La très jeune équipe canadienne de water-polo a passé la dernière semaine à Montréal dans le cadre d'un camp d'entraînement avec l'Espagne. Après un match amical, remporté 8-7 par le Canada hier soir au centre Claude-Robillard, les deux équipes s'envolent ce matin pour Calgary, où le camp se poursuivra. La Presse en profite pour vous présenter l'un des plus beaux espoirs du water-polo canadien, le Québécois Nicolas Constantin-Bicari.

En 32 ans de carrière au club CAMO, l'entraîneur Robert Couillard en a vu passer des joueurs de water-polo. Peu l'ont impressionné autant que Nicolas Constantin-Bicari.

«Au hockey, des Wayne Gretzky, il n'y en pas eu beaucoup. Au polo, des Nicolas Constantin-Bicari non plus», dit M.Couillard, rencontré hier matin à la piscine du Parc olympique, où l'équipe canadienne de water-polo peaufinait sa préparation en vue d'un match amical contre l'Espagne disputé en soirée au centre sportif Claude-Robillard.

Centralisée à Calgary depuis plusieurs années, l'équipe masculine fait peu parler d'elle au Québec. Elle est pourtant en pleine émergence. Il y a d'abord eu cette qualification historique pour les derniers Jeux olympiques de Pékin, où le Canada s'est classé 11e. Puis cette participation aux quarts de finale des Mondiaux de Rome, où la troupe du Serbe Dragan Jovanovic a été arrêtée par l'Espagne, future médaillée d'argent.

Si l'Espagne est ici cette semaine, ce n'est pas hasard. Le Canada est désormais un joueur majeur sur l'échiquier du water-polo mondial. La Serbie et l'Italie sont aussi venues s'entraîner au Canada l'an dernier.

Quand on parcourt la feuille des partants du Canada, la jeunesse de l'équipe est frappante. La majorité des joueurs sont nés en 1991 ou 1992, comme Constantin-Bicari, qui a 19 ans.

«On a une génération vraiment solide, dit l'athlète originaire de Repentigny. Parmi ceux qui sont nés en 1991, il y a en trois qui sont de l'alignement partant. Dans le monde, la moyenne d'âge des équipes se situe à 27 ans environ. Le but de notre équipe est de se qualifier pour les Olympiques aux Jeux panaméricains au Mexique, en octobre prochain. À long terme, on vise un podium aux Jeux olympiques de 2016.»

À Calgary, Constantin-Bicari partage une maison avec quatre coéquipiers québécois, Dusko Dakic, Dusan Aleksic, Luka Gasic et Jovan Dabic. Comme leur patronyme l'indique, ces joueurs sont issus de familles qui ont émigré de l'ex-Yougolavie, où le water-polo est roi, durant les années 90.

À 1m92 et 104kg, Constantin-Bicari aurait sans doute fait saliver bien des dépisteurs s'il s'était adonné au hockey. Mais le water-polo a toujours été sa passion. «C'est une affaire de famille», dit-il.

Sa tante était coordonnatrice d'une piscine à Pointe-aux-Trembles. Ses cousins y pratiquaient le water-polo. Nicolas a commencé quand il avait 5 ans. «On a été jusqu'à huit cousins qui jouaient», calcule-t-il. Jusqu'à tout récemment, son cousin Mathieu Constantin faisait partie du programme national à Calgary.

Constantin-Bicari attribue une large part de ses succès à Robert Couillard, qui l'a dirigé pendant trois ans à CAMO et au centre national de développement de Montréal.

Ce dernier a remarqué Nicolas quand il avait 10 au 11 ans. Il tournait autour de son entraîneur pour pouvoir sauter à l'eau. «Quand il s'est fait dire non, il était tout déçu. Ça m'avait marqué», raconte M.Couillard.

À l'entraînement, Constantin-Bicari était toujours le premier joueur à sauter à l'eau. M.Couillard se souvient d'être arrivé à la piscine olympique à 6h et d'y voir Nicolas pratiquer ses lancers. «C'est un gars qui adore l'eau», résume l'entraîneur.

«La magie»

Il y a donc cette passion. Et un talent naturel. «C'est ce que le monde me dit», constate Constantin-Bicari, qui joue à la position clé de centre-avant. «Il est vraiment exceptionnel, acquiesce M.Couillard. Il n'est pas le plus rapide, mais il est un des gars avec les mains les plus habiles que j'ai vus. Il a aussi une excellente vision du jeu.»

Ahmed El-Awadi, directeur général de Water-Polo Canada, renchérit: «Nicolas a un don, il a la magie. Dans l'eau, il fait des choses avec le ballon qui ne s'enseignent pas. Il est un des meilleurs joueurs au monde de son âge.»

Constantin-Bicari a été rapidement plongé dans le feu de l'action. Une blessure au vétéran Nathaniel Miller, aujourd'hui retraité, lui a permis de participer à tous les matchs des Mondiaux de Rome, en 2009. À 17 ans, il était le plus jeune joueur du tournoi.

Son plus beau souvenir est cependant une victoire de 9-8 en deuxième prolongation contre les Américains en finale des Championnats panaméricains juniors de 2010, à Miami. Constantin-Bicari avait inscrit trois buts et son ami Omar Touni, de Montréal, avait marqué le but gagnant.

Constantin-Bicari a refusé une offre de la prestigieuse université USC pour aller s'installer à Calgary en septembre. Il préférait continuer à se développer sous la gouverne de l'exigeant Jovanovic. «Après 2012, je veux me trouver une place avec une équipe en Europe», lance-t-il avec conviction. Il paraît que les offres seront nombreuses.