Valérie Bédard est une alchimiste du textile. Mais contrairement à ces savants philosophes du Moyen Âge qui rêvaient de transmuter le plomb en or, Valérie travaille les deux pieds sur terre. La jeune femme invente des tissus. Et pas n'importe lesquels. Des pièces qui amalgament des matériaux apparemment incompatibles. Par exemple, auriez-vous l'idée de mettre des rubans de cassette audio sur un métier à tisser? Valérie Bédard l'a fait.

C'est d'ailleurs à force de jouer avec des fibres de toutes sortes qu'un beau jour elle a ajouté des brins de ruban audio à des fils de coton et de polyester. De ce mélange est né un tissu qui se lave, se coud en plus de présenter une délicate brillance. Et ce scintillement de l'étoffe, c'est un effet direct des rubans cassettes, explique Valérie Bédard en entrevue.

«Lors de mes premiers tests, je savais que l'étoffe serait brillante, dit-elle, mais j'ignorais que ça serait solide.» Or c'était là une condition essentielle pour que l'artisane puisse en tirer une collection maison de porte- monnaies, de sacs à main, d'étuis à crayons et de coussins faits à partir de son invention. Les résultats l'ont comblée, ce qui lui a permis de créer une gamme de produits pour le Salon des artisans de Québec qui aura lieu au Centre de foires d'ExpoCité, du 9 au 19 décembre.

Mais comme il lui faut toute une cassette pour confectionner 12 pouces de tissu, Valérie a besoin d'approvisionnement. Elle est en recherche constante de matière première. Or, ces rubans cassettes sont en voie d'extinction. C'est pourquoi l'artisane lance un appel à tous afin de mettre la main sur un maximum de ces antiquités. Prière de la joindre à l'adresse info@audiofil.ca.

Invention

Pour l'instant, c'est dans un petit atelier de la Cartonnerie du boulevard Langelier que la jeune femme mène ses expériences textiles. Une spécialité qu'elle a apprise au Cégep Limoilou. Or, trois ans après avoir obtenu son diplôme en de- sign textile, l'artisane a non seulement inventé un produit qui la démarque sur le marché, mais elle a aussi monté sa propre compagnie baptisée Audiofil dont l'objectif est de créer des tissus écologiques faits de matières naturelles et recyclées. Et son «tissu ruban cassette» risque d'accélérer son ascension. À preuve, des couturiers l'ont déjà approchée avec l'intention de fabriquer rien de moins qu'une robe de soirée à partir de son tissu.

«C'est un projet qui m'emballe, dit-elle, parce qu'un mètre de tissu peut contenir des dizaines de rubans cassettes qui ont connu leur heure de gloire en diffusant les succès d'une certaine époque.»

Et au risque de se répéter, Valérie Bédard rappelle que sa première motivation, c'est d'inventer des tissus. Le design textile est jeune au Québec. «Je caresse l'ambition, dit-elle, de faire émerger cette forme d'art, de le faire connaître et même de l'enseigner.»

Dans cette veine, elle participera, du 3 au 5 décembre, à l'événement écoresponsable qui se tiendra au Musée de l'environnement de la Biosphère de Montréal. Mais son plus cher désir serait de réaliser un somptueux rideau de scène pour le scénographe et metteur en scène Robert Lepage.

Information :

www.valeriebedard.ca

info@audiofil.ca