Une journée entière, à deux heures près. C’est le temps qu’a retranché Martine Marois à son Tor des Géants cette année par rapport au précédent, il y a deux ans.

Lundi, elle était déjà de retour à la maison, à Saint-Amable, quatre jours après avoir franchi la ligne d’arrivée de l’épreuve d’endurance de 330 km et 24 000 m de dénivelé positif dans les Alpes italiennes. Son temps : 122 h 34 min. En 2019, elle avait mis 144 h à réaliser le parcours. Des chiffres à donner le vertige.

Chez les femmes, elle a pris le 14rang, l’Espagnole Silvia Trigueros ayant triomphé en 89 h 57 min.

Par ailleurs, Martine Marois a eu le meilleur sur les quatre hommes du Québec présents au Tor des Géants. Ce qui, de toute évidence, l’a bien amusée !

PHOTO FOURNIE PAR YVAN L’HEUREUX

Martine Marois au Tor des Géants 2021

« Une force interne »

La Québécoise de 46 ans est une coureuse d’expérience. Elle s’est initiée à la course sur route il y a près de 20 ans, a fait des marathons, puis s’est tournée vers la course en sentier en 2014.

Son premier contact avec le Tor des Géants, en 2018, a néanmoins été très rude. Affamée et déshydratée – elle n’aura rien mangé ni bu pendant 24 heures –, la coureuse avait abandonné au 192e kilomètre.

Alors semi-consciente, elle se souvient vaguement d’avoir été évacuée sur le dos de deux guides de montagne italiens.

Pourtant, dès le lendemain, à son réveil dans un hôpital de la vallée d’Aoste, Martine Marois savait qu’il y aurait d’autres chapitres.

PHOTO FOURNIE PAR DANNY LANDRY

Martine Marois (à gauche) au Tor des Géants 2021

J’avais quelque chose qui me poussait vers cet évènement-là. Je ne savais pas quoi, mais c’était fort. Il fallait que je revienne.

Martine Marois

Pas de doute, pas de peur ? « Ah non, pas du tout », assure-t-elle.

C’était davantage qu’une piqûre. « Une force interne » l’attirait.

Elle s’est donc préparée différemment l’année suivante et a parcouru la distance en entier, avec son conjoint Danny Landry.

PHOTO FOURNIE PAR YVAN L’HEUREUX

Martine Marois (à droite) et son conjoint, Danny Landry

N’empêche, elle n’était pas encore rassasiée. Elle comptait revenir à la charge avec un objectif précis : combler la distance en moins de 130 heures, ce qui lui ouvrirait la porte du Tor des Glaciers, plus exigeant encore.

Grossir la « tinque à gaz »

« En dedans de moi, c’est fort. Je me comporte comme une athlète, mais j’ai toujours été la dernière et différente des autres sur la ligne de départ, tant dans l’habillement que physiquement, assume Martine Marois. Mais j’ai toujours persévéré. »

Pour atteindre son but, elle a fait appel à un entraîneur cette année : le coureur Éric Deshaies.

Quand elle lui a expliqué son objectif ultime, le Tor des Glaciers, il lui a répondu : « Martine, il faut grossir ta tinque à gaz, il faut grossir ton moteur. »

Pendant sa saison hiver-printemps, elle s’est ainsi astreinte à beaucoup d’entraînement en intervalles – sur le plat – et de spinning.

En côtoyant des sportifs de pointe, Martine Marois dit avoir découvert qu’elle était bel et bien une athlète – elle a longtemps affirmé que son âme se trouvait dans le mauvais corps –, mais qu’elle ne se préparait pas suffisamment bien dans le passé.

Dans l’impossibilité d’aller gravir la Whiteface Mountain de Lake Placid en raison de la pandémie – ce qu’elle faisait chaque week-end auparavant –, la coureuse s’est offert une compensation.

PHOTO FOURNIE PAR DANNY LANDRY

Martine Marois dans son élément

Je me suis payé le luxe d’aller m’entraîner dans les Alpes un mois et demi avant le Tor des Géants. Donc, c’est là que je suis allée chercher mon dénivelé.

Martine Marois

Débarquée à Courmayeur le 30 juillet, elle était « super inquiète » à son premier camp en altitude après avoir dû se contenter longtemps du plat relief québécois.

Son coach l’a rassurée en lui affirmant qu’elle était prête. De toute évidence, il avait raison.

Sa préparation et le fait que son conjoint allait pour la première fois lui servir d’« équipe de soutien » ont nettement facilité la course de Martine Marois.

Avec Danny qui pouvait la rejoindre en auto – aux ravitaillements ou aux bases de vie – pour lui donner de la nourriture, son sac était bien moins lourd que lors des deux éditions antérieures. Plus légère, donc plus rapide et moins fatiguée.

« Un game changer », affirme-t-elle.

Atteinte de la maladie cœliaque, la coureuse doit absolument apporter ses propres aliments.

« Je ne peux pas manger au resto ni aux bases de vie. »

Courses d’aventure

L’an prochain, Martine Marois prendra donc part au Tor des Glaciers : une bagatelle de 450 km et 32 000 m de dénivelé positif… Ses concurrents partent deux jours plus tôt que ceux du Tor des Géants et disposent de 190 heures pour relever le défi.

« C’est complètement autre chose. Il y a de l’orientation, ils sont beaucoup plus en altitude et ça prend des habiletés d’escalade parce qu’il y a beaucoup de via ferrata. Et des animaux font parfois débouler des roches », décrit-elle.

Un ami de ses amis l’a fait et a cru mourir, totalement vulnérable alors que des roches tombaient en sa direction.

« Il faut avoir la faculté de s’adapter au danger », indique la coureuse.

Elle s’intéresse également à la Petite Trotte à Léon (PTL), proposée dans le cadre du mythique Ultra-Trail du Mont-Blanc (UTMB). La distance et le dénivelé sont semblables à ceux du Tor des Géants, mais la PTL se déroule en équipe de trois.

À court terme, Martine Marois se dirige donc davantage vers des courses d’orientation et d’aventure.

« Mais je ne dis jamais non au Tor des Géants », conclut-elle en riant.

Consultez le site du Tor des Géants