« Je ne gère pas encore très bien mon écoanxiété. Je suis inconfortable avec elle et je ne sais pas comment la diriger. C’est pour ça que je me tiens avec Nessa depuis un an ! » De l’amitié récente qui lie la chanteuse Florence K à Nessa Ghassemi-Bakhtiari est née une conférence dans laquelle les deux étudiantes au doctorat en psychologie discuteront d’écoanxiété et de créativité.

Il y a environ un an que Florence K et Nessa Ghassemi-Bakhtiari se sont rencontrées au département de psychologie de l’UQAM. La première y mène des recherches doctorales sur le mythe de l’artiste torturé et les liens existant entre les variations de l’humeur, la créativité et le bien-être psychologique des musiciens professionnels. La deuxième s’intéresse aux conséquences qu’ont les bouleversements socioécologiques sur le bien-être des jeunes et à l’importance de l’engagement civique à l’adolescence. À l’invitation de la Société des arts technologiques (SAT), elles animeront, les 14 et 15 octobre, la conférence « En équilibre : l’écoanxiété, moteur de transformation créative », à l'intersection de leurs champs d’intérêt. L’évènement aura lieu sous le dôme immersif et sera agrémenté d’une ambiance visuelle et sonore signée par l’artiste Jules Roze.

Ensemble, Florence K et Nessa Ghassemi-Bakhtiari réfléchiront aux manières dont l’écoanxiété et la créativité peuvent cohabiter dans le but de favoriser l’adaptation aux changements climatiques. Il n’est pas question d’une conférence sur « ce qu’il faut faire et ce qu’il faut ne pas faire » pour lutter contre le réchauffement du climat, précise Florence K.

[L’écoanxiété], c’est une émotion qui n’était pas nécessairement là il y a 20 ans ou 30 ans. C’est nouveau, on l’apprivoise ensemble. On va utiliser cet espace pour la gérer, la réguler, pour nous rassembler, et on va embarquer la créativité et l’art là-dedans pour voir jusqu’où on peut aller et pour rappeler aux gens qu’on est capables de générer des idées collectives pour faire un changement.

Florence K

Les deux étudiantes ne se posent pas en expertes qui sont parvenues à surmonter leur propre écoanxiété. « En tant que mère, je ne sais pas comment la vivre, confie Florence K. Je fais de l’évitement parce que dès que je pense aux changements climatiques et que je regarde mes enfants, je tasse la pensée automatiquement. Travailler avec Nessa a été pour moi une occasion de visiter ces émotions-là. » « J’ai mon propre cheminement, poursuit sa collègue, et c’est important de dire que le cheminement n’est pas linéaire. […] L’écoanxiété, ce n’est pas juste être en détresse. Je me considère comme écoanxieuse, mais à ce moment-ci dans ma vie, je me sens très bien par rapport à tout ça. »

Un espace de discussion

Mais qu’est-ce que l’écoanxiété au juste ? Selon elle, le terme fait référence « aux émotions, pensées et comportements qu’on peut avoir face à une prise de conscience de l’ampleur des enjeux climatiques et de l’inaction collective ». « Tant que collectivement, on ne prendra pas au sérieux ces problèmes-là, ce phénomène va faire partie de notre vie », note Nessa Ghassemi-Bakhtiari.

Ce que les deux doctorantes veulent avant tout offrir avec cet évènement d’une heure, c’est un espace, trop rare selon elles, pour accueillir l’écoanxiété et en discuter. Un « contenant », disent-elles, en référence à l’expression anglophone « holding space », qui signifie d’être pleinement présent pour quelqu’un, sans jugement ni distraction. « Les émotions liées à l’écoanxiété sont souvent celles qu’on considère comme négatives dans notre société, remarque Nessa Ghassemi-Bakhtiari. La colère, la tristesse, se sentir déprimé, la honte, être anxieux, ce sont toutes des choses pour lesquelles on a tendance à dire : on ne devrait pas le vivre et il faut se guérir de ça. Alors que lorsqu’on est capable d’accueillir des émotions négatives et d’y trouver un sens, on peut les vivre de manière beaucoup plus saine et adaptative. Dans le contexte des changements climatiques, c’est primordial. »

La créativité est un élément majeur dans ce processus d’adaptation, souligne Florence K. « Face à un problème, il faut s’adapter. On va aller chercher non seulement des solutions qu’on connaît déjà, mais aussi l’idée de la cognition de la créativité et de la pensée divergente, qui consiste à aller chercher des solutions alternatives et inhabituelles qui peuvent être utiles. »

Cette créativité peut aussi être artistique. Lors de la conférence « En équilibre : art et santé mentale » qu’elle avait présentée avec Émile Roy à la SAT l’an dernier, l’artiste avait exprimé comment les bas qu’a connus sa santé mentale (elle a vécu un épisode de dépression majeure et reçu un diagnostic de bipolarité) avaient été canalisés par la musique. Cette année, le public sera invité à expérimenter le pouvoir de cohésion sociale de ce médium. La créativité, nous l’avons tous entre les mains, croit celle qui a lancé le 6 octobre dernier un nouvel album intitulé Brésil, mon amour. Et de la créativité, il en faudra.

Le 14 octobre (en français) et le 15 octobre (en anglais), à 11 h 30, à la Société des arts technologiques (SAT). Places limitées.

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