(Boston) On dit souvent que les tournois à élimination directe, ceux où une défaite signifie la fin des émissions, favorisent les négligés. Selon cette théorie, il serait plus facile de causer la surprise dans la NFL qu’au hockey ou au basketball, où ce sont des séries 4 de 7.

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C’est un peu ce qui s’est passé, à échelle réduite, dimanche soir à Boston. Pendant environ 45 minutes, la formation du Canadien, qui tenait avec des trombones et du ruban adhésif, a résisté aux Bruins. Des Bruins qui, déjà sur papier, sont supérieurs au CH, et qui en plus, comptent un seul blessé, Trent Frederic. Trent qui ? C’est ça.

C’était donc 2-2 après 45 minutes. Quinze minutes plus tard, c’était 5-2 Boston, la marque finale.

Le résultat ne surprendra personne. En l’absence de Mike Hoffman, Jake Allen, Jonathan Drouin, Cédric Paquette, Mathieu Perreault, Joel Edmundson et Carey Price, la profondeur de l’équipe est mise à l’épreuve. Sur les 19 joueurs qui ont joué, on en comptait deux réclamés au ballottage dans les dernières semaines (Samuel Montembeault et Adam Brooks) et trois qui seraient actuellement à Laval avec une formation en santé (Michael Pezzetta, Alex Belzile et Ryan Poehling). Ah oui, Artturi Lehkonen n’est pas à 100 %, car sa présence était encore incertaine à 17 h.

Le résultat est que les joueurs en uniforme pour le CH totalisaient 49,3 millions de dollars en salaire. Les joueurs sur la touche, eux, ont une valeur de 32,175 millions sous le plafond salarial, un chiffre qui n’inclut pas le salaire de Shea Weber !

Frustration et déception

Évidemment, aucun athlète ne voudra évoquer de telles excuses pour expliquer une défaite.

« Ce n’est pas une excuse, a rétorqué un Jeff Petry de mauvais poil après le match. Les 20 joueurs en uniforme doivent travailler fort. On est payés pour jouer et montrer ce qu’on a dans le ventre. Quand il y a des blessés, c’est aux autres de prendre le relais. »

PHOTO PAUL RUTHERFORD, USA TODAY SPORTS

Tomas Nosek (92) et Tyler Toffoli (73)

Montembeault, lui, fait partie de ces joueurs qui ont droit à une chance de se faire valoir en l’absence de vétérans. Avec Price et Allen en santé, le Québécois serait soit à Laval, soit dans une autre équipe aux prises avec des blessures devant le filet.

Mais le jeune homme s’en voulait après le match. Il avait été bombardé dans les deux premières périodes, avant d’être victime de mauvais bonds sur les deuxième et troisième buts. Puis, Charlie Coyle l’a battu sur un jeu qu’il aimerait revoir.

« Le quatrième but est frustrant. Ça fait deux matchs de suite que je me place en reverse VH sur mon poteau et que je me fais battre au-dessus de l’épaule. Je devrai travailler là-dessus pour que ça n’arrive plus », a pesté le gardien.

PHOTO WINSLOW TOWNSON, ASSOCIATED PRESS

Charlie Coyle après son deuxième but du match

Ducharme, lui, aurait pu évoquer les blessures pour défendre son équipe. Pas qu’il devrait le faire une fois dans le vestiaire, mais il n’est pas tenu de garder le même discours devant les caméras et devant ses joueurs. Mais l’entraîneur-chef a refusé d’utiliser les excuses.

« Les gars qui rentrent étaient au camp avec nous. À Laval, on travaille de la même façon. C’est juste qu’en tant qu’équipe, au niveau de la prise de décision et l’exécution, surtout en deuxième période… Il y a des jeux qui reviennent dans notre zone, on passe plus de temps dans notre zone et on est fatigués, les défenseurs n’ont pas le temps de changer. »

En attendant le retour de quelques éléments importants, le Canadien demeurera donc une équipe fragile. En revanche, il y a de belles occasions à saisir pour des joueurs moins établis.

Montembeault a eu sa chance cette fin de semaine, mais Ducharme a émis le souhait de donner un départ à Cayden Primeau. Poehling a été promu au sein du troisième trio. Pezzetta a obtenu ses deux premiers points dans la LNH cette fin de semaine : une passe samedi, un but dimanche. Un but marqué même si les excellents Brad Marchand et David Pastrnak étaient sur la patinoire en même temps que lui.

Et dans une tout autre mesure, Nick Suzuki est inondé de responsabilités. Dimanche, il a joué plus de 20 minutes pour un cinquième match de suite.

Évidemment, ces défaites et ces expériences d’apprentissage seraient plus faciles à accepter, à relativiser, si l’équipe s’était dotée d’un coussin en début de saison, comme l’an dernier. Mais ces joueurs voient le classement comme nous tous, et ils voient le trou dans lequel l’équipe est embourbée.

