(Jeddah) Depuis le temps qu’on les présente comme les fers de lance de la nouvelle garde en Formule 1, Max Verstappen (Red Bull) et Charles Leclerc (Ferrari) semblent enfin en position de se disputer le titre dans la catégorie reine.

Lors du Grand Prix inaugural à Bahreïn le 20 mars, ils se sont livré une bagarre mémorable de trois tours après le passage aux stands, dont Leclerc est sorti vainqueur. Et on ne saura jamais comment la course se serait terminée si Verstappen n’avait pas abandonné à cause d’une panne à trois tours de l’arrivée.

Le Néerlandais, champion du monde en titre, a pris sa revanche lors de la manche suivante en Arabie saoudite dimanche, au terme d’un nouveau duel de haute volée dans les neuf derniers tours, qualifié de « rude, mais juste » par le Monégasque et d’« intelligent » par Verstappen.

Pour l’heure, le duo qui se dégage comme favori en 2022 reste « fair play » sur la piste et en dehors, mais personne n’est dupe, l’affrontement deviendra de plus en plus piquant au fur et à mesure que l’enjeu grimpera.

Il l’a déjà été pendant leurs années karting, comme en atteste une vidéo de 2012 devenue virale.

C’est l’année de leurs 15 ans (tous deux sont nés à une quinzaine de jours d’écart en 1997), Max accuse Charles de l’avoir sorti de piste. « C’est pas juste », maugrée l’adolescent. « C’était un incident de course », réplique son rival. À la fin, tous les deux ont été disqualifiés !

« Tout va bien »

PHOTO HAMAD I MOHAMMED, REUTERS

Max Verstappen

« En karting, ça peut se frotter », s’est d’ailleurs souvenu Verstappen dimanche. « Ce n’est malheureusement plus possible en Formule 1. Mais nous l’avons fait dans le passé, donc tout va bien. »

Par la suite, leurs chemins se sont séparés. Entre 2014 et 2017, Leclerc a suivi le parcours classique par les Formules de promotion (Formule Renault, Formule 3, GP3 Series, Formule 2), Max est passé directement des F3 en 2014 à la F1 en 2015, chez Toro Rosso (désormais AlphaTauri).

Quand le Monégasque l’y a rejoint en 2018, chez Alfa Romeo, le Néerlandais était déjà triple vainqueur de GP. Il a fallu attendre la promotion de Leclerc chez Ferrari la saison suivante pour les voir s’affronter au sommet.

GP d’Autriche 2019, deux tours à boucler, virage N.3 : Verstappen, fidèle à son agressivité naturelle, attaque Leclerc, ils se touchent, le pilote Red Bull remporte le duel et la victoire.

L’incident aurait-il mérité d’être pénalisé ? En tout cas, il a changé l’approche du pilote Ferrari, qui a compris qu’il pouvait être lui aussi plus agressif.

« Des courses engagées »

« Pour revenir à l’Autriche 2019, j’étais un peu en colère après la course parce que ce qui était autorisé n’était pas clair », a-t-il de nouveau raconté la semaine dernière. « Maintenant, c’est clair et c’est ce que nous les pilotes voulons : des courses engagées. »

Ses deux premiers succès en F1 ont suivi en Belgique et en Italie la même année, avant deux ans de disette pour la Scuderia puis, enfin, une troisième victoire à Bahreïn cette année. Entre temps, Verstappen, lui, a décroché son premier titre mondial l’an dernier.

En difficulté en 2020 après une polémique sur la légalité de son moteur, Ferrari a sacrifié 2021 pour développer la meilleure voiture possible en vue du changement de règlement technique début 2022.

Le pari est payant. Leclerc mène le classement des pilotes avec 45 points, contre 33 à son équipier espagnol Carlos Sainz Jr, 2e, et 25 à Verstappen, 3e. Chez les constructeurs, Ferrari, leader avec 78 points, est devant Red Bull, 3e avec 37 unités, la faute au double abandon de Verstappen et de son équipier Sergio Pérez lors de la manche inaugurale.

Quant aux 38 unités de Mercedes, 2e, qu’elles ne trompent pas : l’écurie octuple championne du monde en titre a profité des déboires de Red Bull à Bahreïn, mais elle peine à dompter sa monoplace, qui manque d’adhérence et de vitesse de pointe quand elle ne rebondit pas de manière incontrôlée.

Personne ne doute toutefois que les hommes de Toto Wolff finissent par y parvenir. Il est permis d’espérer que le vétéran Lewis Hamilton, en quête d’un huitième titre mondial historique à 37 ans, vienne ensuite arbitrer le duel entre ses cadets, âgés de 24 ans.