La pénurie de chats et de chiens et l’explosion des prix ont fait bondir les demandes d’adoption pour les lapins – et leur taux d’abandon aussi. Il a grimpé de 50 % en deux ans, selon la SPCA. Choisir un lapin, ce n’est pas nécessairement pour tout le monde, préviennent les experts.

« Le syndrome du lapin de Pâques, c’est réel, lance la Dre Manon Tremblay, vétérinaire et spécialiste des animaux exotiques, et ça pousse les gens à adopter des lapins pour les mauvaises raisons puis à s’en lasser, trois ou quatre mois plus tard. »

En temps de pandémie, les enjeux sont les mêmes, selon Amélie Martel, directrice du bien-être animal à la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA). « On remarque que les lapins sont plus populaires en ce moment parce que les chiens et les chats sont plus rares et que leurs prix ont augmenté, explique-t-elle. Mais c’est un animal avec des besoins complexes. Ça prend un engagement ! »

Longtemps considéré comme un petit animal qu’on pouvait laisser en cage, un peu comme un hamster, le lapin a au contraire besoin de liberté… et d’un espace calme, adapté à ses besoins. « C’est un animal nerveux puisque c’est une proie, dit Mme Martel.

Contrairement à ce qu’on pense, ce n’est pas nécessairement un animal approprié pour les enfants.

Amélie Martel, directrice du bien-être animal à la SPCA

« Si on fait un mouvement brusque, il va s’enfuir. Il a besoin d’un environnement calme. On ne crie pas près d’un lapin, et on ne court pas », poursuit-elle.

La Dre Tremblay est du même avis : l’une des pires raisons d’adopter un lapin – et tout autre animal de compagnie – est de pousser l’enfant à « prendre ses responsabilités ». « Au bout du compte, c’est l’animal qui va en souffrir, indique-t-elle. Le mieux, c’est de prendre la responsabilité en famille. L’enfant peut s’occuper de certains soins et de quelques tâches liées à l’animal, mais toujours sous la supervision du parent. »

En liberté

La tendance est de laisser le lapin gambader dans la maison à sa guise, sans cage ni enclos. « On voit ça de plus en plus souvent depuis une vingtaine d’années », remarque la Dre Tremblay, qui a choisi de limiter sa pratique à des visites à domicile depuis 10 ans.

C’est le choix qu’ont fait Annie Ève Gratton et sa famille, il y a près de trois ans. « Il se promène au rez-de-chaussée et il a un tapis avec son foin, sa litière et son eau, dit-elle. C’est son espace à lui, c’est sa maison. »

Pour nous, il n’était pas question de le mettre en cage. Je trouve que ça rend les lapins frustrés, comme s’ils étaient punis. Ils deviennent sans âme. Et ils peuvent alors tout gruger !

Annie Ève Gratton, propriétaire d’un lapin domestique

Voilà une équation presque mathématique, souligne Amélie Martel, de la SPCA : un animal aux besoins non comblés développera des comportements compensatoires… et inadéquats. « Le lapin doit avoir une pièce à lui ou un accès partout. Il faut alors adapter l’environnement, entre autres rendre inaccessibles les fils électriques, que le lapin aura tendance à vouloir gruger et détruire. »

S’il est formé, soigné et que ses propriétaires lui donnent de l’attention, sous forme de câlins et de jeux, un lapin peut être un excellent animal de compagnie. La fille de Mme Gratton, Maude Gauthier, 11 ans, le confirme : « Je suis très contente d’avoir Léon ! s’exclame-t-elle. On a eu des hamsters, des poissons, mais là, on vit autre chose. Et je suis contente quand, dans ma classe, les autres parlent de leur chien ou de leur chat : moi, j’ai un lapin ! C’est plus rare, c’est plus original et c’est vraiment cool. »

En chiffres

Espérance de vie : de 8 à 12 ans

Nombre de lapins abandonnés ou errants rapportés à la SPCA : 134 en 2019 et 203 en 2021 (pour la même période, soit du 1er janvier au 31 août)

1000 $ : Somme à prévoir chaque année pour répondre à tous les besoins d’un lapin (foin, granules, verdures, rendez-vous annuels, équipement de base lors de l’adoption)