Pour Lance Stroll, le Grand Prix du Canada ne pouvait survenir à un meilleur moment.Incapable de défendre ses chances jusqu'ici cette saison, le pilote de l'équipe Williams a connu la semaine dernière un week-end particulièrement désastreux à Monaco.

Il revient toutefois cette semaine disputer à nouveau un Grand Prix où il estime avoir vécu l'année dernière « l'un des plus beaux jours » de sa vie. Le pilote de 19 ans avait alors terminé au neuvième rang, marquant ainsi ses premiers points au Championnat du monde des pilotes de F1.

« J'ai tellement de beaux souvenirs de cette journée », a-t-il confié récemment, en entrevue à Monaco. « Je me souviens particulièrement du tour d'honneur, après la course, alors que j'entendais clairement à travers mon casque les cris et les applaudissements des spectateurs debout dans les gradins. J'avais sauté dans la foule pour partager cette joie et cela avait vraiment été magique.

« Je me souviens aussi du retour à la maison. Tous mes proches avaient déjà quitté le circuit, j'étais seul dans ma voiture, c'était une merveilleuse journée et je roulais dans les rues que je connaissais bien, près de l'école que j'avais fréquentée.

« Et je venais de disputer le Grand Prix du Canada, de marquer mes premiers points au Championnat, c'était vraiment très émouvant de penser à tout ça. »

- Lance Stroll

« Je suis encore jeune et je ne suis habituellement pas de ceux qui prennent le temps de "sentir les roses" ou d'écouter les compliments. Mais cette journée-là, à Montréal, j'ai pris le temps d'apprécier le chemin parcouru. »

Même s'il n'a que 19 ans, Stroll a déjà une longue carrière derrière lui. Il a glané plusieurs titres avant l'âge de 10 ans et aime rappeler : « J'ai remporté tous les championnats auxquels j'ai participé », quand des journalistes lui reprochent d'avoir "acheté" sa place en F1 grâce à l'argent de son père.

Pas dans le coup cette année

Cette saison toutefois, Stroll n'est pas dans le coup. « La voiture n'est tout simplement pas compétitive », explique-t-il, quand on l'interroge sur ses insuccès. « Il faut travailler sur toutes les composantes de la voiture afin d'améliorer le package et d'être en mesure de nous battre à nouveau pour les points, mais ça prend du temps.

« C'est sûr que nous ne sommes pas où nous voudrions être, mais je fais tout ce qui est en mes moyens pour améliorer la voiture et j'ai bien l'intention de continuer à travailler ainsi tout au long de la saison. »

Souvent mal placé sur la grille de départ, le Canadien réussit habituellement d'excellents départs, avant de voir ses concurrents profiter des faiblesses de sa Williams pour le doubler en cours d'épreuve. Sa frustration est évidente et il ne se fait visiblement pas d'illusions sur ses chances à court terme.

Claire Williams, la directrice assure néanmoins qu'elle est très satisfaite du travail de son pilote. « Il [Stroll] a travaillé avec beaucoup de rigueur afin d'améliorer les points qu'il devait corriger », a-t-elle estimé en entrevue à Monaco. 

« Il subit beaucoup de pression, reçoit des critiques qui ne sont pas méritées et je crois qu'il démontre une maturité extraordinaire en composant avec tout cela. »

- Claire Williams, directrice de l'équipe Williams

« Je suis très fière du travail qu'il a effectué pour nous et j'espère que nous pourrons bientôt lui confier une voiture qui lui permettra de montrer tout son potentiel. Je crois sincèrement qu'il a une belle carrière devant lui en F1. »

Stroll et Williams ont estimé qu'il était trop tôt pour évoquer la saison prochaine, mais la directrice a souligné : « Nous ne parlons pas encore de contrat, mais nous estimons que Lance a été à la hauteur des attentes pour nous jusqu'ici et les équipes n'aiment pas se séparer sans raison des pilotes qui le font. »

Le circuit Gilles-Villeneuve convient habituellement aux Williams, mais la FW41 de cette saison est imprévisible. Claire Williams explique que l'équipe introduira des nouveautés à Montréal, un nouveau moteur notamment, qui pourraient aider les pilotes à progresser un peu dans la hiérarchie. D'autres modifications plus importantes devraient apparaître à la fin juin, en Autriche ou en Grande-Bretagne.

« En principe, nous pourrions être avantagés par notre moteur, mais je préfère attendre d'être à Montréal pour me prononcer, avertit Stroll. Jusqu'ici cette saison, nous avons parfois progressé, parfois régressé par rapport aux autres équipes. J'espère que le prochain pas sera positif. »

Un père milliardaire

Lawrence Stroll est propriétaire du circuit Mont-Tremblant, mais il a fait sa fortune (2,08 milliards au début de l'année) grâce à des investissements dans des entreprises comme Ralph Lauren, Tommy Hilfiger et surtout Michael Kors.

Il a évidemment soutenu son fils tout au long de sa jeune carrière, achetant notamment de l'espace publicitaire sur les Williams, pour ensuite le revendre aux entreprises canadiennes JCB, Canada Life et Bombardier. Le père de Stroll a aussi investi plusieurs millions dans un ambitieux programme « secret » d'essais, en 2016, qui a permis à Lance de piloter une Williams de 2014 sur des circuits comme Silverstone, Hungaroring, Monza, Catalunya ou Austin.

Le pilote de 19 ans n'a jamais renié ses origines. « Je suis né avec de l'argent, je ne le cache pas », avait-il soutenu en novembre 2016 quand Williams avait confirmé sa venue avec l'équipe. « La course automobile est un sport où l'argent est important et je suis heureux que mon père soit là pour m'aider. »

Un parcours programmé

Lance Stroll a appris à piloter à l'âge de 5 ans dans un stationnement du circuit Mont-Tremblant, dans les Laurentides. Il s'est vite mis au karting et a progressé rapidement vers les premiers rangs.

Après plusieurs championnats en Amérique du Nord, il a été intégré à 11 ans à l'Académie des pilotes Ferrari, un programme de développement pour les jeunes pilotes. Il s'est ainsi retrouvé deux ans plus tard en Italie pour débuter en monoplace, remportant d'entrée le championnat national de Formule 4 en 2014.

Après un détour en Nouvelle-Zélande la saison suivante - champion en série Toyota -, il s'est concentré sur le Championnat européen de Formule 3 en 2016 et a complètement dominé la saison avec 14 victoires et 14 positions de tête. C'est ce titre qui lui a procuré la « super licence » de la FIA, obligatoire en F1, et qui lui a permis d'être embauché chez Williams pour faire ses débuts en Grand Prix en 2017.

Quand des journalistes reprochent à Stroll d'avoir « acheté » sa place en F1 grâce à l'argent de son père, il réplique souvent : « J'ai remporté tous les championnats auxquels j'ai participé, je pense avoir prouvé que j'avais ma place ! »

Lance Stroll en bref

Canadien, 19 ans

Né à Montréal, le 29 octobre 1998

1,80 m, 70 kg

Revenus en 2018 : environ 1,8 million

Site internet : https://lancestroll.com/

Débuts en F1 : 2017, chez Williams

Grands Prix : 26

Podiums : 1

Points : 44