À la place des Festivals, le cortège des champions est arrivé. Le défilé des Alouettes de Montréal était officiellement terminé. Mais la fête ne faisait que commencer. Et en faisant résonner Les étoiles filantes des Cowboys Fringants, c’était de bon augure.

Des milliers de personnes étaient réunies sur le parterre de la place des Festivals. Malgré la pluie, le temps gris et les odeurs de cannabis.

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Enfants, parents et vétérans portaient fièrement un maillot, une casquette ou une tuque aux couleurs des Alouettes.

Des employés des Alouettes distribuaient des mini-chandails et des affiches. Un partisan donnait de petits drapeaux du Québec.

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Une foule nombreuse s’était rassemblée sur la place des Festivals.

Rapidement, cette célébration de la Coupe Grey a pris des allures de fête nationale. En même temps, c’est un peu ce que les membres des Alouettes ont prôné depuis leur triomphe. Cette idée d’identité et de fierté locale.

Lorsque les joueurs ont débarqué des autobus, l’annonceur maison les a appelés un par un sur la scène. À commencer par les travailleurs de l’ombre, comme les entraîneurs vidéo, les physiothérapeutes et les responsables des communications.

Puis, peu à peu, avec des effets de fumée artificielle beaucoup trop prononcés, les joueurs sont montés sur scène devant une foule bruyante et fière.

Luc Brodeur-Jourdain, les joueurs de ligne offensive Justin Lawrence et Sean Jamieson, ainsi que le demi offensif Jeshrun Antwi ont animé le spectacle en calant des bières qui, dans leurs grosses mains, avaient l’air d’être de petites piles Duracell.

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Luc Brodeur-Jourdain

Pour le Québec

Certains membres de l’équipe ont ensuite pris la parole. Enthousiastes, les célébrés ont trouvé les mots justes pour animer une foule qui s’était un peu endormie.

Mais le propriétaire de l’équipe, Pierre Karl Péladeau, l’a réveillée : « Oui, monsieur, oui, madame ! Merci de nous avoir suivis toute la saison. » Avant de lancer une vague de « olé, olé, olé ! ».

Le président Mark Weightman a ensuite provoqué une salve d’applaudissements et de rires lorsqu’il a juré vouloir garder la coupe Grey le plus longtemps possible : « On sera mis à l’amende, ce n’est pas grave, mais on va garder la coupe Grey pour plusieurs semaines, parce qu’elle appartient à Montréal ! »

Jason Maas, absent au début de la cérémonie, a pris la parole dans le délire le plus complet. « Bonjour, Montréal ! Merci beaucoup ! », a-t-il lancé.

L’entraîneur-chef a tenu un discours semblable à celui prononcé dans le vestiaire des siens après le triomphe.

« On a réussi le great 8 pour vous [en référence à la huitième Coupe de l’histoire du club]. On est fiers d’être de Montréal, du Québec et d’être des Québécois. […] On va travailler fucking fort pour ramener la neuvième [Coupe Grey]. »

Et l’un des joueurs les plus utiles des éliminatoires, Darnell Sankey, a poursuivi dans la même veine, casquette de champions sur le côté : « Personne dans la LCF ne croyait en nous. Regardez ! », a-t-il dit en prononçant le dernier verbe en français, en saluant les partisans.

Puis, s’est présenté celui que tout le monde attendait. Lorsque Marc-Antoine Dequoy s’est emparé du micro, c’est comme si tout le monde retenait son souffle. « Montréaaaaal », a-t-il hurlé en s’appuyant sur sa jambe arrière pour générer encore plus de puissance, comme Steven Tyler pour atteindre les notes les plus aiguës dans Dream On.

« Hey Montréal, devinez quoi ? On est champions ! Merci à tout le monde. Je sais exactement ce que vous vivez. J’étais exactement dans la même position que vous en 2010. Et honnêtement, la ville de Montréal, le Québec au complet, on est fiers de notre équipe et aujourd’hui vous l’avez montré, parce qu’on est des maudits champions de la Coupe Grey. »

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Marc-Antoine Dequoy (au centre)

Les sous-estimés

Depuis le début de la saison, et surtout depuis leur entrée dans les éliminatoires, les joueurs des Alouettes sont motivés par les prédictions des experts réalisées en début de saison. Ces derniers, dans la majorité des cas, les plaçaient derniers ou avant-derniers dans la Ligue canadienne dans les différents classements avant la saison.

Et toute la saison, les Alouettes ont eu comme motivation de leur faire regretter leurs positions.

L’architecte de cette équipe, Danny Maciocia, a été l’intervenant le plus éloquent de la journée. Le directeur général de l’équipe, la voix éraillée, a crié « Vous êtes champions », en pointant la foule. Et les joueurs se sont mis à scander « Danny, Danny, Danny », derrière lui.

On n’est pas pires pour une équipe qui était classée dernière par les experts. Nous sommes de fiers Québécois !

Danny Maciocia, directeur général des Alouettes

Puis, en clôture de cérémonie, le joueur par excellence de la dernière Coupe Grey, Cody Fajardo, a pris la parole. « Personne ne croyait au 1 % présent ici. »

Et il a demandé aux enfants présents dans l’assistance de boucher leurs oreilles.

« À tous les autres : Fuck you, just watch ! [Allez vous faire foutre, regardez-nous faire] », en référence à son discours d’avant-match devenu viral sur les médias sociaux.

« Et j’ai seulement une question pour vous, Montréal, a-t-il enchaîné. Voulez-vous qu’on en gagne une autre ? La Coupe Grey nous revient. Mes coéquipiers la méritent, vous, les partisans, vous la méritez. Je ne serais pas ici sans vous et sans eux. »

La musique a retenti dans les haut-parleurs et les joueurs ont continué à danser, avec ou sans chandail, sur la scène.

Et les gens ont quitté le parterre, prêts à peut-être répéter l’expérience dans un an.