Ça commence souvent par un coup de coeur, puis d'achats en trouvailles, le passe-temps devient collection. Puis passion, qui envahit toute la maison! Dans cette série, nous vous présentons des collectionneurs aguerris... et certains de leurs plus précieux objets.

S'il y a une chose que François Dubuc savait à l'âge de 15 ans, c'est qu'il ne voulait jamais «faire comme son père», qui était réparateur d'électroménagers! Il a presque tenu parole: il est devenu un collectionneur passionné et donc un réparateur avec encore plus de ferveur.

«Au début des années 2000, se souvient François, je travaillais temporairement - c'est du moins ce que je croyais - dans le commerce de mon père lorsque je suis tombé sur un intrigant frigo sur pattes. Je connaissais bien les modèles des années 50 avec les coins arrondis, mais je n'avais encore jamais rien vu de semblable. Je l'ai décapé et repeint, j'ai remplacé le circuit électrique. J'ai branché ça et tout fonctionnait!»

À partir d'une signature et d'un numéro de téléphone à quatre chiffres encore apparents sur la carcasse, il est remonté à la source de son appareil Frigidaire datant de 1934. Ses recherches l'ont aussi mené vers une entreprise géorgienne qui faisait commerce d'anciens électroménagers.

«Tout d'un coup, dit-il, j'ai compris qu'ici, on envoyait tout à la ferraille!» Deux ans plus tard, François Dubuc lançait son opération «sauvetage» avec une petite douzaine de vieux frigos.

Depuis un peu plus de 10 ans, il recycle des réfrigérateurs et des cuisinières électriques produits avant la Seconde Guerre mondiale jusqu'à la fin des années 60, dont plusieurs ont été fabriqués au Québec. «Les appareils Bélanger étaient fabriqués à Montmagny, la compagnie Racine était établie à Granby et l'entreprise Roy à L'Assomption. Aujourd'hui, presque plus rien n'est construit chez nous, alors j'essaie de conserver ce qui peut l'être.»

Et qu'advient-il du fréon, ce gaz utilisé en réfrigération à l'effet néfaste sur la couche d'ozone? «Le gaz utilisé dans les frigos d'aujourd'hui n'est pas miraculeux, soutient-il. Dans les anciens réfrigérateurs, les systèmes de tuyauterie étaient très bien faits. La plupart contiennent encore la totalité de leur gaz d'origine, qui a conservé toutes ses propriétés. S'il faut le retirer, il suffit de le récupérer de façon responsable. Il n'y a pas plus écologique que de restaurer un objet qui va durer encore 30, 40 et même 50 ans. Je récupère des morceaux pour rénover d'autres appareils, le vieux fer est recyclé.»

Ça amène un questionnement sur ce qu'on achète à l'état neuf et qui souvent ne vaut même pas la peine d'être réparé...

«Je ne veux pas créer un musée avec mes appareils remis à neuf, affirme François, je veux qu'ils servent dans les cuisines de tous les jours.» Et M. Dubuc de faire sa part: pour son propre usage, il utilise trois frigos recyclés. Deux modèles d'avant-guerre et cette folie de Philco, le V Handle, dont le système de pentures révolutionnaire permet d'ouvrir la porte en tout temps de la droite comme de la gauche. «En tout, je n'ai pas eu plus de sept ou huit exemplaires de ce modèle exceptionnel que les connaisseurs s'arrachent aux États-Unis pour pas moins de 10 000$.»

Au moment de notre entretien, le cuisinier sherbrookois Danny St Pierre attendait impatiemment sa restauration d'une cuisinière à deux fours RCA Victor des années 60 et d'un réfrigérateur General Electric de 1958.

«Avec le temps, raconte François, je me suis aussi mis à collectionner de petits objets, dont une mini-cuisinière avec un petit élément pouvant cuire un muffin!»

Pourtant, à part de ramasser des cailloux sur la plage quand il était jeune, François Dubuc n'a jamais collectionné grand-chose. Il lui fallait une dévorante passion pour investir autant de temps et d'argent à faire perdurer et reconnaître la valeur de ce patrimoine. «Il faut avoir l'esprit bricoleur, être à la fois électricien, frigoriste, plombier, machiniste, carrossier et antiquaire. Tous ces gars-là font un bon 40 000$ par année, mais je vous jure que moi, je ne gagne pas ça. Si j'avais fait ça pour l'argent, ça ferait longtemps que j'aurais démissionné.»

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