Il se sent comme un vieillard qui peine à marcher, est un peu dépassé par sa nouvelle célébrité et veut prendre le temps de revenir sur Terre (littéralement) avant d'envisager la suite de sa carrière. Mais Chris Hadfield a dit «mission accomplie», hier, lors de sa première apparition publique depuis son retour de la Station spatiale internationale, lundi dernier.

«C'est incroyable d'être ici après un voyage, une expérience comme ça. C'est tellement difficile à croire, de connecter les deux [réalités]. Il y a une période de réadaptation, c'est dur. Mais d'être là, c'est une expérience personnelle et humaine incroyable», a lancé Chris Hadfield depuis Houston, au Texas, lors d'une conférence diffusée en direct à l'Agence spatiale canadienne de Saint-Hubert.

À l'écran, Chris Hadfield semblait en forme et n'avait rien perdu de la verve qui l'a hissé au rang de star internationale pendant la mission. Mais l'astronaute canadien a admis qu'il devra être patient pour se réadapter à la vie sur Terre, tant physiquement que psychologiquement.

L'homme a perdu environ 5 % de sa densité osseuse à la suite de son séjour de cinq mois en apesanteur, et son corps doit réapprendre à fonctionner avec la gravité.

«Mon corps est très confus actuellement», a-t-il expliqué, disant souffrir d'étourdissements qui l'amènent à se cogner parfois sur les murs. Une situation normale après un si long séjour en apesanteur et qui s'améliore «d'heure en heure», a assuré l'astronaute.

«Les autres membres de l'équipe et moi titubons comme des vieillards. On a l'air de ce qu'on sera dans 30 ans, au centre d'accueil, en train d'essayer de passer de la chaise berçante au sofa», a-t-il lancé avec son humour habituel. Chris Hadfield portait d'ailleurs hier une combinaison spéciale destinée à pousser le sang vers la tête, son corps ayant temporairement «oublié» comment l'y acheminer.

«Un rat de laboratoire»

«Hier, je me suis étendu sur un matelas et j'avais l'impression que j'avais deux gars sur le dos. C'est une sensation très étrange, comme si quelqu'un me maintenait toujours au sol. Ça semble tellement... injuste!», a aussi lancé M. Hadfield.

Ces symptômes s'apparentent beaucoup à ceux d'un vieillissement accéléré et intéressent grandement les médecins, qui mitraillent les astronautes de tests pour en apprendre plus.

«Je suis un gros rat de laboratoire», a comparé Chris Hadfield.

À 53 ans, Chris Hadfield en était sans doute à son dernier voyage spatial, et plusieurs observateurs le voient déjà à la tête de l'Agence spatiale canadienne. L'astronaute a toutefois refusé de s'avancer sur la suite de sa carrière.

«C'est comme demander à un bébé s'il est prêt pour le doctorat, a-t-il comparé. Pour l'instant, j'essaie simplement de me tenir debout - je dois encore m'asseoir dans la douche pour ne pas m'effondrer. Alors c'est trop tôt pour parler de ça.»

Chris Hadfield s'est dit heureux de l'engouement que sa mission a suscité. «C'est une expérience trop extraordinaire pour la garder pour soi. Plus il y a de gens qui la partagent, mieux c'est», mentionne celui qui dit peiner à mesurer pleinement la célébrité dont il a fait l'objet au Canada et partout dans le monde pendant son séjour en orbite.

S'il a apprécié la beauté de la Terre vue de l'espace, il a raconté avec émotion le déluge d'odeurs et de sensations qui l'a assailli lorsque la capsule Soyouz dans laquelle il prenait place s'est posée dans les steppes du Kazakhstan, lundi dernier.

«On a senti le vent et l'herbe...Tom [Marshburn, un autre astronaute] et moi, on s'est regardés, on a souri et on a dit: "Ça sent le printemps!" », a relaté M. Hadfield.