Notre journaliste se balade dans le Grand Montréal pour parler de gens, d’évènements ou de lieux qui marquent la vie urbaine.

Dans son sac, des chaussures de sport sont soigneusement rangées dans du plastique sous vide. On dirait qu’elles sortent directement du manufacturier, mais Dan Desormes vient plutôt de leur donner une nouvelle vie.

Celui qui se surnomme le chirurgien d’espadrilles (The Kickz Surgeon) nettoie et remet à neuf des paires de Nike, New Balance, Adidas, mais aussi de Dior, Burberry, Dolce & Gabanna et Converse pour bébés.

C’est un emploi en parallèle de ses études, mais c’est du sérieux !

Débuts modestes

Sa vocation de sauver des chaussures est née pendant la pandémie. « J’aime être actif et je ne suis pas capable de ne rien faire. J’ai juste proposé à mes amis de laver leurs souliers, raconte-t-il. Je mettais ma musique et ça m’aidait à relaxer. »

Satisfaits du résultat, ses proches lui ont proposé de se lancer en affaires et le voilà inscrit au Registraire des entreprises du Québec. Rapidement, le bouche-à-oreille a porté ses fruits. « Les clients ont apprécié mon travail et le service à la clientèle », dit-il avec humilité.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Difficile de dire si ces espadrilles sont neuves ou… remises à neuf !

Il faut dire que Dan s’occupe de la cueillette des souliers à nettoyer jusqu’à leur livraison après qu’ils ont été remis à neuf (si c’est dans le Grand Montréal). Au préalable, les clients doivent remplir un formulaire en ligne pour choisir parmi les trois services : ordinaire (30 $), en profondeur (40 $) ou opération chirurgicale (60 $). Le service ultime peut permettre la réparation de trous, de fermetures éclair et de fermoirs, et une restauration de la couleur.

On peut payer un extra pour un blanchiment des semelles et un service express en moins de 48 heures. On peut aussi demander à Dan de faire chasser les mauvaises odeurs et les taches d’une casquette, et de lui redonner forme. Pas mal, hein ?

« Dans notre contexte économique et écologique, vaut mieux faire nettoyer ses souliers que d’en acheter une nouvelle paire », fait-il valoir.

Surtout quand il s’agit d’espadrilles rares ou de collection. Dan a même eu un client de Québec qui lui a fait parvenir (par livraison !) ses Nike de la collection de feu Kobe Bryant (superstar de basketball des Lakers mort tragiquement dans un accident d’hélicoptère). Un autre lui a confié une paire de Jordan 1 d’une valeur de 2000 $.

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Dan Desormes utilise une solution magique et plusieurs types de brosses selon la rigidité du tissu ou du cuir.

Le jeune homme estime nettoyer une vingtaine de paires d’espadrilles ou de souliers par semaine. « C’est la saison occupée où les gens veulent sortir avec des espadrilles propres. »

Parfois, selon l’état des chaussures, c’est mission impossible. Mais dans la plupart des cas, les gens sous-estiment à quel point ils peuvent leur donner une nouvelle vie.

Le sport et la musique

Dan Desormes, qui a toujours vécu dans le quartier Parc-Extension, venait de finir un blitz d’études de fin de session lors de notre rencontre dans les studios du collectif Never Was Average situés rue Saint-Hubert, au nord de la Plaza.

Il étudie en loisirs (avec une concentration en gestion) à l’Université Concordia. « Je voudrais devenir directeur sportif au niveau scolaire secondaire, indique-t-il. Le sport a toujours fait partie de ma vie et je voulais redonner aux plus jeunes. »

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« Les souliers en disent beaucoup sur quelqu’un », souligne Dan Desormes.

Jusqu’à l’an dernier, Dan était membre des Stingers, l’équipe de football de Concordia. Il occupait la position de DB (demi défensif en français). Au cégep, il a défendu les couleurs des Nomades du collège Montmorency.

Dan a aussi pratiqué sérieusement le basketball et le soccer. La musique est une autre partie importante de son parcours, puisqu’il a fréquenté l’école primaire Le Plateau et l’école secondaire Pierre-Laporte. « J’étais dans le programme de musique et je jouais du tuba. Cela a ouvert mes horizons », relate-t-il.

L’an dernier, Dan a par ailleurs fait des capsules sur Instagram avec des musiciens, dont la DJ KidCrayola et le rappeur Jeekay.

Le sport d’équipe et la musique sont précieux dans l’éducation d’un enfant, souligne-t-il. C’est de faire partie d’un groupe et de bâtir quelque chose ensemble. « J’étais dans la section des cuivres, mais le seul tuba dans l’orchestre », dit-il en se remémorant à quel point l’instrument était imposant.

Il tient aussi à souligner l’importance qu’a eue dans son parcours le professeur d’éducation physique Gabriel Torado, à Pierre-Laporte. « J’étais un peu turbulent en classe et il croyait en moi. »

« J’ai vu à quel point une personne qui a ta réussite à cœur peut avoir un apport significatif dans le parcours d’un élève. »

Conclusion ? En attendant qu’il soit un mentor à son tour, il faut peut-être profiter du temps où Dan Desormes est encore aux études pour faire nettoyer vos baskets préférés !

« Je vais voir où la vie me mène », dit le jeune homme de 25 ans que l’on peut certainement qualifier de force tranquille.

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