(Bruxelles) Un « nouveau chapitre » dans les relations UE-Pologne : Bruxelles a annoncé lundi son intention de mettre fin à une procédure qui visait Varsovie depuis six ans en raison des atteintes à l’indépendance de la justice reprochées à l’ancien gouvernement nationaliste.  

Pour la Commission européenne, qui salue les efforts engagés par le gouvernement de Donald Tusk, « il n’y a plus de risque clair d’une violation grave de l’État de droit en Pologne au sens de l’article 7 du traité de l’UE ».

Varsovie a immédiatement salué « une bonne nouvelle ». « Cela renforce la Pologne au sein de l’Union européenne […] Il n’y a plus sur nous cette ombre négative », a réagi la ministre du Développement et des Politiques régionales, Katarzyna Pelczynska-Nalecz, sur la chaîne TVN24.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est elle réjouie d’un « nouveau chapitre pour la Pologne », félicitant les autorités de ce pays pour cette « avancée majeure ».

Dans une démarche jusqu’alors inédite, l’exécutif européen avait en décembre 2017 activé l’article 7 contre la Pologne, en réaction aux réformes judiciaires mises en place par le parti nationaliste Droit et Justice (PiS), au pouvoir jusqu’en 2023, accusées de saper l’indépendance des juges.

Cette procédure européenne, destinée à sanctionner un pays membre où est constatée une « violation grave » de l’État de droit, peut en théorie aller jusqu’à une suspension des droits de vote de ce pays au sein du Conseil de l’UE.

Elle a aussi été déclenchée à l’encontre de la Hongrie de Viktor Orban, à l’initiative cette fois du Parlement européen, en septembre 2018, en raison d’une menace « systémique » pesant sur les valeurs de l’UE dans ce pays.

Dans un cas comme dans l’autre, la procédure a donné lieu à des auditions de ministres devant leurs pairs de l’UE. Les États membres n’ont cependant jamais enclenché les étapes suivantes. Le soutien mutuel entre Hongrie et Pologne rendait en effet inenvisageable une décision sur ce dossier sensible.

Mais les relations UE-Varsovie connaissent un renouveau depuis la défaite du PiS lors des élections législatives d’octobre 2023 et l’arrivée au pouvoir des forces pro-européennes emmenées par Donald Tusk.

Déblocage des fonds

L’exécutif européen souligne que ce pays a lancé une série de mesures pour améliorer l’indépendance de son système judiciaire, a reconnu la primauté du droit européen, et s’est engagé à appliquer les décisions de la justice de l’UE et de la Cour européenne des droits de l’homme.

Bruxelles se félicite du plan d’action sur l’État de droit présenté en février par Varsovie, ainsi que de la participation de ce pays au parquet européen.

La décision de la Commission sera soumise aux ministres des 27 lors du Conseil des affaires générales du 21 mai pendant lequel ils pourront présenter leurs observations. La Commission mettra ensuite formellement fin à la procédure.

En février, la Commission avait déjà mis en avant les efforts de Varsovie en matière d’État de droit pour annoncer le déblocage de fonds européens jusque-là gelés en raison des réformes controversées du PiS. Ce qui avait ouvert la voie à plus de 136 milliards d’euros de versements d’ici à 2027.

Après le retrait de la Pologne, la Hongrie sera le seul État membre visé par la procédure de l’article 7.  

Un autre pays suscite toutefois des inquiétudes au sein de l’UE en matière de respect de l’État de droit : la Slovaquie, depuis l’arrivée au pouvoir du premier ministre populiste Robert Fico en octobre 2023.  

La Commission européenne a en particulier dénoncé la suppression d’un bureau de procureur spécialisé qui surveillait les affaires de corruption de haut niveau.

La commissaire chargée des valeurs et de la transparence, Vera Jourova, avait averti en janvier que l’UE pourrait prendre des sanctions financières contre ce pays si la protection contre la corruption n’était pas garantie.