Dans le détail

Ça tombe comme des mouches

Après Jake Allen samedi, le Canadien a perdu un autre soldat dimanche : Mike Hoffman, blessé au haut du corps. C’est sans oublier que Jonathan Drouin n’était pas encore remis des maux de tête qui l’affligent depuis qu’il a été atteint d’une rondelle au visage le 2 novembre dernier. L’absence de Hoffman a fait en sorte que Ryan Poehling a obtenu une promotion, passant du centre du quatrième trio à l’aile gauche d’un trio avec deux vétérans, soit Christian Dvorak et Brendan Gallagher. Le changement d’affectation était étonnant, parce que Poehling formait un trio efficace avec Michael Pezzetta et Alex Belzile. Mais Ducharme avait laissé entendre dès l’arrivée de Poehling, en début de semaine, que la situation pourrait changer rapidement. L’échantillon est limité, mais Poehling s’est bien débrouillé dans sa nouvelle mission. Quant à Drouin, Dominique Ducharme a dit avoir bon espoir de le revoir dans la formation mardi. Il a ajouté que Drouin avait le feu vert pour jouer, mais que c’était une question de confort.

Tenter le coup de circuit…

La place de Jakub Zboril à la ligne bleue des Bruins est encore précaire. Le choix de 1er tour des Bruins en 2015 (un des trois, en fait) disputait dimanche son troisième match de la saison, à la faveur du bon vieux Mike Reilly, laissé de côté par son entraîneur. Et comme bien des jeunes qui veulent se faire un nom, Zboril y a été pour le coup de circuit, sous la forme d’une percutante tentative de mise en échec envers Josh Anderson. Il a raté son coup, permettant au CH de s’installer et quelques instants plus tard, pendant cette même présence, Michael Pezzetta inscrivait son premier but dans la LNH.

Efficaces malgré tout

Les éternels optimistes noteront que Patrice Bergeron, qui était 1er dans la LNH avant le match pour l’efficacité aux mises au jeu (64 %) n’a remporté que le tiers de ses affrontements dimanche. Il a carrément perdu ses quatre mises au jeu contre Nick Suzuki, tandis que Christian Dvorak l’a battu quatre fois en sept occasions. Ajoutons que le formidable trio de Bergeron, Brad Marchand et David Pastrnak n’a pas marqué à forces égales. Ça n’a pas empêché les trois comparses de démontrer combien ils sont dangereux à tout moment. D’abord, ils ont provoqué trois pénalités au Canadien, et ils ont obtenu de nombreuses chances de marquer, dont un 2 contre 0 de Marchand Pastrnak, une attaque repoussée par Montembeault.

Ils ont dit

C’est plate, mais on ne peut rien y faire. Jeff a fait le bon jeu là-dessus. Quelles sont les chances que ça arrive encore ? J’ai fait l’arrêt, le défenseur envoie toujours ça dans le coin. Charlie [Coyle] était à la bonne place au bon moment, il a eu la rondelle sur le casque. C’est frustrant, mais c’est quand même juste 3-2 à ce moment-là et on avait beaucoup de temps.

Samuel Montembeault, à propos du troisième but des Bruins

On nous enseigne à jouer de cette façon. S’il y a un retour, il ne faut pas le dégager vers le centre de la glace, mais bien dans les coins. Ça a touché sa visière et la rondelle est tombée dans le filet.

Jeff Petry, au sujet de la même séquence

Il a été solide, surtout en deuxième période, quand ç’a été plus dur pour nous. Il a fait des arrêts solides pour qu’on garde l’avance.

Dominique Ducharme, à propos de Montembeault

Quand tu donnes un quatrième avantage numérique, c’est une équipe qui te fait payer. On a fait du bon travail sur leurs trois premiers avantages numériques, du bon travail contre leur aussi premier trio, mais ils ont profité de leur dernière occasion

Dominique Ducharme

Je savais que j’avais touché à la rondelle. Au début, je croyais qu’il avait réussi un bel arrêt. Mais j’ai vu que la rondelle a fini par rentrer. Les gars me regardaient. À ce moment, je me suis dit que je venais de marquer. […] Je me suis souvent exercé à rediriger des rondelles. Je suis juste heureux d’avoir marqué mon premier. Ça arrive malheureusement dans une cause perdante.

Michael Pezzetta

En hausse

Christian Dvorak

PHOTO WINSLOW TOWNSON, ASSOCIATED PRESS

Derek Forbort et Christian Dvorak

Il a été pas mal plus visible que dans les derniers matchs, en plus d’obtenir une chance de marquer en se moquant de Derek Forbort. Il a aussi remporté 60 % de ses mises au jeu.

En baisse

Nick Suzuki

PHOTO PAUL SANCYA, ASSOCIATED PRESS

Nick Suzuki (14) et Moritz Seider (53)

Après un séjour à domicile éclatant, il a connu une fin de semaine plus tranquille à l’étranger. Il faut dire qu’avec tous les blessés, son trio devient clairement la priorité pour les meilleurs éléments défensifs adverses.

Le chiffre du match

566

Auteur de son premier but dans la LNH, Michael Pezzetta est devenu le 566e joueur à marquer un but pour le Canadien. En fait, vous en trouverez 565 dans les bases de données de la LNH, parce le but du 566e joueur, José Théodore, apparaît dans une autre liste.