Chaque semaine, les journalistes des sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence

Mathias Brunet

L’échange a finalement été profitable au Canadien après quelques années. P. K. Subban a aidé les Predators de Nashville en 2017, Shea Weber l’a fait à son tour avec le CH en 2021. L’arrivée de Weber a contribué à instaurer une nouvelle culture chez le Canadien et son leadership a entraîné plusieurs joueurs dans son sillon. Je m’ennuie néanmoins de la personnalité de Subban, sa luminosité, sa créativité sur la glace et son explosivité sur patins (qui n’était pas sans me rappeler celle d’un certain Chris Chelios), sa luminosité à l’extérieur de la patinoire. Je regrette aussi son impact formidable sur les jeunes membres de la communauté noire, qui ont finalement embrassé le hockey mineur à Montréal, et dont l’ascension se poursuit aujourd’hui. Subban a constitué un modèle positif pour eux. Ces jeunes avaient enfin un hockeyeur vedette en qui se reconnaître au Québec. Weber a un pied dans la retraite, le corps usé par les mises en échec, les tirs bloqués et le régime de spartiate imposé aux joueurs de la Ligue nationale. Subban a déjà été échangé par les Predators il y a quelques années pour alléger leur masse salariale, et il poursuit sa carrière au New Jersey, avec plus ou moins de succès, mais nettement moins de vitesse. L’échange a été profitable au CH. Je m’ennuie néanmoins de ce P. K. des premières années à Montréal, ce formidable guerrier en séries éliminatoires en 2014, ce gagnant du trophée Norris après une saison (écourtée) de 38 points en 42 matchs, celui qui a fait tomber tout le monde sous son charme.

Miguel Bujold

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Tyrell Sutton

Jusqu’à cette saison, John Bowman était le dernier joueur qui faisait encore partie des Alouettes et qui était dans le club lorsque j’ai commencé à le couvrir, il y a 15 ans. Son départ a laissé un vide. Luc Brodeur-Jourdain ne joue plus, lui non plus, mais il est encore là à titre d’entraîneur. J’opte donc pour Tyrell Sutton. Le porteur de ballon nous donnait toujours l’heure juste et il n’y avait jamais d’hypocrisie avec lui. Pas de superficialité, non plus, c’est le contenu qui comptait, pas le contenant. À une époque où les gens connaissent de plus en plus de choses en surface, mais de moins en moins en profondeur, Sutton était rafraîchissant. J’aimais particulièrement jaser de politique américaine avec lui. Ses opinions étaient fortes et il ne craignait pas de les exprimer haut et fort, sûrement parce qu’il savait de quoi il parlait. Sutton aurait d’ailleurs fait un très bon chroniqueur… Le porteur de ballon était également un excellent leader. Il était franc et authentique, et ne se laissait influencer par personne. Il ne passait jamais par quatre chemins ou par la bande pour passer ses messages. Toujours droit au but. Pour ceux qui l’ont vu jouer, sa personnalité ressemblait beaucoup à son jeu. Un vrai de vrai.

Simon Drouin

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Vladimir Guerrero

Vladimir Guerrero. J’ai encore souvenir de ses premières présences au bâton avec les Expos. Sans gants. Une dégaine pas possible. Swinguant tout ce qui bougeait. Même ses relais du champ droit étaient du pur spectacle. En 2003, j’ai eu la chance inouïe de le couvrir à sa dernière saison à Montréal. Il ne parlait pas aux journalistes, mais il continuait de frapper (moyenne de,330 !), même ennuyé par une blessure. L’« animal », l’avais-je qualifié dans une analyse de match. Il était à deux circuits près du record d’Andre Dawson, qu’il avait dépassé un peu plus tard lors d’une rencontre à Los Angeles. Il a signé avec les Angels à l’entre-saison, un an avant le départ définitif des Expos. Junior a pris le flambeau, mais ce n’est pas pareil, surtout pas avec les Blue Jays.

Frédérick Duchesneau

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Didier Drogba

Comment ne pas s’ennuyer de Didier Drogba ? Quand la légende ivoirienne est débarquée au Québec, le soccer d’ici a basculé dans une autre catégorie. En d’autres mots, Montréal était plus que jamais sur la map du ballon rond. Et puis, ça s’est confirmé sur le terrain, avec 23 buts en 41 matchs, dont quelques-uns exceptionnels. Un passage bref mais inoubliable pour le sport professionnel montréalais.

Guillaume Lefrançois

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Daniel Brière

Daniel Brière a seulement passé un an à Montréal, mais quelle année ce fut ! En saison, la réticence de Michel Therrien à l’employer nous avait donné du matériel pour quelques articles. Et en séries, malgré un temps d’utilisation famélique, Brière avait trouvé le moyen de faire ce qu’il a toujours fait, c’est-à-dire connaître du succès offensivement. Son match d’un but et une passe dans le septième match contre les Bruins demeure son plus grand héritage au Canadien. Ça, c’est sur la patinoire. Dans le vestiaire, Brière était une valeur sûre pour les journalistes, un joueur d’une grande générosité même s’il devait beaucoup trop souvent parler de sujets gênants comme, justement, son utilisation. S’il nous trouvait impertinents, il le cachait très bien ! La bonne nouvelle, c’est qu’il demeure tout aussi accessible depuis sa retraite. S’il manque un appel, il finira toujours par rappeler ou envoyer un message texte pour faire un suivi. Une courtoisie qui n’est pas donnée à tous.

Richard Labbé

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Pierre-Alexandre Parenteau

Pierre-Alexandre Parenteau n’aura pas été ici bien longtemps, mais le bon P-A aura été une mine d’or pour nous, les valeureux chevaliers de l’information. Ceux qui détestent les clichés et les formules toutes faites ont été servis à souhait par Parenteau, qui était très vieille école : lui, il disait ce qui lui passait par la tête, point. Ainsi, je me souviens de sa flèche décochée à l’endroit de Patrick Roy avant un match contre l’Avalanche (« C’est pas comme s’il avait inventé le hockey ! ») et de sa bonne humeur au moment d’accepter une offre des Maple Leafs (« Ça va faire du bien de jouer pour un coach qui me veut ! »), une autre flèche, celle-là à l’endroit de son entraîneur précédent, Michel Therrien. Tout ce qu’il nous faut, c’est un peu plus de Pierre-Alexandre Parenteau dans nos vies.

Jean-François Tremblay

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Max Pacioretty

Je m’ennuie de Max Pacioretty. C’était, oui, un joueur au talent supérieur lors de ses années à Montréal, mais c’est d’un autre aspect de sa personnalité que je m’ennuie. Pacioretty a été capitaine du Canadien durant des saisons de misère. Comme journaliste affecté au Canadien, c’était parfois difficile de traverser les derniers mois de la saison. Au fond, il existe combien de manières de demander : « Pourquoi vous avez perdu ? » Ç’aurait été simple de se cacher. Pacioretty était pourtant toujours dans le vestiaire, matin, soir, toujours. Il répondait à toutes les questions. Il n’était pas souvent de bonne humeur, la discussion brassait parfois, mais il était toujours là. Vers la fin de sa dernière saison à Montréal, quand le divorce semblait prononcé, je lui avais demandé ce qu’il espérait avoir laissé comme marque chez le Canadien. Il m’avait répondu qu’il espérait que les gens se souviendraient qu’il était toujours présent pour faire face à ses responsabilités, même au plus creux d’une série de défaites. Pacioretty n’a pas été le plus sympathique ni le plus flamboyant, certainement pas le meilleur capitaine, mais il était toujours debout à son casier à attendre les journalistes. Respect.