Telle une Marie Kondo du cadeau, vous aspirez au minimalisme. Or, le moment du réveillon venu, la montagne de paquets est bel et bien là. Cette année encore, les enfants recevront beaucoup (trop) de cadeaux. Conseils pratiques pour gérer l’abondance.

« La famille évolue et on a aujourd’hui beaucoup d’adultes pour peu d’enfants, constate la psychoéducatrice Solène Bourque, auteure de plusieurs ouvrages éducatifs. Pour une famille de deux enfants, il peut y avoir huit adultes significatifs qui veulent offrir des cadeaux. »

Appelé à déballer successivement un nombre considérable de présents, l’enfant pourrait être envahi d’un sentiment d’excitation qui n’est pas nécessairement positif, expose-t-elle. « Selon l’âge de l’enfant, les réactions peuvent varier. Mais le stress, qu’il soit positif ou négatif, a un impact sur l’enfant et son humeur. L’enfant qui est fébrile, excité, va peut-être aussi être irritable plus facilement et plus fatigué, parce qu’il y a beaucoup d’action et de stimulation. C’est le piège qu’on essaie d’éviter. »

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Solène Bourque, psychoéducatrice et auteure

Devant la somme de cadeaux à ouvrir, il peut être tentant de vouloir accélérer le rythme. Une mauvaise idée, selon Solène Bourque. « Tout le côté de gratitude qu’on veut inculquer à l’enfant, de démontrer son enthousiasme face à un cadeau, c’est comme si on le freinait parce qu’il y a d’autres cadeaux à développer. L’enfant va embarquer dans ce rythme-là et au lieu d’avoir du plaisir à s’amuser avec ses cadeaux, il va juste machinalement continuer à développer et à en demander un autre. Et là, on va dire : “Comment ça, il est ingrat ? Il n’est pas allé dire merci !” »

L’ergothérapeute Francine Ferland, professeure émérite à l’Université de Montréal et auteure de plusieurs ouvrages parus aux Éditions du CHU Sainte-Justine, croit elle aussi que la remise de cadeaux devrait se faire plus doucement. Alterner les cadeaux que l’enfant reçoit et ceux qui vont à d’autres personnes permet de laisser le temps au petit de s’approprier le jouet qu’il a reçu. Idéalement, le parent l’accompagne dans sa découverte sans lui donner toutes les réponses. 

On peut aussi instaurer des traditions familiales. Avant de déballer un cadeau, on chante une chanson de Noël. Cela crée un moment festif en dehors des cadeaux.

Francine Ferland

Solène Bourque suggère pour sa part de diviser la remise des cadeaux en plusieurs périodes, par exemple à l’arrivée des invités, avant le repas et en fin de soirée. « De répartir ça en petits moments peut rendre chacun un peu plus précieux et intéressant », souligne-t-elle.

Lendemain de veille

Au lendemain de Noël, la gestion de l’abondance demeure aussi importante. Selon les deux spécialistes, une chambre aux allures de magasin de jouets ne rend pas service à l’enfant. « S’il a trop de choix, il risque de perdre l’intérêt ou même de ne pas savoir vers quoi s’enligner, explique Solène Bourque. Il va papillonner d’un jeu à l’autre sans trop s’investir. » Francine Ferland recommande de faire une rotation entre les jouets l’année durant, mais particulièrement à la veille de Noël, afin de ranger ceux avec lesquels l’enfant joue moins.

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Francine Ferland, professeure émérite à l’Université de Montréal

Toutes deux s’accordent pour dire que cette réflexion sur l’abondance commence à la source, en limitant le nombre de cadeaux offerts, en donnant du temps et des activités en famille et en sensibilisant les enfants à la surconsommation. « S’il y a des gens qui sont heureux avec la montagne de cadeaux, pas de problème, nuance Solène Bourque. Mais de façon générale, ce que j’entends, c’est : “Tabarouette, tout ce qu’on se ramasse, c’est une grosse pile de papier dans un coin. Il n’a pas joué avec aucun de ses cadeaux et finalement, il finit la soirée à jouer avec une boîte vide.” Alors, à partir de cette insatisfaction, comment peut-on intervenir ? En changeant nos rituels comme parents, ce qu’on offre, comment on organise la remise des cadeaux, et de sensibiliser les enfants à ça aussi. »