, je pouvais voir où il y avait de l’espace pour me faire oublier. Il faut arriver au bon moment et Joe [Jonathan Drouin] m’a fait toute une passe, j’avais le filet ouvert !

Cole Caufield

Cole m’a dit avant la prolongation : ‟Allons juste jouer au hockey.” Ça m’a aidé à me calmer. On a joué, on s’est amusés. C’est dur de ne pas s’amuser dans cet aréna. Les fans ont été incroyables.

Kaiden Guhle

On a respecté le plan parce qu’on jouait bien. Ils ont fait un beau jeu sur le but de Malkin, il s’est fait oublier et c’est Malkin. Mais ce jeu-là est fini, tu reviens au centre et let’s go. J’ai aimé notre poussée après le deuxième but, on a eu une bonne fin de deuxième. C’était ça notre message, on perdait le match, mais je ne pensais pas qu’ils nous battaient.

Martin St-Louis

Est-ce trop tôt [pour retirer le gardien] ? Je ne le sais pas. Mais on avait une mise au jeu en zone offensive et on ne sait pas si on en aura une autre. Donc on a pris le temps d’arrêt pour s’organiser.

Martin St-Louis

Propos recueillis par Guillaume Lefrançois, La Presse