Il a fait fortune grâce à un presse-citron en forme d'araignée, mais on lui doit aussi les hôtels les plus branchés du monde. Philippe Starck est le designer le plus célèbre de la planète. Travailleur infatigable, cet homme aux 6000 projets a un parcours peu ordinaire façonné au gré de ses envies et de ses coups de crayon.

Il a fait fortune grâce à un presse-citron en forme d'araignée, mais on lui doit aussi les hôtels les plus branchés du monde. Philippe Starck est le designer le plus célèbre de la planète. Travailleur infatigable, cet homme aux 6000 projets a un parcours peu ordinaire façonné au gré de ses envies et de ses coups de crayon.

 Philippe Starck est né le 18 janvier 1949 à Paris d'un père ingénieur en aéronautique. Il n'est probablement pas étranger à la passion de Starck pour le design qui s'est manifestée dès son jeune âge. Il a fait ses études à l'École de design Camondo, avant de lancer sa première entreprise de meubles gonflables en 1968.

Il a ensuite fait un passage comme directeur artistique chez Pierre Cardin avant de commencer sa carrière de designer indépendant en créant des discothèques branchées. Mais c'est à 34 ans que sa carrière décolle, lorsqu'il redécore les appartements privés du président François Mitterrand à l'Élysée.

Ce projet le catapulte sur la scène internationale, et sur cette lancée il réalise une série d'aménagements intérieurs futuristes et luxueux, dont le Café Costes à Paris et l'hôtel Royalton à New York. Ces endroits deviennent aussitôt des hauts lieux d'attraction. «Le style Starck est résolument français, s'inspirant avec parcimonie de l'art déco français, même si l'influence des lignes aérodynamiques américaines du début du XXe siècle est nettement visible», écrit l'historienne du design Judith Carmel-Arthur dans son livre Philippe Starck.

Les meubles et objets du quotidien que cet excentrique dessine sans arrêt lui offriront le succès planétaire. Certaines sources indiquent que son coup de crayon lui rapporte quelque 20 millions $ par année. Starck donne à ses créations des noms pleins de caractère et des lignes attirantes: le presse-citron Juicy Salif, la lampe Ara, la bouilloire Hot Bertaa, la passoire Max le Chinois et la chaise en plastique Dr Glob. «Ses objets font rire, et c'est ce que j'adore», indique la designer Monique Amyot, qui se décrit comme une passionnée de Philippe Starck. Elle a placé plusieurs de ses chaises Louis Ghost, en plexiglas transparent, dans le hall de l'Auberge Saint-Antoine, à Québec. Et elle a visité tous les hôtels qu'il a aménagés aux quatre coins du globe. «J'admire son travail et je le suis à la trace depuis ses débuts. Il ne se prend pas au sérieux, et c'est comme une bouffée d'air frais!»

La designer apprécie également la créativité de ce touche-à-tout qui se renouvelle continuellement. Philippe Starck porte, pour sa part, un regard très critique sur son travail. «Je n'aime rien de ce que j'ai fait. C'est pour cela que je continue de le faire. Je suis sans talent, cynique, lâche et mercantile», affirme-t-il dans une récente entrevue au magazine Metropolitan Home.

Il a néanmoins inspiré plusieurs générations de designers qui savourent ses objets rigolos et provocants. «Il réussit à faire des designs qui touchent les cordes sensibles des gens. Et qui sont classiques tout en étant très modernes à la fois», estime le designer industriel Marc Boudreau. Mais il ajoute : «Sa réputation a tendance parfois à le rendre plus grand que nature. Il y a d'autres excellents designers sur la planète, mais qui ne cherchent pas nécessairement à se faire voir autant», souligne-t-il.

Philippe Starck a en effet su tirer profit de l'engouement général pour son design urbain très classe, ce que plusieurs ont qualifié de culte de la célébrité. Les médias y ont certes beaucoup contribué en glorifiant son nom à la une des journaux et revues. Mais le designer affirme se tenir loin des médias et de la vie branchée. «Je ne fais jamais d'autopromotion. Je ne vais jamais aux soirées cocktails. Je vis au milieu de nulle part dans la campagne», affirme-t-il.

Sans avenir, le design?

La philosophie de celui que la presse étrangère appelle The agent provocateur of design a également grandement évolué au fil des ans. Starck reconnaît que certains de ses designs des années 80 et 90 ont été créés par l'attrait de la nouveauté et de la mode. Il est de plus en plus préoccupé par l'environnement et affirme que le designer doit ajouter un plus au bonheur.

Il a même annoncé vouloir délaisser l'objet - qui selon lui finira par s'effacer - pour se consacrer aux concepts. «D'ici 10 ans, les objets fonctionnels des maisons seront remplacés par des services immatériels. Alors, nos maisons seront remplies seulement de choses sentimentales, comme une peinture faite par votre fille ou une chaise construite par votre garçon à l'école. Nous n'aurons plus besoin d'objets. C'est pour cela que le design n'a pas de futur. De moins en moins de maisons seront construites pour l'architecture, pour l'argent», a expliqué au Metropolitan Home celui qui préfère le nom de créateur à celui de designer.

Mais ce mégalomane, qui dessine sans répit, ne manque pas d'idées pour combler ce vide qu'il appréhende. Son prochain défi: redessiner les fusées de Virgin Galactic, la compagnie qui organisera les premiers voyages touristiques dans l'espace...

LES INFLUENCES DE PHILIPPE STARCK

Le célèbre designer puise son inspiration dans plusieurs personnalités et sphères de l'art. Il a déjà expliqué dans ses livres ceux qu'il admire. En voici quelques exemples.

- Le sculpteur américain Alexander Calder: pour avoir réussi à faire de l'art avec un bout de fil de fer

- L'architecte espagnol Antoni Gaudi: pour avoir eu l'intuition organique

- Le cinéaste allemand Wim Wenders: pour nous faire aimer les images de l'Amérique

- L'architecte canado-américain Frank Gehry: pour être libre dans un pays qui ne l'est plus (États-Unis)

- Le designer japonais Shiro Kuramata: pour avoir parlé de l'invisible

- Le chanteur américain Lou Reed: pour nous avoir appris à vivre

__________________

Sources: Starck de Philippe Starck, Design du XXe siècle de Charlotte et Peter Fiell, Philippe Starck de Judith Carmel-Arthur, le magazine Metropolitan Home, l'hebdomadaire L'Express et le site Internet www.philippe-starck.com.