« C’est difficile d’être ce que tu ne peux pas voir. » Annie Guglia a la diversité à cœur. Un petit tour sur ses réseaux sociaux, et on comprend rapidement l’importance de cet enjeu chez la planchiste professionnelle.

Ça va bien au-delà de sa conversation virtuelle avec La Presse à ce sujet. Ou du contexte actuel du mois de la Fierté. Ses publications Instagram sont remplies de témoignages et d’émojis aux couleurs de l’arc-en-ciel. Elle affiche d’ailleurs très fièrement son grand amour avec sa conjointe, Luisa Fernanda.

Qui plus est, la Montréalaise travaille dans l’équipe marketing de Vans pour promouvoir, justement, l’inclusion et la diversité.

« Ma job avec Vans, entre autres, c’est d’aller appuyer des évènements pour les personnes queers, pour les femmes, pour les jeunes autochtones, pour la communauté neuro-diversifiée, pour les malvoyants, énumère Annie Guglia. On aide plein de groupes comme ça. Et je trouve ça tellement beau de voir [cette facette du skate], qui est souvent perçue d’une façon tellement limitée. »

Guglia, qui a participé aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021, se réjouit des récentes avancées à ce chapitre au sein de la communauté globale de la planche à roulettes.

« Il y a cinq ans, tu ouvrais un magazine de skate, et c’était juste des dudes, raconte-t-elle. Parfois, ils vont mettre une fille. Peut-être. C’est rare. Et pourtant, des filles, il y en a plus qu’une sur la terre qui skate.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Annie Guglia aux Jeux olympiques de Tokyo

« En ce moment, il y a une grosse scène de skate queer qui est en train de se former. On voit les premiers films de skate queer. Ce sont des compagnies de skate qui vont commanditer des femmes et des hommes trans. C’est cool de voir que ça crée une nouvelle scène. »

Une « belle communauté », malgré quelques accrocs

Tout est une question de « visibilité », selon Annie Guglia.

Si on rend visible quelqu’un de super bon et inspirant, ça va en inspirer d’autres à le faire. Alors qu’habituellement, quand on fait partie de la majorité, on a tendance à voir l’inverse. On se dit : “Ah, il n’y a pas beaucoup de femmes noires trans qui font du skate”, alors on les ignore. Alors que, crime, si tu faisais l’inverse…

Annie Guglia

Elle cite en l’occurrence la montée fulgurante en popularité d’Arin, jeune femme noire trans « hyper bonne ».

« Elle a commencé à publier sur les réseaux sociaux, puis des entreprises l’ont mise de l’avant. Ça a créé tout un engouement et inspiré plein de gens queers de partout dans le monde à commencer à faire du skate. C’est comme ça que ça devrait fonctionner. »

Mais tout n’est pas parfait encore.

« Je me disais que dans le skate, on est bons, lance Annie Guglia. On est inclusifs. Ça fait longtemps qu’on en parle. Et finalement, on a eu notre scandale, nous autres aussi. »

Il y a notamment eu la sortie de la planchiste de 27 ans Taylor Silverman, du Michigan. Elle a dénoncé sur Instagram en mai le fait que des femmes trans avaient gagné des compétitions et des prix « destinés aux athlètes féminines ».

« J’ai participé à trois compétitions différentes avec des femmes trans, a-t-elle écrit. J’ai obtenu la deuxième position dans deux de ces évènements. […] Je méritais de terminer première. Je méritais que ma victoire soit reconnue. Et d’être payée. »

Les nombreux commentaires au bas de sa publication vont des deux côtés.

« Il y a toujours du monde qui ne sera pas d’accord avec tes valeurs, peu importe », relativise Annie Guglia.

La Montréalaise de 31 ans veut « utiliser sa plateforme » pour montrer que « le skate, c’est pour tout le monde ».

« On a l’impression qu’il faut que tu sois casse-cou pour faire du skate. Ou être un gars, un ado plein de testostérone qui va se lancer en bas des marches. »

Mais le skate, c’est tellement plus grand que ça. C’est une super belle communauté.

Annie Guglia

« Je reviens aux sources »

Annie Guglia ne participera pas au prochain cycle olympique, elle qui s’était rendue à Tokyo à la toute dernière minute après que des blessures et des cas de COVID-19 lui eurent ouvert la porte. Ce qui ne veut pas dire qu’elle prend sa retraite pour autant. Elle sera d’ailleurs du prochain festival Jackalope sur l’esplanade du Parc olympique, en août.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Annie Guglia aux Jeux olympiques de Tokyo

« Ça fait 20 ans que je fais du skate, rappelle-t-elle. Les Jeux olympiques, ça fait 4 ans [que la discipline existe]. Je vais continuer à en faire. »

Elle estime même qu’elle pratique son sport « autant, sinon plus », que quand elle s’entraînait.

« Ça ne change rien pour mon quotidien. La seule différence, c’est que je ne m’arrange pas pour être au paroxysme de ma forme à certains moments. C’est beaucoup moins structuré. […] Si une journée, ça me tente de me pousser, ça me tente. Sinon, ce n’est pas grave. »

Elle ne fera crisser ses roulettes sur l’asphalte « que pour le plaisir », maintenant.

« Je reviens aux sources. »