Aurélie Rivard et Nicolas-Guy Turbide sont tous les deux devenus champions du monde au cours des derniers jours. Une réalisation hors norme qui s’ajoute à la longue liste d’exploits qu’ils ont déjà accomplis. Parmi eux, réussir sur les bancs d’école.

Les deux nageurs étaient tout sourire avant de prendre l’avion pour le Portugal. Non seulement parce qu’ils s’apprêtaient à participer aux Championnats du monde de paranatation, mais aussi parce qu’une sorte de pression était retombée depuis la fin des Jeux paralympiques de Tokyo, il y a moins d’un an. Cette légèreté n’est pas attribuable qu’au fait que les deux athlètes ont ramené des médailles à la maison et que la majorité des restrictions en lien avec la pandémie se sont estompées. C’est surtout parce qu’ils sont parvenus à trouver un équilibre.

Chose qui leur fait bien, si on se fie à leurs résultats au Portugal. Aurélie Rivard, abonnée du podium depuis plus d’une dizaine d’années, a remporté l’or aux épreuves du 50 m et du 100 m libre. Son ami Nicolas-Guy Turbide est lui aussi monté sur la première marche du podium, au 100 m dos.

Au-delà de leurs performances dans l’eau, les deux nageurs ont aussi le sentiment de mieux réussir dans un tas d’autres aspects de leur vie. La natation, c’est leur vie, mais ce ne se sera plus toute leur vie d’ici peu.

Rivard, 26 ans, et Turbide, 25 ans, ont confirmé qu’ils entendaient participer aux Jeux de Paris, en 2024. Entre-temps, ils devront aussi à commencer à préparer l’après. Ce que plusieurs athlètes redoutent, mais que les deux acolytes embrassent de plus en plus.

Il s’agira en fait de devenir compétitifs ailleurs que dans la piscine. Pour le moment, ça se passe sur les bancs d’école et ils y parviennent très bien.

Le lendemain de mon retour de Tokyo, je suis retourné sur les bancs d’école. C’était l’un de mes objectifs. Je veux finir mon baccalauréat le plus vite possible. En ce moment, mon gros objectif est là et c’est parfait, parce que ça me fait performer autant dans l’eau que sur les bancs d’école.

Nicolas-Guy Turbide, étudiant en administration avec concentration en planification financière à l’Université Laval

« Équilibre ! », a lancé Rivard en direct de leur chambre d’hôtel en Angleterre.

Son colocataire le confirme, l’équilibre est la clé. Sa dernière session a d’ailleurs été la meilleure de sa vie en matière de résultats scolaires. Les efforts de Turbide ont été remarqués, puisqu’il a reçu au mois de mai une bourse de 4000 $ de la part de la Fondation de l’Athlète d’excellence. « À un moment donné, tu te rends compte que si tu performes dans quelque chose, tu ne pourras pas t’engager dans quelque chose d’autre et ne pas donner ton 100 %, c’est impossible. »

Chacun son rythme

Le retour en classe n’a pas été aussi fulgurant pour Rivard à son retour du Japon, où elle avait gagné cinq médailles paralympiques.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Aurélie Rivard

L’étudiante en droit à l’Université Laval a pris du temps pour elle, question de bien absorber ce qui venait de se passer et pour bien réfléchir à ce qui allait arriver. Elle a retrouvé son rythme au début du mois de janvier, au moment où elle en ressentait le besoin.

L’idée est d’atteindre un équilibre à l’extérieur de la piscine et ne pas mettre tous mes œufs dans le même panier. Rendu à notre âge, c’est ça qui marche le mieux.

Aurélie Rivard, étudiante en droit à l’Université Laval

Cette période entre septembre 2021 et janvier 2022 a été remplie de questionnements pour celle qui est aujourd’hui considérée comme l’une des meilleures nageuses paralympiques de l’histoire. Le dernier cycle paralympique a été ardu et éprouvant pour tous les athlètes. Elle est heureuse, a posteriori, de constater que cette pause de quelques mois n’a pas eu d’impact négatif sur sa relation avec la natation. « Je devais m’éloigner un petit peu de la natation et revenir avec d’autres objectifs. »

Ce retour en classe a énormément servi les deux athlètes. « Ce qui m’a fasciné, c’est que ça nous remet les pieds à terre », a lancé Turbide à la fin de la conversation.

« On apprend autant de choses que les gens assis à côté de nous dans la classe. On n’est pas au top de la classe, donc il faut trouver un moyen de se démarquer. Ça me ramène à quand je voulais être le meilleur dans mon sport quand j’avais 16-17 ans. Ça fait juste du bien, c’est rafraîchissant. Il y en a qui voient l’école comme une corvée, moi, je la vois comme une compétition. »

Une compétition qui force ces deux athlètes à se dépasser à bien des égards. Leur succès s’est toujours mesuré à travers leurs performances dans la piscine, mais plus maintenant. Aujourd’hui, il y a plus. Peut-être mieux.