Les négociations reprennent dimanche au Caire sur une possible trêve pendant le ramadan à Gaza, où les premiers largages américains d’aide humanitaire ont commencé à destination de la population civile affamée.

Dans la capitale égyptienne, une délégation du Hamas doit donner une « réponse officielle » à une proposition élaborée fin janvier par les pays médiateurs – Qatar, États-Unis, Égypte – et les négociateurs israéliens, selon une source proche du mouvement islamiste palestinien.  

La proposition inclut dans une « première phase » une pause de six semaines des combats et la libération de 42 otages détenus à Gaza en échange de Palestiniens emprisonnés par Israël.

Les Israéliens ont « plus ou moins accepté » le plan et « la balle est dans le camp du Hamas », a assuré samedi un haut responsable américain à Washington.

Israël n’a pas confirmé ces informations. Vendredi, le président américain Joe Biden avait répété « espérer » une trêve d’ici au ramadan, le mois sacré du jeûne musulman, qui commencera les 10 ou 11 mars cette année.

En près de cinq mois, la guerre provoquée par le Hamas a fait 30 320 morts dans la bande de Gaza, en majorité des civils, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.

Elle y a aussi provoqué une catastrophe humanitaire. Selon l’ONU, 2,2 millions des 2,4 millions d’habitants sont menacés d’une famine « quasiment inévitable », d’après Jens Laerke, porte-parole de l’Ocha, l’agence de coordination des affaires humanitaires des Nations unies.

Le ministère de la Santé du Hamas a fait état de 13 enfants morts de « malnutrition et de déshydratation » ces derniers jours.

66 « colis » américains

Face aux difficultés d’acheminer l’aide humanitaire par la route dans le territoire bouclé par Israël, plusieurs pays y ont récemment parachuté des cargaisons, notamment la Jordanie avec la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, ainsi que l’Égypte en coopération avec les Émirats arabes unis.

Les États-Unis ont aussi mené samedi une première opération de largage, avec trois avions militaires qui ont parachuté 66 « colis » contenant plus de 38 000 repas, dans une opération conjointe avec la Jordanie, selon un responsable militaire américain.  

PHOTO KOSAY AL NEMER, REUTERS

Des gens regardent l’armée américaine larguer ses premiers secours sur Gaza, le 2 mars.

La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent menée le 7 octobre dans le sud d’Israël par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza, où le mouvement a pris le pouvoir en 2007.

Cette attaque a fait au moins 1160 morts, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.  

Environ 250 personnes ont aussi été enlevées et, selon Israël, 130 otages sont encore retenus dans la bande de Gaza, dont 31 seraient morts. Une trêve fin novembre avait permis la libération de 105 otages en échange de 240 détenus palestiniens.

Israël a juré d’anéantir le Hamas qu’il considère comme une organisation terroriste, de même que les États-Unis et l’Union européenne.  

Le premier ministre Benyamin Nétanyahou a annoncé le lancement prochain d’une opération d’envergure sur Rafah (sud) pour vaincre le mouvement islamiste dans son « dernier bastion ».  

PHOTO MOHAMMED ABED, AGENCE FRANCE-PRESSE

Vue sur Rafah

Cette perspective inquiète la communauté internationale car la ville abrite près de 1,5 million de Palestiniens, en grande majorité des déplacés, piégés contre la frontière fermée avec l’Égypte.

Accusations « sans fondement »

Le Conseil de Sécurité de l’ONU a exprimé samedi sa « grave préoccupation » face à l’insécurité alimentaire à Gaza et appelé à la livraison sans entraves d’une aide humanitaire « à grande échelle ».

Les cargaisons par voie terrestre, soumises au feu vert d’Israël qui impose un blocus à Gaza depuis 2007, n’arrivent qu’en quantité très limitée, principalement via Rafah, depuis l’Égypte.

Leur acheminement, notamment dans le nord du territoire, est périlleux en raison des combats, des bombardements israéliens, des décombres bloquant des routes et parfois de pillages.

Une distribution d’aide dans la ville de Gaza a tourné au drame jeudi quand plusieurs centaines de personnes se sont ruées sur des camions d’aide humanitaire.  

Le Hamas affirme que l’armée israélienne a ouvert le feu sur la foule affamée. Israël a évoqué des « tirs limités » de soldats qui se sentaient « menacés » mais assure que la majorité des victimes ont été tuées dans une bousculade et d’autres écrasées par les camions.  

Le drame a fait 118 morts et 760 blessés, selon le Hamas.

PHOTO KOSAY AL NEMER, REUTERS

Un Palestinien blessé par des tirs israéliens alors qu’il attendait de l’aide est allongé sur un lit à l’hôpital al-Chifa, le 1er mars à Gaza.

Une équipe de l’ONU a dit avoir constaté « un grand nombre » de blessures par balles dans un hôpital de la ville où avaient été admis de nombreuses victimes.

« Dire que nous avons attaqué le convoi et délibérément atteint des gens est sans fondement », a affirmé samedi le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari.

La communauté internationale a réclamé une enquête et un cessez-le-feu immédiat.

« Tout le monde a faim »

Les largages d’aide ou d’éventuelles livraisons par voie maritime, une autre option étudiée par les États-Unis, « ne peuvent pas se substituer à la nécessaire entrée de l’aide par autant de voies terrestres que possible », a insisté un haut responsable américain.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a fait état samedi d’« un besoin urgent d’un accès accru pour atteindre toutes les personnes » en détresse alimentaire.

Washington va « insister auprès d’Israël pour qu’il facilite l’entrée de davantage de camions », a affirmé Joe Biden.

« Nous avons reçu deux sacs de farine de l’aide arrivée le jour du massacre à Gaza jeudi », témoigne Hicham Abou Eïd, un habitant de 28 ans du quartier de Zeitoun : « Cela ne suffit pas. Tout le monde a faim. L’aide est rare et insuffisante ».

Benyamin Nétanyahou fait aussi face à la pression des proches des otages pour parvenir à un accord avec le Hamas sur leur libération. Samedi, des milliers de manifestants ont terminé à Jérusalem une marche de quatre jours commencée près de la frontière avec Gaza.

« Nous voulons qu’ils rentrent chez eux, nous voulons qu’ils soient en vie », a déclaré à l’AFP Reut Diamant, une manifestante. « Nous ne voulons plus attendre. »