Comme prévu, Marc Lièvremont, le sélectionneur du XV de France, a reconduit dans son intégralité l'équipe qui a péniblement éliminé le Pays de Galles le week-end dernier pour défendre les chances françaises en finale de la Coupe du monde de rugby, dimanche soir à Auckland, face à la Nouvelle-Zélande.

Samedi dernier, la France s'est hissée en finale en battant 9-8 une formation galloise courageuse et inspirée, mais réduite à 14 pendant une heure après l'expulsion de son capitaine Sam Warburton. Pour autant, Lièvremont estime que les quinze titulaires alignés face au Pays de Galles peuvent réaliser l'exploit de battre le pays hôte du tournoi pour offrir à la France son premier titre mondial, après deux finales perdues en 1987 et 1999.

«Je n'ai pas vraiment eu d'hésitation. C'était pour moi assez clair», a déclaré Lièvremont en commentant son choix, mercredi. «Je crois dans les chances de mon équipe. Elle peut donner le meilleur d'elle-même et gagner.»

Pendant que la France a paru vaciller sur ses bases contre les Gallois, la Nouvelle-Zélande a fait une démonstration de force pour éliminer, dimanche, son grand rival australien (20-6) et se présenter en finale en favori inarrêtable.

«C'est souvent la même chose avec les Néo-Zélandais. Ils ont fait une première mi-temps impressionnante de maîtrise et d'agressivité. La deuxième mi-temps a été moins aboutie, mais ils n'ont pas laissé la moindre chance aux Australiens de revenir au score», a commenté Lièvremont.

Le sélectionneur en a assez des comparaisons entre le jeu des Français, assez pauvre depuis le début du Mondial, et celui jugé éblouissant et efficace des All Blacks. Il l'a répété: le seul objectif est de remporter le trophée.

«Je le redis, c'est une finale, si on doit gagner de la même manière que face au Pays de Galles, je l'accepterai sans complexe et avec grand plaisir.»

Les joueurs sont aussi agacés par les critiques et ne se sentent pas soutenus. Ils n'ont pas non plus apprécié d'être traités «d'enfants gâtés et désobéissants» par leur entraîneur au lendemain de la victoire sur les Gallois, car certains avaient enfreint la consigne les enjoignant de ne pas sortir fêter la qualification.

«C'est un peu tout le monde qui nous attaque. Il y a une part de vérité et des choses amplifiées, mais c'est vrai que quand on est un peu sensibles, on écoute ce qui se passe à droite ou à gauche, a reconnu le centre Maxime Mermoz. On se rend compte que des mots très forts sont utilisés parfois, et ça peut être blessant.»

Lièvremont voulait responsabiliser son groupe. Il a, sans doute, réussi au-delà de ses espérances et pense déjà qu'il n'aura nul besoin de muscler son discours d'avant-match pour motiver ses troupes.

«Je ne suis pas quelqu'un qui rêve trop, j'ai plutôt les pieds sur terre, mais là, jouer les All Blacks en finale de Coupe du monde à l'Eden Park, c'est un sommet. Mais je n'ai rien préparé, car je suis quelqu'un de spontané.»

La France est la première nation de l'histoire de la Coupe du monde à conserver la même équipe dans trois matchs éliminatoires de suite. Lièvremont a utilisé un quinze de départ identique face à l'Angleterre en quart de finale, puis face aux Gallois.

Morgan Parra, rétabli de l'entorse cervicale dont il a été victime face au Pays de Galles, connaîtra sa cinquième titularisation au poste de demi d'ouverture, encore nouveau pour lui. Il sera encore associé à Dimitri Yachvili pour former la charnière.

Si aucun changement n'est intervenu dans l'équipe de départ, il pourrait en être autrement parmi les remplaçants. Lièvremont a en tout cas repoussé à vendredi l'annonce de la composition du banc de touche.

Lièvremont aura connu un destin hors du commun. Il a terminé sa carrière de joueur lors de la finale mondiale perdue par les Tricolores en 1999 et terminera celle de sélectionneur français dimanche soir. Mais il préfère éviter les comparaisons.

«Je l'ai dit, c'est difficile de comparer les deux vécus. Je sais juste que ça se joue souvent sur des détails et j'espère que ce sera le cas dimanche et que ce ne sera pas la déroute annoncée», a-t-il expliqué.

Lièvremont rejette aussi les critiques l'accusant de tourner le dos à l'héritage du rugby français et au «french flair» qui aurait guidé les pas des générations précédentes.

«Je crois que pas mal de gens souffrent de troubles de la mémoire, a-t-il lancé. En 1999, à part en demi-finale, le «french flair» était absent: je le sais, j'y étais. En 2007, pareil. En 1995, on arrache un match nul contre l'Écosse dans les dernières minutes. Et même en 1987, il s'en faut d'un en-avant des Fidjiens en quart pour qu'on passe en demi-finale. L'histoire du rugby français, même si cela déplaît à certains, est faite de hauts et de bas. Certains matchs, nous ne sommes pas bons et gagnons grâce à notre courage, comme la semaine dernière.»

Photo: Christophe Ena, AP

Le sélectionneur en a assez des comparaisons entre le jeu des Français, assez pauvre depuis le début du Mondial, et celui jugé éblouissant et efficace des All Blacks (notre photo).