(Édimbourg, Londres) Au lendemain de la démission surprise de la première ministre Nicola Sturgeon, son parti, le SNP, a fixé jeudi le calendrier pour désigner son successeur qui aura la lourde tâche de reprendre le flambeau de la cause indépendantiste.

Un vote interne au parti se tiendra entre les 13 mars et 27 mars, a annoncé le SNP jeudi soir à l’issue d’une réunion de ses responsables pour déterminer les modalités de désignation de leur futur chef.  

Un calendrier resserré — la précédente campagne, en 2004, avait duré deux mois et demi — qui illustre la volonté des indépendantistes de régler au plus vite cette question de la succession de Nicola Sturgeon, à moins de deux ans des prochaines élections législatives au Royaume-Uni.

Les candidats auront jusqu’au 24 février pour se déclarer.  

Personne ne l’a encore fait, mais, selon des médias locaux, le ministre de la Santé Humza Yousaf pourrait annoncer sa candidature prochainement. Parmi les autres prétendants potentiels figurent la jeune ministre des Finances Kate Forbes ou encore l’ancien député Angus Robertson.

L’adjoint de Nicola Sturgeon John Swinney, pressenti, a annoncé qu’il ne serait pas candidat.

Quel que soit le futur premier ministre, il aura la lourde tâche de prendre la relève de Nicola Sturgeon, qui a porté haut la cause indépendantiste, sans toutefois la faire aboutir jusqu’ici, Londres refusant la perspective d’un nouveau référendum.

Les responsables du parti ont ainsi décidé jeudi soir de reporter un congrès capital sur le sujet qui devait avoir lieu en mars.

« Ce serait une erreur d’avoir un dirigeant nouvellement élu lié à une décision clé sur la manière dont nous assurons la démocratie en Écosse face à l’intransigeance continue » de Londres, a justifié jeudi soir Lorna Finn, secrétaire nationale du parti.

L’annonce mercredi du départ de Nicola Sturgeon à 52 ans laisse toutefois un immense vide. En huit années au pouvoir, la dirigeante arrivée après la victoire du « non » au référendum d’autodétermination de 2014 avait réussi à relancer son camp défait et à accumuler les succès électoraux.

« Si (Nicola Sturgeon) ne peut pas diriger l’Écosse, qui le peut ? », s’interrogeait d’ailleurs jeudi le magazine politique The Spectator.

« Sans aucun doute, Nicola Sturgeon est la meilleure militante pour le SNP et elle a été une remarquable communicante », a affirmé auprès de l’AFP James Mitchell de l’université d’Édimbourg.

Mais « le soutien à l’indépendance n’a pas augmenté autant qu’elle l’avait prédit. Elle n’a pas été en mesure de répondre à certaines questions très délicates concernant l’indépendance, les retraites, l’Union européenne, la monnaie », tempère cet expert.

Menace travailliste

Après une décision de la Cour suprême en 2022 confortant Londres dans son refus d’organiser une nouvelle consultation populaire — réclamée par le SNP qui estime que le Brexit a changé la donne —, Nicola Sturgeon avait appelé à faire des prochaines élections législatives britanniques en 2024 un « référendum de facto », une perspective controversée au SNP et parmi l’électorat.

Le SNP doit « mettre en pause » le combat pour l’indépendance écossaise afin de « donner à notre nouveau dirigeant l’opportunité et l’espace pour définir sa vision », a ainsi estimé sur la BBC le patron du parti au Parlement britannique Stephen Flynn.

À l’approche des législatives au Royaume-Uni, certains estiment que les incertitudes sur une nouvelle direction pourraient faire les affaires du parti travailliste, en force dans les sondages, mais à la peine en Écosse face au puissant SNP ancré à gauche.  

« Le contexte politique britannique est en train de changer. Le SNP se porte bien quand les Tories se portent bien et la perspective d’un gouvernement travailliste va nuire au SNP », estime James Mitchell.  

« La fenêtre se referme peut-être pour le SNP », a-t-il ajouté même si, selon lui, « le SNP ne va pas disparaître, loin de là ».

Nicola Sturgeon a annoncé son départ en expliquant ne plus avoir « l’énergie » pour assurer son rôle.

Longtemps populaire, elle a été récemment fragilisée par une loi controversée facilitant le changement de genre. Dans la foulée, l’emprisonnement dans un établissement pour femmes d’une femme transgenre condamnée pour le viol d’une femme avant sa transition a fait scandale, la plaçant sur la défensive.

La première ministre a indiqué qu’elle resterait en poste jusqu’à la désignation d’un successeur et qu’elle resterait députée au Parlement écossais jusqu’aux prochaines élections prévues en 2026.