(Tampa, Floride) Les Islanders des années 1980 peuvent dormir en paix : leur statut ne sera pas menacé avant au moins deux ans.

Artturi Lehkonen a – encore – marqué le but gagnant, et l’Avalanche du Colorado l’a emporté 2-1, dimanche, pour remporter la finale de la Coupe Stanley en six matchs. Les anciens Nordiques triomphent pour une troisième fois depuis leur départ de Québec, après les conquêtes de 1996 et de 2001.

Et pas besoin de chercher bien loin le fil conducteur entre ces deux conquêtes et celle de cette année. Ce lien, c’est Joe Sakic, celui qui était aussi sollicité que ses joueurs pour les entrevues d’après-match.

Sakic a gagné les deux Coupes à titre de capitaine de l’Avalanche. Le voici maintenant dans le rôle d’architecte, celui qui a repêché les piliers de cette équipe que sont devenus Cale Makar et Mikko Rantanen, celui qui est allé chercher Nazem Kadri, Devon Toews et Lehkonen.

Les plus nostalgiques y verront un lien avec Québec, là où l’Avalanche des années 1990 s’est construite.

Mais il y a un autre lien encore plus direct entre le passé et le présent. Sakic l’a évoqué quand on lui a demandé de comparer l’expérience de gagner comme joueur et comme DG.

« Quand tu joues, t’as des papillons avant le match, et quand ça commence, tu peux faire une différence dans le match. Quand tu ne joues pas… »

Il a pris une pause avant de poursuivre sa pensée. « Là, je sais comment Pierre se sentait. Tu dois regarder, c’est tout ce que tu peux faire. »

« Pierre », c’est Pierre Lacroix, dernier DG des Nordiques, nommé à ce poste en 1994, mort en décembre 2020. Lacroix a suivi l’équipe à Denver et en a fait une puissance dans la LNH pendant des années.

« J’ai tellement appris de lui, a lancé Sakic. Il m’a donné la chance, à ma retraite, de travailler ici. C’est un excellent mentor, une excellente personne. J’ai beaucoup appris de lui. Je ne serais pas ici si ce n’était pas de Pierre. »

Rouleau compresseur

C’est toute une équipe de hockey que Sakic a mise sur pied, à commencer par Makar, celui qu’il a repêché au 4e rang en 2017. Ce même Makar termine sa saison avec le trophée Norris (meilleur défenseur) et le Conn-Smythe (joueur par excellence en séries).

L’Avalanche remporte les grands honneurs après avoir dominé la LNH depuis octobre. En saison, l’équipe a terminé au 2e rang du classement général, au 1er rang dans l’Association de l’Ouest, avec 119 points.

En séries, l’équipe n’a subi que quatre défaites et a remporté deux séries par balayage. Depuis que la LNH a instauré le format de quatre séries 4 de 7, soit en 1986, seuls les Oilers d’Edmonton de 1987-1988 ont connu un meilleur parcours, avec seulement deux défaites. L’Avalanche est la cinquième équipe à subir seulement quatre revers en route vers la Coupe Stanley, les autres étant le Canadien de 1993, les Devils du New Jersey de 1995, les Red Wings de Detroit de 1997 et les Kings de Los Angeles de 2012.

Sakic et son équipe de direction ont joué un rôle crucial, mais le DG a compris que contrairement à lorsqu’il jouait, il ne peut plus être le premier à soulever la Coupe !

« On regardait les célébrations, et le propriétaire [Stan Kroenke] m’a demandé : “Comment tu te sens d’attendre aussi longtemps, cette fois ?” Je lui ai demandé : “Combien de temps je dois encore attendre comme ça ?!” », a lancé Sakic en riant.

PHOTO GUILLAUME LEFRANÇOIS, LA PRESSE

Josh Kroenke, Joe Sakic et Stan Kroenke

Quelques minutes plus tard, quand la patinoire de l’Amalie Arena commençait tranquillement à se vider et que les joueurs retournaient au vestiaire, Sakic, Stan Kroenke et Josh Kroenke (le fils du propriétaire) étaient entourés de caméras, avec la Coupe Stanley dans les bras.

Les paroles de Stamkos

De son côté, le Lightning échoue dans sa quête d’une troisième Coupe Stanley de suite. Aucune équipe n’y est donc parvenue depuis les Islanders de New York, de 1980 à 1983.

Difficile de dire si c’était justement le fait d’avoir raté ce rendez-vous avec l’histoire, mais Steven Stamkos et Patrick Maroon, les deux premiers joueurs à rencontrer les médias, contenaient mal leurs émotions.

Maroon, qui visait une quatrième Coupe de suite (il a gagné à St. Louis en 2019), avait les yeux bouffis.

Quand notre rapport de blessures sortira, vous n’en reviendrez pas, a-t-il murmuré. On n’a pas abandonné, on est des guerriers. Je suis tellement fier des gars, pour ce qu’on s’est imposés depuis trois ans. On a eu tout un parcours, mais on est arrivés à court ce soir.

Patrick Maroon

Stamkos et quelques membres du noyau de l’équipe vivaient la défaite en finale pour une deuxième fois, après celle de 2015.

« Ça fait aussi mal que lors de notre première finale, a-t-il estimé. Mais c’est le temps de prendre un pas de recul et réaliser à quel point c’est difficile de se rendre ici. Félicitations à l’Avalanche, c’est une excellente équipe, ils sont les champions. »

Stamkos a quant à lui rappelé les étapes que son équipe a franchies en séries. « Au premier tour, on joue contre un des meilleurs joueurs de la LNH, contre le joueur le plus utile à son équipe [Auston Matthews]. Au deuxième tour, on affronte les gagnants du trophée des Présidents [les Panthers de la Floride]. En demi-finale, on joue contre le gagnant du trophée Vézina [Igor Shesterkin] et en finale, contre le gagnant du Norris et maintenant du Conn-Smythe. Ça n’arrêtait pas. C’est ce qui rend la défaite si difficile, parce que tu réalises à quel point t’as travaillé fort pour te rendre ici. »

La défaite sera particulièrement amère pour Corey Perry. L’ancien du Canadien s’incline pour une troisième année de suite en finale, lui qui a perdu l’an passé avec le Tricolore et en 2020 avec les Stars de Dallas. Sa deuxième bague de la Coupe Stanley (après 2007) se fera encore attendre.

Malgré la douleur du moment, Perry est allé donner quelques coups de bâton d’encouragement à ses coéquipiers après la poignée de main.

Patrick Maroon, un grand ami de Perry, a aussi eu une pensée pour lui, mais aussi pour les vétérans qui étaient en quête d’une première Coupe.

« Honnêtement, je me sens mal pour Bellemare, Nash, Hagel, Elliott et pour Perry. On leur en doit une. J’espère qu’on reviendra ici l’an prochain. »