(Paris) Le ministre de la Justice français, Éric Dupond-Moretti, a échoué vendredi à faire constater l’irrégularité de la perquisition menée dans ses bureaux en 2021 dans le cadre de l’enquête qui lui vaut d’être renvoyé en procès pour des conflits d’intérêts liés à ses fonctions passées d’avocat.

Nommé à la surprise générale à la Justice en juillet 2020 par Emmanuel Macron, cet ancien ténor du barreau est soupçonné d’avoir usé de ses fonctions ministérielles pour régler des comptes avec des magistrats avec lesquels il avait eu maille à partir du temps où il était avocat. Il avait notamment ordonné des poursuites disciplinaires contre un magistrat qui avait inculpé un de ses clients à Monaco.

Initiée par les syndicats de magistrats, l’enquête, inédite en France, a conduit à la mise en accusation d’Éric Dupond-Moretti, poids lourd et forte tête du gouvernement, et à son renvoi en procès devant la juridiction chargée de juger les infractions commises par les ministres, la Cour de justice de la République. Le ministre a formé un recours contre ce renvoi.

Dans le cadre de ces investigations, une perquisition avait été menée le 1er juillet 2021 au ministère de la Justice, situé place Vendôme à Paris, provoquant la colère de M. Dupond-Moretti qui en a contesté la légalité.

Le ministre avait saisi le Conseil constitutionnel dans l’espoir de faire constater que la loi française, qui ne prévoit aucune restriction particulière lors de perquisitions dans un ministère, enfreignait le principe de séparation entre les pouvoirs exécutif et judiciaire et était ainsi contraire à la Constitution.

L’institution, garante de la constitutionnalité des lois, lui a toutefois donné tort vendredi en rappelant que le principe de séparation des pouvoirs qui régit les institutions n’est pas en tant que tel « un droit ou une liberté que la Constitution garantit » et ne peut donc justifier la saisine du Conseil constitutionnel par un justiciable.

« Le Conseil refuse de reconnaître une valeur constitutionnelle à l’indépendance du pouvoir exécutif quand le pouvoir parlementaire comme le pouvoir judiciaire bénéficient de régimes spéciaux s’agissant des perquisitions », a regretté auprès de l’AFP Me Patrice Spinosi, conseil d’Éric Dupond-Moretti, y voyant un « déséquilibre institutionnel ».

Fragilisé par sa mise en cause judiciaire, Éric Dupond-Moretti a toujours exclu de démissionner.