Depuis le début des présentes séries éliminatoires, le Lightning de Tampa Bay convertit, grosso modo, le tiers de ses chances en avantage numérique.

Avant la rencontre de lundi, cette équipe produisait à un taux effarant de 35,9 %. Alors au cours d’une soirée pendant laquelle elle obtient cinq supériorités numériques complètes, les probabilités disent qu’elle marquera un ou deux buts dans ces circonstances.

Le chiffre de zéro qui apparaît sur la feuille de match de lundi peut donc ressembler à une aberration statistique. Celle-ci s’explique certainement par le brio du Tricolore en infériorité numérique. Mais également par une exécution qui a fait défaut dans le camp des Floridiens. Ceci étant la cause de cela, en fait.

D’ordinaire chirurgicales, les passes sur le jeu de puissance ont semblé moins précises à mesure qu’avançait la rencontre. La démonstration la plus flagrante a été faite à l’amorce de la prolongation, alors qu’on a mis près d’une minute à s’installer confortablement en territoire du Canadien.

« On est une équipe qui se met de la pression, a témoigné Victor Hedman après le match. Quand on ne réussit pas à marquer, on est évidemment déçus. On garde néanmoins confiance dans notre avantage numérique. »

« Une fois installés en zone adverse, on a bien paru, a poursuivi le défenseur étoile. Ils ont une bonne unité d’infériorité numérique. On va regarder des vidéos et s’assurer de faire mieux. »

L’entraîneur-chef Jon Cooper a refusé de blâmer son jeu de puissance pour justifier la défaite. « On ne se serait pas rendus aussi loin en séries éliminatoires sans notre avantage numérique, je ne veux pas lui faire porter la faute », a-t-il dit.

Il a tenté de relativiser les quatre minutes bousillées en toute fin de rencontre, invoquant notamment une perte de rythme attribuable à la pause entre la troisième période et la prolongation. Mais il s’est promptement ravisé : « On a eu presque trois minutes [d’avantage numérique en prolongation], je ne commencerai pas à justifier pourquoi on n’a pas marqué. On a eu de bonnes chances, mais ça ne rentrait pas ce soir. »

C’est également avec l’avantage d’un homme que le Lightning a frappé deux de ses trois poteaux, lundi. Brayden Point, en première période, a conclu ainsi un échange parfait avec Steven Stamkos et Hedman. Et Hedman était certain d’avoir marqué au deuxième vingt, mais la rondelle avait bel et bien fini sa course sur la tige métallique.

La plus belle chance ratée du match revient toutefois à Nikita Kucherov qui, à forces égales et avec deux minutes et demie à écouler au dernier vingt, a envoyé une rondelle directement sur le poteau à la gauche de Carey Price, après avoir accepté une passe à l’embouchure du filet. Le genre d’occasion que ce genre de joueur ne rate pas souvent, disons.

« Je ne me demande pas pourquoi on n’a pas gagné en prolongation, je me demande plutôt pourquoi on s’est retrouvés en prolongation, a encore dit Cooper. On a eu amplement la chance de mettre ce match hors de la portée du Canadien. Et si tu ne gardes pas cette équipe à distance, elle va gagner. »

Déjà-vu

Le Lightning est évidemment encore largement favori pour gagner cette série. Les remontées suivant un retard de 3-1 sont moins rares qu’après un retard de 3-0, mais elles demeurent marginales dans la grande histoire du hockey.

« On rentre à la maison et on recharge les batteries », a résumé Hedman pour décrire l’état d’esprit de ses coéquipiers. On se doute que ça ne rayonnait pas dans le vestiaire des perdants, puisque seuls Hedman et Barclay Goodrow se sont adressés aux membres des médias après la défaite, alors que depuis le début de la finale, quatre joueurs sont chaque soir rendus disponibles.

« Évidemment qu’on aurait voulu gagner, mais le Canadien s’est rendu jusque-là pour une raison : c’est une bonne équipe qui a poussé fort alors qu’elle avait le dos au mur, a renchéri Goodrow. On se concentre maintenant sur le match numéro cinq. On sera prêts. »

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Barclay Goodrow a marqué en deuxième période.

La situation laisse une certaine impression de déjà-vu pour les joueurs du Lightning : en finale, l’année dernière, ils avaient la chance de mettre fin à la série lors du cinquième match, mais ont vu les Stars de Dallas l’emporter en prolongation. Et en demi-finale, il y a quelques jours, les Islanders de New York ont forcé la tenue d’un septième match, eux aussi en prolongation.

Interrogé sur l’expérience que son équipe avait acquise de ces épreuves passées, Cooper a prévenu qu’« on ne peut pas juste prendre l’expérience, la balancer sur la glace et espérer gagner ».

« Il faut travailler pour y arriver, jouer des matchs extrêmement précis, a-t-il poursuivi. J’aurais été déçu si le Canadien n’avait pas fourni une forte opposition ce soir. De notre côté, on doit travailler plus fort. Il faut utiliser cette déception de la bonne manière. »

Il importe de souligner qu’après les deux défaites mentionnées plus haut, le Lightning s’est chaque fois imposé de manière convaincante et a signé des victoires par blanchissage : 2-0 contre les Stars, 1-0 contre les Islanders.

Ce n’est certainement pas une bonne nouvelle pour le Canadien. Mais après tout ce qu’il a traversé pendant la saison et en séries, on se doute que c’en prendra davantage pour le décourager.