(Milan) Le troisième jour de la Fashion week milanaise s’est achevé avec le spectacle très attendu de la marque italienne Versace qui a présenté sa première collection mixte homme-femme automne-hiver.  

Le glamour était au rendez-vous et les créations de Donatella Versace donnaient à voir sa mode sexy et forte, croisement entre la femme d’affaires et l’officier.  

Des vestes structurées cintrées, les jupes de jour au genou, contrastent avec le pied-de-poule et le tartan rouge. Les silhouettes des hommes en imposent. Les motifs animaliers semblent pixelisés, numérisés. Comme l’est d’ailleurs Donatella elle-même dont l’image est reproduite à l’infini en ouverture et en clôture du défilé.  

PHOTO ALESSANDRO GAROFALO, REUTERS

La marque avait pris soin de peaufiner ses décors et son podium pour être le plus « Instagramable » possible.  

Jennifer Lopez

En face des invités, des écrans géants diffusaient les images en miroir du public lui-même. Impossible de ne pas tomber dans la tentation narcissique de l’égoportrait, recette parfaite pour la course aux mots-clics et aux publications sur les réseaux sociaux.  

Lors de la dernière saison, en septembre, la présence surprise de l’actrice et chanteuse américaine Jennifer Lopez en star invitée sur le podium avait fait exploser les compteurs de réputation et de publications sur les réseaux sociaux de la marque qui a cumulé 3,7 millions d’interactions sur les cinq jours de Semaine de la Mode, avec un pic le jour du défilé.

Dans l’après-midi, la maison Marni avait transformé son podium en tanière du lapin d’Alice au Pays des Merveilles avec son créateur Francesco Risso affublé d’un immense masque de lapin pour le salut final d’une collection très artistique (tapisseries vénitiennes, toiles brûlées et recousues de l’artiste Burri).

« Nous avons travaillé pour trouver la beauté dans les éléments délaissés et abandonnés et créer à partir de cela des mosaïques, des collages », a déclaré le styliste en coulisses.  

Auparavant, le maître de la mode Giorgio Armani, 85 ans, avait présenté la collection de sa ligne Emporio. « Les tendances de mode n’existent pas ! Et elles ne doivent pas exister ! », a déclaré le styliste, teint hâlé, t-shirt noir, et baskets blanches.

« Plutôt que de vouloir absolument identifier des tendances, il faut aller en profondeur, comprendre pourquoi un créateur fait telle ou telle proposition, sans essayer de les relier ensemble », a-t-il ajouté.  

Pour sa ligne Emporio, jeune et décontractée, le créateur a souligné l’exigence de la qualité, avec des silhouettes moins « streetwear » qu’à l’accoutumée.  

Le point de départ est le noir, « la seule couleur acceptable, celle qui donne une allure », selon Armani qui note : « lorsque je passe dans la rue et que je regarde les personnes qui attendent l’autobus, la personne la mieux habillée dans le lot est toujours celle qui est habillée en noir ! ».

PHOTO ANDREAS SOLARO, AGENCE FRANCE-PRESSE

Giorgio Armani

Dans sa palette, il introduit aussi des gris, du blanc et noir à travers les tissus pied-de-poule, prince de galles, tandis que le défilé s’achève sur des verts jade ou boisé.  

« Un peu de jugeote »

Les silhouettes alternent les contrastes : long/court, large/serré, stricte/frivole. « J’ai voulu créer une collection qui donne la liberté à toutes les femmes de s’habiller avec un peu de jugeote, en choisissant les pièces qui vont avec leur mentalité et avec leur corps ».

Au risque de s’empêtrer dans les formules, le styliste termine : « évitons le ridicule. Ensuite, on va raconter que les femmes sont violées dans un coin, mais les femmes sont en permanence violées par les stylistes ».  

« Quand une femme marche dans la rue et voit une affiche publicitaire avec une femme seins nus, postérieur bien en vue, peut-être aura-t-elle envie de se montrer de la même façon vulgaire pour suivre la mode et c’est donc la responsabilité du styliste qui ne la respecte pas et d’une certaine manière, la maltraite », assène Armani.